Crédits immobiliers : « 35 ans avec une bonne épargne, ça passe. À plus de 45 ans, ça commence à être compliqué »
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Les crédits à 1 %, « c’est fini » et les profils d’emprunteurs éligibles se sont brutalement restreints. L'âge, qui détermine le coût de l'assurance, devient déterminant. Selon le courtier meilleurtaux.com., le marché n’est pas pour autant en passe de s’effondrer. Analyse.
Le taux moyen des emprunts va continuer à grimper : « On sera à 3 % sur vingt ans au premier semestre 2023 », prédit Maël Bernier, porte-parole du courtier meilleurtaux.com.En octobre, hors assurance, les banques prêtent en moyenne aux acheteurs de biens immobiliers à 2,30 % (pour 200.000 euros sur 20 ans). Ce qui ne fait que fermer la divine parenthèse de taux historiquement bas (1 % en 2021). Ils reviennent à leur niveau de 2014-2015.
Au début de l’année 2022, le marché de l’immobilier bénéficiait encore de l’inertie de l’euphorie de 2021, mais la hausse des taux a provoqué une « bascule » en mars. La demande n’a pas ramolli mais les banques ferment le robinet du crédit. « On est dans le dur, estime Maël Bernier, et on y sera au cours du premier semestre 2023. On a six mois compliqués, et ça redémarrera en juin, sous réserve que l’inflation se calme ».
Fini les reventes de « confort »Pour 2023, meilleurtaux.com pronostique « une baisse des transactions mais pas un effondrement des prix. Il n’y aura pas d’arrivée massive de biens sur le marché ». En 2023, pas de forte baisse des prix attendue car l’offre devrait se contracter en étant alimentée par les transactions « contraintes », c’est-à-dire les divorces, les successions. PHOTO FLORIAN SALESSE -
« Beaucoup de Français de 40-45 ans ont acheté leur résidence principale dans la période 2019-2021, où on a atteint plus d’un million de transactions par an. Ils sont titulaires de prêts à 1 %. Ils n’ont aucun intérêt à revendre et à se rendetter à des taux plus forts. Ils vont rester au chaud », analyse Maël Bernier.Sans ces reventes de « confort » (pour acheter plus grand ou un bout de jardin), l’offre devrait se contracter en étant alimentée par les transactions « contraintes », c’est-à-dire les divorces, les successions.
Pas de baisse des prix significative en vueLes acheteurs qui diffèrent leur investissement en misant sur une baisse des prix ne feraient donc pas forcément un bon calcul. « Il y aura tout au plus quelques réajustements de prix à la marge sur Paris ou Bordeaux ».Pourtant, une baisse sensible des prix serait un facteur déterminant pour dégripper les dossiers de prêt.
En 2022, ce ne sont pas seulement les « petites lignes » en bas du contrat qui sont peu lisibles, ce sont les critères d’octroi de prêt eux-mêmes : « On a des couples CSP +, avec une très belle épargne, mais qui ont plus de 45 ans et dont le projet est bloqué », signale Maël Bernier.
L’âge des emprunteurs détermine le coût de l’assurance, et c’est ce qui peut faire cogner les dossiers sur le plafond du taux d’usure, qui fixe un endettement maximum des ménages (35 %). Dans les faits : « 35 ans avec une bonne épargne, ça passe. À plus de 45 ans, ça commence à être compliqué ».Le taux d’usure a été relevé le 1er octobre. « Cela contribuera au bon fonctionnement du crédit immobilier en France : sa croissance de 6,4 % est plus forte que la moyenne européenne, ses coûts sont plus bas, et 97 % des crédits immobiliers sont à taux fixe ce qui protège les emprunts existants des effets de la remontée des taux », se félicite de son côté la Banque de France dans un communiqué.
Reste que pour les « primo-accédants », la marche de l’accession à la propriété est de plus en plus haute.
100 euros de plus par mois à rembourserAujourd’hui, 58 % des dossiers répondent au critère des 35 % d’endettement contre 69 % il y a un an. Pour un prêt moyen sur vingt ans, les ménages doivent être en capacité de rembourser 100 euros de plus par mois (1.040 euros hors assurance contre 920 euros en 2021).
Le courtier prend pour exemple un ménage avec 4.000 euros de revenus : « Avec un taux à 2,3 % contre 1,1 % en 2021, sa capacité d’emprunt sur vingt ans a été ramenée de 285.000 euros à 255.000 euros. Pour maintenir le même montant d’emprunt, il faudrait qu’il rembourse 1.563 euros par mois. 39 % de ses revenus, ça ne passe plus ».
Les possibilités de résiliation et de renégociation de l’assurance de prêt ont été élargies par la Loi Lemoine mais ces dispositions, qui permettent de faire baisser les traites de manière substantielle, profitent aux emprunteurs déjà engagés. n
Julien Rapegno