Dans l'Allier avant les européennes, le casse-tête des panneaux électoraux pour les petites communes
Les communes ont dû "gratter les fonds de tiroirs" cette année, voire se mettre au bricolage?! Voilà une question pratique des élections européennes, qui pose bien des soucis aux petites communes : le nombre de panneaux à installer devant chaque bureau de vote.
Comme les électeurs auront le choix entre 38 bulletins à placer dans l’urne ce week-end, chacune des listes doit pouvoir être représentée sur ces panneaux. Et 38, c’est un record. "Du jamais vu même", confirme Fabrice Maridet, maire de Saint-Pourçain-sur-Besbre. En 2019, il y en avait 34, ce qui était déjà un record. À partir d’une certaine taille, pas de problème pour les communes : "À Bourbon-l’Archambault, on en avait pile-poil assez, pour trois emplacements". Mais Saint-Pourçain-sur-Besbre n’en avait que 20. La Ville a donc dû engager des frais. "On est allé acheter des plaques de contreplaqué?!" Elle n’est pas la seule dans cette situation.
Les petites communes n’ont en général pas les moyens pour investir dans des panneaux d’affichage électoral, qu’on retrouve à 100 euros l’unité (fourchette basse), sur des sites spécialisés en équipement pour les collectivités.
"On bidouille avec du bois ou du plastique"Un dédommagement pour l’ensemble des frais d’élection est bien prévu dans la loi, mais il est souvent largement insuffisant : 44,73 euros par bureau de vote, plus 0,10 euro par électeur inscrit…
À chaque élection européenne c’est donc la même chose : "On bidouille des panneaux, parfois avec du plastique, parfois avec du bois… À Aurouër, on a dû en bricoler 7 ou 8 cette année", explique Marie Geneix, secrétaire de mairie de Chézy et Aurouër. "On rivalise d’ingéniosité", s’amuse-t-elle. Certains panneaux électoraux sont ainsi d’anciens panneaux de chantier, mis à l’envers, sur lesquels des bandes de scotch ont été placées pour délimiter les espaces.
À Gennetines, la mairie a récupéré des planches de bois d’une association de théâtre, qui n’en avait plus besoin. "Ça tombait bien, elles étaient aux bonnes dimensions, on les a juste peintes en blanc et ajouté des supports pour les fixer au sol", détaille Laurence Rochard, secrétaire générale de mairie de Gennetines.Dans la même commune on n’en est pas à une première, en termes de récup. Les plaques en OSB, achetées pour les élections de 2019, ont resservi pour l’habillage des murs de la salle des archives de la mairie. Quant à Saint-Pourçain-sur-Besbre, la commune prévoit déjà de réutiliser les plaques de contreplaqué, "pour protéger les vitres des bâtiments communaux quand on taille les haies."
Un système D qui n’empêche pas de faire les choses "comme il faut, dans un souci de respect des candidats", assure Fabrice Maridet. D’ailleurs, s’il est possible de bricoler ses panneaux, une réglementation doit être respectée : Par exemple il faut une surface identique pour toutes les listes, où l’on peut coller une petite et une grande affiche. Il faut aussi ne pas prévoir d’emplacements rectos versos.Un encadrement qui conduit à des situations assez insolites, avec le nombre de panneaux à installer.
Comme à Trévol où un immense "mur de panneaux se dresse devant la mairie", explique Yannique Barast, la secrétaire de mairie, qui souligne le temps passé par le personnel technique pour les installer : une journée. À d’autres endroits, ce sont même les élus qui ont dû s’y coller, tant pour la fabrication que l’installation, comme à Chézy, Limoise et Gennetines. Alain Lognon, le maire de Beaulon est quant à lui presque dépité de cette situation. Lui aussi a laissé une belle note au magasin de bricolage, et a été prévenu, comme tout le monde, seulement quelques jours avant, du nombre de panneaux à installer.
"À ce rythme, il y en aura 100 bientôt"Mais ce qui le désespère le plus, c’est ce nombre très élevé de candidats aux européennes : "N’importe qui peut se présenter. À ce rythme, on pourrait en avoir 100 la prochaine fois". Pour lui, il faudrait mettre en place un système de parrainage, comme pour la Présidentielle. Le chiffre, de 38 listes, interpelle aussi Fabrice Maridet : "C’est inquiétant pour l’état de la France, ça montre un certain individualisme. Les projets les plus variés et précis sont représentés, et pourtant pas sûr que les électeurs se déplacent". Pour couronner le tout, les panneaux, bricolés ou non, sont pour la plupart vides dans les petites communes : tous les partis n’ont pas le budget pour les affiches…
Emeric Enaud