Mali : la France annonce une frappe sur des djihadistes, des villageois parlent de victimes civiles
Au lendemain de la mort de deux soldats français, plusieurs personnes ont été tuées dans le centre du Mali ; l'armée française a annoncé ce 5 janvier avoir frappé des dizaines de djihadistes tandis que des villageois et une association locale parlaient de civils atteints par un appareil non-identifié lors d'un mariage.
Les messages ont proliféré sur les réseaux sociaux depuis dimanche 3 janvier sur les événements survenus dans le village de Bounti, dans le centre du Mali, un des principaux foyers de violence de cette région plongée dans la tourmente.
Des villageois interrogés par l'AFP ont évoqué des tirs venus d'un hélicoptère non-identifié selon eux lors d'un mariage, qui auraient fait jusqu'à une vingtaine de morts.
L'état-major français a réfuté ces dires. Une patrouille d'avions de chasse a «neutralisé» des dizaines de djihadistes préalablement repérés après une opération de renseignement de plusieurs jours, a-t-il indiqué à l'AFP. «Les informations relatives à un mariage ne correspondent pas aux observations effectuées», a ajouté l'état-major.
Un flot de spéculations
Le silence observé jusqu'alors par les autorités civiles et militaires maliennes ainsi que les forces armées françaises a laissé le champ depuis le 3 janvier à un flot de spéculations, très difficilement vérifiables dans une zone éloignée dont l'accès est rendu très compliqué par la présence réputée forte des djihadistes.
L'agence Mediastream, spécialisée dans l'analyse de l'actualité au Sahel, évoque ainsi «l'accumulation de témoignages» sur ces morts de civils.
#Mali: Accumulating reports of an airstrike hitting a wedding celebration in the Fulani village of Bounti (Douentza), #Mopti, losses of lives and material damages put forward pic.twitter.com/PYHSCvnQ6A
— MENASTREAM (@MENASTREAM) January 3, 2021
Les opérations offensives aériennes au Mali sont essentiellement le fait de l'armée malienne et de la force française Barkhane. Des villageois joints sur place ont rapporté une frappe d'hélicoptère en plein jour, semant la panique dans une foule assemblée selon eux pour des noces.
Il ne peut y avoir de doutes et d'ambiguïté, il n'y avait pas de mariage
«[Cela] a été le sauve-qui-peut. Je me suis retrouvé en brousse mais j’ai perdu deux frères», a dit Ahmadou Ghana, un témoin du drame, auprès de l'AFP. En tout, 19 personnes ont été tuées et plusieurs autres gravement blessées, a-t-il ajouté. «Nous avons été surpris par l'intensité de la frappe. L'hélicoptère volait très bas, au point qu'on croyait qu'il allait survoler le village», a abondé Mady Dicko, un autre témoin.
Dès le 3 janvier, Tabital Pulakuu, une association pour la promotion de la culture des Peuls, une des ethnies maliennes, a fait état d'une «frappe aérienne (ayant) coûté la vie à une vingtaine de personnes civiles au moins» au cours d'un mariage.
«Il ne peut y avoir de doutes et d'ambiguïté, il n'y avait pas de mariage. C'est une frappe menée après un processus particulièrement formel et multipartite sur un groupe armé terroriste pleinement identifié, après un recoupement d'informations, des attitudes, une posture, sur une zone caractérisée», a certifié à l'AFP une source militaire française proche du dossier.
La région de Mopti, où se trouve Bounti, à quelque 600 kilomètres de la capitale Bamako, est l'un des principaux foyers des violences parties du nord en 2012 et qui se sont propagées depuis 2015 vers le sud du pays, mais aussi au Burkina Faso et au Niger voisins.