Le Bourbonnais d'adoption Marc Batard repart à l'Everest pour finaliser la nouvelle voie
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L'ascension de l’Everest est parfois meurtrière. Pour réduire les risques, l’alpiniste bourbonnais Marc Batard repart en expédition, le 15 avril, afin d’achever l’équipement d’une nouvelle voie jugée plus sécurisante.
Le 18 avril 2014, il y a presque dix ans, la chute d’un sérac, énorme morceau d’un glacier suspendu sur l’épaule ouest de l’Everest, cause la mort de seize sherpas. C’est la journée la plus meurtrière de l’histoire du plus haut sommet du monde.
Les alpinistes avaient emprunté la voie classique népalaise qui passe par la très redoutée Ice Fall. En un siècle, la cascade de glaces a fait quarante-trois morts. Certains diront que ce sont les risques du métier. Pas Marc Batard qui a fait de la sécurité son cheval de bataille. "En avril 2023, trois sherpas ont perdu la vie sous plusieurs mètres de glace. Il faut que ça s’arrête."
En novembre 2021, au détour d’un survol en hélicoptère, l’alpiniste installé à La Celle, dans l’Allier, a trouvé une nouvelle voie qui permet d’éviter l’Ice Fall. Elle part du village de Gorak Shep (5.164 m), nouveau camp de base proposé, et rejoint le pic Sundare (5.880 m) qui porte le nom d’un sherpa décédé en montagne.
Quatre murs raidesDu haut du pic, un rappel de vingt-cinq mètres permet de rejoindre une arête neigeuse jusque vers 6.300 m. De là, une descente de 300 mètres permet de prendre pied dans la combe ouest et de rejoindre ainsi l’itinéraire classique.
Si les expéditions ne passent pas par là, c’est parce que les quatre "murs raides" - ils font entre vingt et quarante mètres de haut - ne sont tout simplement pas équipés.
C’est la mission que s’est fixée Marc Batard qui, à l’automne 2023, a sécurisé une quarantaine de mètres avec son équipe. Le 15 avril, accompagné de sa fille Cathy, qui a grimpé 6.000 mètres à l’âge de… 9 ans, et de Gérard Ménard, guide de haute montagne, il repart à Katmandou pour finaliser la voie. Il sera rejoint sur place par une équipe très expérimentée (lire ci-dessous).
"Cela devrait nous prendre un mois", pronostique le "sprinter de l’Everest" qui espère obtenir le soutien du gouvernement népalais.
Le premier ministre doit me recevoir. J’attends de lui un soutien logistique et moral. Mon message sera très clair. Si vous ne nous aidez pas et qu’il y a d’autres morts, vous en porterez la responsabilité.
Grâce à ses sponsors, Marc Batard a pu dégager un budget de 80.000 € : "20.000 à 25.000 € en plus, cela ne serait pas de trop", lance l’alpiniste à l’attention des autorités népalaises. "Cela nous permettrait de recruter plusieurs Népalais comme porteurs."
Le travail proprement dit devrait commencer à la fin avril. Trois équipes de trois personnes seront chargées d’équiper les quatre murs qui se trouvent entre le camp de base et le camp intermédiaire situé à 5.550 mètres d’altitude. Cela représente une distance d’environ 400 mètres.
Les quatre murs devraient être équipés de barreaux métalliques type via ferrata afin d’en faciliter le franchissement. Entre les différents obstacles, il est prévu d’installer "une main courante", à savoir une corde, sur la totalité de l’arrête qui fait environ deux kilomètres.
"Avec mon équipe (Kevin Reignier et Cathy Batard, NDLR.), je me trouverais un peu plus haut, confie Marc Batard. On va faire la jonction entre le pic Sundare et la partie neigeuse et glacée jusqu’à 6.300 mètres. On va installer des cordes qui seront renouvelées chaque année. Puis, on descendra sur trois cents mètres en prenant le raccourci."
L'Everest embouteilléMarc Batard le clame haut et fort. Il faut que ce nouveau tracé "devienne dans les années à venir la nouvelle voie pour accéder à l’Everest en toute sécurité". À ceux qui commencent à dire que cela va encore amener davantage de monde sur l’Everest déjà surembouteillé, Marc Batard répond.
"Tout cela est de la responsabilité du gouvernement népalais qui, à mon goût, délivre trop de permis sous la pression des agences qui veulent faire du business." Une plaque d’un mètre de large et de cinquante centimètres de haut sera installée à l’entrée de la voie. Elle portera le nom "Sundare Sherpa/Marc Batard route". Un message sera écrit en anglais à l’attention des alpinistes.
Traduit en français, il donne ceci : "Vous empruntez cet itinéraire à vos risques et périls". Parce qu’il n’est pas sûr ? "Non, répond Marc Batard. C’est pour se protéger car un accident peut toujours arriver. Et les Américains sont très procéduriers".
L'expédition. Les membres de cette expédition sont les suivants : Marc Batard, Pasang Sherpa (treize fois l’Everest), Gérard Ménard (guide en haute montagne et moniteur de ski), Loïc Sirvent (cordiste professionnel), Nathalie Lupo (passionnée de montagne, ingénieur), Cathy Batard, Noël Rosato (triathlète, passionnée de montagne, ingénieur), Frédéric Veny (triathlète, passionné de montagne, ingénieur), Kevin Reigner (grimpeur de haut niveau), Antoine Erout (passionné de montagne, ingénieur), Sylvain Morvant-Brenu (architecte), Jamayan Morvant-Brenu (16 ans, le plus jeune de l’équipe).
En 2025. La "Sundare Sherpa/Marc Batard route" devrait être empruntée pour la première fois au printemps 2025 par un équipage qui sera presque exclusivement féminin. Marc Batard conduire le groupe qui devrait faire l’ascension du Nupse par cette voie avant d’enchaîner avec la jonction de l’Everest.
Fabrice Redon