Au collège de Pontgibaud (Puy-de-Dôme), les élèves sont déjà passés en mode « lecture »
![Au collège de Pontgibaud (Puy-de-Dôme), les élèves sont déjà passés en mode « lecture »](http://www.lamontagne.fr/photoSRC/VVZTJ19dUTgIDAVOBQwd/lancement-du-quart-d-heure-lecture-au-college-de-pontgibaud_6324910.jpeg)
La pause lecture d'un quart d'heure s'installe peu à peu dans les établissements scolaires de l'académie de Clermont-Ferrand. Au collège de Pontgibaud, elle a été adoptée en 2018, sous la forme d'une parenthèse hebdomadaire dans l'emploi du temps.
Le jeudi, après la récréation de l’après-midi, à 14 h 45, le collège Anna-Garcin-Mayade se fige dans le silence. Dans les salles de cours, comme dans les bureaux, chacun se retire dans sa bulle et se plonge dans un livre tiré du sac. Pendant quinze minutes, on n’entend plus que le souffle des pages qui se tournent.
Le collège de Pontgibaud n’a pas attendu l’impulsion académique, donnée la veille des vacances d’automne, pour installer la pause lecture dans les emplois du temps. Depuis 2018, les élèves et les adultes ont pris l’habitude de cette parenthèse hebdomadaire, que tous les établissements, écoles collèges et lycées, sont invités à partager à partir de cette semaine.À Pontgibaud, l’initiative de la direction et de l’équipe pédagogique est venue après un double constat : « Les élèves ne lisent pas assez chez eux et ils ne lisent jamais une consigne correctement », relève le principal, Pascal Tamin. Pour leur donner le goût de la lecture, le collège a introduit dans son organisation cette respiration d’un quart d’heure, calée au début d’un cours.
« Les élèves peuvent apporter ou emprunter au CDI le livre de leur choix », précise Mathilde Rochon, professeur documentaliste. Des romans, des BD, des mangas, des documentaires… Mais pas de manuel scolaire, « car ce n’est pas un temps de révision ». Ni de magazine, qu'ils pourraient se contenter de feuilleter.
Si elle cible bien « le plaisir et la liberté de la lecture », comme l’a souhaité le recteur de l’académie de Clermont-Ferrand, Karim Benmiloud, la pause lecture n’est ici qu’une action pédagogique parmi d’autres, imaginées pour favoriser l’enseignement du français.
« La lecture, l’écriture et la compréhension sont au cœur de notre démarche »,
En 6e, un cours d'étymologie...Dès la 6e, les élèves suivent un cours consacré à l’étymologie, obligatoire et inscrit dans l'emploi du temps. « C'est une forme de préparation au latin, explique Nicolas Debas », professeur de français, latin et grec, qui explore les réseaux lexicaux correspondant aux disciplines enseignées par ses collègues. « C'est concret. Ça aide les élèves à donner du sens à l’apprentissage des mots et à l'orthographe. Ils peuvent comprendre les familles de mots, leur construction et les lettres qu'on n'entend pas. »
... Et la fluence de lectureEn 6e toujours, la documentaliste travaille la fluence avec les élèves ayant besoin d’améliorer leur vitesse de lecture. Ceux qui n'ont pas atteint les 120 mots en une minute au test des évaluations nationales, en début d'année scolaire.
« La lecture fluide à voix haute, c’est un facteur prédictif de la réussite scolaire. Plus un élève met du temps à décoder un mot, plus il en perd dans la compréhension d’une consigne ou d’un texte. »
En dix séances d'une heure, sur les créneaux de permanence, ces élèves travaillent la rapidité et la compréhension de texte, en s'exerçant sur tous les types de support, des textes de SVT comme le premier tome de Harry Potter. Une cinquantaine de collégiens sont impliqués cette année, soit quasiment la moitié des effectifs de 6e.
En 4e, la lecture à voix hauteEn 4e, les volontaires pratiquent la lecture à voix haute. Une expérience lancée par Anne Gilbert, professeur de français, en 2021.
« Quand on a entre 25 et 30 élèves, c'est difficile de faire travailler la lecture à voix haute. L'an dernier, j'ai pu avoir toutes les classes de 4e en demi-groupe. C'était intéressant. Les élèves de 4e ne voyaient dans la lecture à voix haute que l'aspect technique. Ils ont découvert qu'on pouvait faire passer un message et surtout une émotion. »Cette année, la pratique n'a pas pu être inscrite dans les emplois du temps. Elle est proposée sous la forme d'un atelier facultatif, « qui n'a pas eu autant de succès qu'escompté », regrette l'enseignante.
Seules trois élèves se confrontent à l'exercice, destiné à leur donner « plus de confiance dans une prise de parole en public ».
En 3e, l'éloquenceAu programme de tous les élèves de 3e, une heure par semaine, le cours d'éloquence les prépare aux exigences de l'oralité du lycée.Le génocide arménien en 1915-1916, expliqué par Léane en 120 secondes
Plusieurs types d'exercices leur sont proposés : la présentation d'une notion de cours en 120 secondes, la confrontation d'arguments dans des « battles », le speed booking ou encore le procès de Créon, dans le prolongement de la lecture d'Antigone, qui font intervenir un magistrat et des comédiens professionnels.
« Au-delà des réticences à prendre la parole devant la classe, beaucoup d'élèves qui ont des difficultés à l'écrit se sentent valorisés par ce genre de séance à l'oral, constate Céline Chareyre, professeur de français. L'objectif principal est de leur permettre de pouvoir s'exprimer correctement et de gagner un peu plus en confiance. On le voit à l'oral du brevet, nos élèves sont plus à l'aise. »
Tout le monde lit. Imaginée pour donner l'envie de lire, l’opération concerne tous les élèves, les enseignants et les personnels des écoles élémentaires, des collèges et des lycées de l’académie de Clermont-Ferrand. Elle n’est pas obligatoire. L’équipe pédagogique choisit le rythme (tous les jours, une fois par semaine…) et l’horaire de ce quart d’heure lecture. Une seule règle : avec un livre librement choisi, « les élèves et les enseignants profitent ensemble du silence et du temps qui s’arrête pour lire », résume le recteur Karim Benmiloud.
Isabelle Vachias