La lutte contre la désertification médicale
«Lutter contre la désertification médicale, pour nous, c’est crucial », a lancé la maire, Pascale Lescurat, à la grosse soixantaine de participants à la réunion consacrée à ce sujet. Et elle a tout de suite donné la parole à Richard Bidaud, pharmacien à Domérat, qui s’est déclaré « catastrophé de savoir que des patients souvent âgés et souffrant de pathologies diverses sont privés de médecin ».
Témoignages« Dans ma pharmacie, il y a une cabine de téléconsultation, mais en raison des contraintes, elle est assez peu utilisée, a-t-il précisé. De toute façon, pour un arrêt de travail excédant trois jours, le patient doit être vu physiquement par un médecin. Ceci dit, toute solution est bonne à prendre, même si elle est provisoire. »
Parmi les questions ou remarques des participants, Isabelle Lafaye a évoqué son cas familial. « Ma maman n’a plus de médecin, on m’a demandé d’écrire à la Sécurité sociale, celle-ci m’a fourni une liste de médecins que j’ai appelés, sans succès, on m’a même parfois refusée en raison de ses lourdes pathologies. Heureusement, elle a un bon pharmacien ! ».
Dans le même registre, il a été demandé à Stéphanie Ferreira d’écrire au médiateur de la CPAM, ce qu’elle a fait, sans réponse à ce jour. Une employée de l’hôpital a mis met en évidence le niveau d’exigence très élevé de certains médecins pour être recrutés : villa, travail pour le conjoint, places en crèche, présence d’écoles…
Pierre-Louis Damaison, lui-même médecin depuis de nombreuses années, a martelé « que c’est dur à dire, mais on est un peu comme des joueurs de football, c’est le principe de l’offre et de la demande. Il faut dix ans pour faire un médecin et à la faculté, on n’encourage pas les étudiants à devenir généralistes. Ceux qui persistent ne veulent faire que de la médecine, ils préféreraient être salariés pour n’avoir pas à s’occuper du recrutement ou du remplacement éventuel de la secrétaire ».
Cheval de batailleC’est aussi le cheval de bataille de Bruno Rojouan, sénateur (LR) de l’Allier, vice-président d’un groupe de travail sur la désertification médicale au sein de son groupe parlementaire. « Je veux clairement mettre fin à la liberté totale d’installation des médecins. Il faudrait, poursuit-il, arriver à ce que l’on n’accepte plus d’installations de médecins supplémentaires dans les territoires suffisamment dotés. »
Et de poursuivre : « Je suis pour le principe d’une arrivée pour un départ, pas plus, pas moins. Les syndicats de médecins et les ordres de médecins se rendent bien compte que ces situations de déserts médicaux ne sont plus acceptables. En 2021, six millions de Français étaient sans médecin traitants et depuis trois ans, la situation s’est encore dégradée. »
« Le médecin d’avant, c’est terminé. Pour bien faire, il faudrait deux ou trois médecins pour en remplacer un seul », a enchaîné Pascale Lescurat. Avant d’évoquer des propositions du Sénat, comme l’élargissement des compétences jusque-là dévolues aux seuls médecins, à certains professionnels de santé.
Comme, par exemple, donner la possibilité aux pharmaciens de délivrer sans ordonnance certains médicaments et de renouveler trois fois une ordonnance expirée. La possibilité aussi de renouveler ses lunettes avec la même ordonnance (sous condition). Ce qui lui a semblé être « des avancées intéressantes ».
Projet d’installation« Au niveau de la mairie, nous avons un projet d’installation de médecins étrangers, via un cabinet de recrutement, a-t-elle poursuivi. Nous avons eu un premier contact pour l’installation d’un centre de santé “médecins solidaires”, l’achat d’un cabinet médical, déjà existant, est prévu pour faciliter l’installation d’un professionnel de santé. »
Mais comme a rétorqué Joël Lefebvre, « à quoi bon, si on n’a pas de médecins à y installer ? Je crois savoir qu’à Désertines, ce sont des médecins qui s’y sont d’abord intéressés et c’est la municipalité qui a relayé le projet pour leur créer les bonnes conditions de leur exercice ».
Pascale Lescurat a clos cette réunion où les interventions ont été très riches en rappelant « que la lutte contre les déserts médicaux est une préoccupation de tous les instants de la municipalité ».