Comment des livreurs à domicile de Brive (Corrèze) tentent de s'émanciper de la plateforme Uber
Sur leurs flyers, le logo « Brive 100 % Gaillard » apparaît en gros caractères, comme pour mieux rappeler à leurs clients l’ancrage local de ce collectif de livreurs à domicile. Tous sont d’anciens ou d’actuels d’Uber eats qui ont décidé, de profiter pleinement de leurs statuts d’autoentrepreneurs, en créant un modèle de service à leur image. « Adopte une livraison », le nom de ce collectif, répond au slogan d’« On est mieux servi par nous-mêmes ».
« On a essayé de voir les défauts de la plateforme, pour développer chez nous un système dans lequel se retrouvent les commerçants, les livreurs et les clients », explique Saïd Mouslim, un des livreurs d’Adopte une livraison, qui compte une dizaine d’autoentrepreneurs comme lui.
Une tendance de consommation qui se confirmeDepuis le lancement cette plateforme, en fin d’année 2021, deux mille livraisons ont été enregistrées en l’espace de six mois, avec des hauts et des bas comme lors de la saison estivale. Pas encore assez pour que chacun puisse se verser un salaire. « Il faut que l’on réalise 200 commandes par jour. Durant l’été, nous sommes plutôt entre 7 et 20. Les revenus que l’on touche sont davantage des compléments de salaires pour le moment. Certains ont un métier à côté », explique Kevin Leroux, qui compte bien profiter de cette tendance de consommation qui s’est accentuée depuis le covid. Elle est là, faut-il encore la saisir.Un repas livré chez un client à Brive. Photo Stéphanie Para.
Xavier Lacan, gérant de Fresh and Freeze, rue Majour, la ressent lui aussi. Depuis deux mois, il propose des plats à emporter : salades, poké bowls, plats asiatiques. Pour l’instant, la part de la livraison reste anecdotique au niveau de son chiffre d’affaires, mais le commerçant est optimiste : « Les repas à emporter représentent 10 % de nos ventes, alors que nous n’avons pas communiqué dessus. On sent que ça va croître », explique Xavier Lacan.
Se diversifier sur d’autres servicesLui, a choisi Adopte une livraison pour des raisons économiques et éthiques : « Il y a moins de turnover des livreurs et c’est, au final, moins cher pour le client et pour nous, car il n’y a pas de remise de fin d’année. Mais on sent qu’Uber est contrarié par cette présence à Brive. On est relancé, sans arrêt et ils sont agressifs sur les prix », témoigne-t-il. Prendre sa part du gâteau à côté d’un tel ogre n’est pas encore gagné pour le petit poucet.
« On a gardé les habitudes du confinement » : la livraison à domicile a faim de croissance
Mais les idées fourmillent dans les rangs. Conscients qu’ils ne pourront pas concurrencer le mastodonte sur les grandes chaînes de fast-food, ces livreurs se positionnent sur d’autres types de services. Par exemple : livrer un colis entre un point relais et le domicile du client : « Il suffit que l’expédition soit payée pour qu’on puisse le récupérer et le déposer chez le client », résume Kevin Le roux.
Autre piste envisagée, prendre la casquette de commerçant en plus de celui de livreur. Ainsi, pour enrichir un peu plus l’offre d’Adopte une livraison, un service de livraison d’apéritifs devrait faire son apparition le week-end prochain sur le site. Une façon d’être à la fois au début et la fin de la chaîne.
Pratique. www.adopteunelivraison.com.
Pierre Vignaud