Des « îlots d'avenir » pour sauver les forêts dans le Sud Allier
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Les projections des scientifiques sont stupéfiantes. D'ici cinquante ans, nos paysages auront déjà changé de physionomie. Face au réchauffement climatique, la forêt va devoir s'adapter. Mais les forestiers pensent que sa capacité de régénération naturelle est trop lente face à la rapidité du phénomène. Préserver ce qui peut l'être, accompagner, anticiper : en créant des « îlots d’avenir », l’ONF (Office national des Forêts) déterminera les espèces qui peuvent mieux résister demain au réchauffement climatique. Exemple d'une expérimentation sur la commune de Monestier.
« Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’ici dans le Sud Allier, dans cinquante ans, on aura sans doute un climat proche du climat méditerranéen. » Les forestiers ont une capacité de synthèse qui replante le cours de l’histoire et la marche du monde au pied d’un arbre de forêt domaniale, au cœur du territoire quotidien. 2080, pour le commun des mortels, ça paraît lointain, mais pas pour Cyril Métier, responsable ONF pour le Sud Allier. « On sait que certaines espèces vont s’adapter, mais nous devons préparer les forêts au climat futur. Un arbre planté aujourd’hui sera présent au même endroit dans 50, 100, 200 ans. C’est l’enjeu des îlots d’avenir. » Cyril Metier Responsable ONF du Sud-Allier, Monestier, le 01/02/2023, photo Francois Xavier Gutton
Un laboratoire à ciel ouvert, pour donner des clés d’avenir aux forestiers du futur.
Dans le sud Allier40.000 plants pour renforcer l’avenir de parcelles « dégradées », tester des essences plus méditerranéennes, expérimenter. Les forêts. Les forêts domaniales concernées dans le sud Allier : forêt domaniale de Monestier, la Vacheresse (Voussac), forêt des Colettes, domaine Abbaye Saint-Gilbert.Avec Cyril Metier dans la Forêt de Monestier, photo Francois Xavier Gutton
Protéger et replanter des variétés de chênes plus adaptésUne botte de plants en attente de replantation. Monestier, le 01/02/2023, photo Francois Xavier GuttonSur deux parcelles (2 x 2,5 hectares, soit 5 hectares) en lisière d’autoroute, sur la forêt domaniale de Monestier, Cyril Métier est à l’œuvre. Il s’agit de replanter 2 x 3.000 plants (ou tiges) de chênes. Ces parcelles ont été au préalable nettoyées d’essences fragilisées, en majorité du pin douglas. Les bois et souches sont laissés sur place afin d’enrichir naturellement le sol en humus. Les chênes traditionnels du Bourbonnais, chênes pédonculés, se trouvant en souffrance, l’ONF teste ici deux espèces : chêne sessile de Cascogne (du sud-ouest) et chêne pubescent.
Les bottes de plants, par jauge de cent, sont délestées de leurs godets. Chaque tige est replantée (pour chaque plant, 1 m² de terre décompactée, sur une profondeur de 50 cm). Chaque gland présente un système racinaire robuste (le chevelu), qui fait la force du chêne. Pour l’heure ces plants quiont deux ans, restent fragiles : « Nous devons les protéger jusqu’à ce qu’ils atteignent 1,20 m (dans 5 ans). » Chaque tige est entourée de 2 piquets en bambou, couverte d’un filet susceptible de protéger la plante de la voracité des chevreuils. Ces jeunes chênes de Gascogne ont deux ans environ, avec un "chevelu" racinaire bien développé. photo Francois Xavier Gutton
Les essences testées en Allier49 hectares d’îlots sur 27.000 hectares en Allier gérés par l’ONF : 19.000 plants de cèdre de l’atlas (15 hectares) 16.000 plants de chêne pubescent (12 hectares) 9.000 plants de chêne vert (7 hectares) 7.000 chênes sessiles de Gasgogne, (5 hectares) 6.000 plants de séquoia vert (4,5 hectares) 4.600 plants de chêne-liège, (3 hectares) 3.000 robiniers, faux acacia, (2,5 hectares).
photo Francois Xavier GuttonL’ONF sous-traite dans la région avec une entreprise de sylviculture privée. Ces entreprises se font rares. Il y a des problèmes de main-d’œuvre : un travail de tâcheron, dur en forêt, surtout l’hiver. Dans le contexte national (lire par ailleurs) la déclinaison de cette expérimentation inaugure un changement des forêts considéré comme inexorable par les forestiers : « On a souvent du mal à communiquer sur cet aspect : les gens ne comprennent pas qu’on abatte des arbres pour replanter d’autres espèces. » Dans le Sud Allier, le programme, en cours, représentera, à terme, 40.000 plants sur 30 hectares tout au long de l’hiver 2023. photo Francois Xavier GuttonPlantations de jeunes plants d arbres . L'Office National des Forets ( ONF ) travaille soit à l'interne soit avec des entreprises sous-traitantes spécialisées en sylviculture. photo Francois Xavier Gutton
Des chercheurs en amont de la replantationLe RMT AFORCE (Réseau mixte technologique Aforce) est un réseau « multipartenarial » de recherche, en partie financé par le ministère de l’Agriculture. Pour les forestiers, « les îlots d’avenir sont les héritiers des arboretums créés au XIXe siècle lorsque la France se préparait à de grandes campagnes de reboisement ». Les essences sont sélectionnées pour leur capacité à résister à la sécheresse, aux bioagresseurs (insectes, champignons) et pour la qualité de leur bois.
Plantations de jeunes plants d arbres, en collaboration avec une . photo Francois Xavier Guttonphoto Francois Xavier Gutton