Appel d'Eric Ciotti : que prévoient de faire les deux députés LR de la Corrèze ?
Face à "la nécessité de servir le pays qui est en danger", "nous avons besoin d'une alliance - en restant nous mêmes - avec le Rassemblement national". Eric Ciotti, président du parti les Républicains (LR), a annoncé, ce mardi 11 juin 2024, au journal télévisé de 13 Heures de TF1, sa volonté de faire alliance avec le RN à l'occasion des élections législatives anticipées (premier tour, le 30 juin ; second tour, le 7 juillet). Des élections organisées à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron, en réaction au raz de marée de l'extrême droite lors des européennes de dimanche.
La droite républicaine, en Corrèze, est-elle prête à se rallier au RN ? "Jamais, je ne franchirai la ligne rouge, écrit Frédérique Meunier, députée sortante (LR) de la circonscription de Brive, dans un communiqué publié sur ses réseaux sociaux, à 13 h 51. Je n'accepterai jamais aucune compromission avec les extrêmes, car ils amèneront la France à la faillite et au chaos."
"N’oublions pas les mots de Jacques Chirac"Photo Stéphanie Para L'élue, qui a fait savoir qu'elle serait candidate à sa réélection dès l'annonce surprise de la dissolution, dimanche, cite Jacques Chirac, "socle des valeurs de notre famille politique corrézienne", pour justifier sa position : "Dans notre histoire, l’extrémisme a déjà failli nous conduire à l’abîme. C’est un poison. Il divise. Il pervertit. Il détruit." Elle ajoute : "N’oublions pas les mots de Jacques Chirac."
Jointe par La Montagne, Frédérique Meunier rappelle les fondamentaux : "Je suis de droite, je suis toujours dans la même lignée, je n'ai pas changé. Je serai la candidate de la droite et du centre. Je dénonce les propos, qui d'ailleurs n'engagent que lui, de M. Ciotti. Ses paroles n'engagent que lui." La députée sortante n'est pas tendre avec celui qui est toujours, à cette heure, le président des LR. "Je le connais depuis sept ans, il a toujours eu un discours contre les extrêmes, que ce soit de gauche ou de droite. J'ai appris par les médias sa position, je suis très surprise. On a eu une visio, lundi, avec notre groupe, il n'en a jamais été question. Le vent a fait tourner la girouette, on dit ça chez moi..."
"Si Eric Ciotti ne démissionne pas de notre parti, c'est vrai que cela devient compliqué. Mais pour l'instant, je n'en suis absolument pas là. Je ne cautionne pas. Je suis une candidate de la droite et du centre, comme en 2022."
Francis Dubois appelle à la démission d'Eric CiottiFrancis Dubois, député de la première circonscription du département (Tulle-Ussel), a lui-aussi refusé cette alliance en diffusant le message suivant, sur X (ex-Twitter) à 14 h 12 : "Viscéralement attaché à mes valeurs chiraquiennes et à une droite humaniste et sociale, je ne me laisserai jamais aller à aucune combine politicienne. Il nous incombe de construire une alternative fédératrice et faire de nouveau Nation au sein d'une démocratie apaisée. Vous pouvez compter sur moi, je ne lâcherai rien !" Lui aussi avait déclaré dès dimanche soir être prêt à repartir en campagne.
Je ne serai pas le candidat d'un parti présidé par Eric Ciotti
Francis Dubois attend que ça se décante au niveau national et appelle à la démission du président de son parti. "Il faut se reconstruire avec un parti qui parle de pouvoir d'achat, des énergies, de l'alimentation, des déserts médicaux, des écoles... Eric Ciotti ne parle que de sécurité et d'immigration. Ce sont des sujets mais il y en a d'autres", estime le député sortant.
Le Corrézien, les valeurs chiraquiennes chevillées au corps, est à la tâche avec ses équipes. Il rédige sa lettre de candidat pour l'instant sans étiquette. Déjà, il a été approché par le groupe Liot. Une chose est sûre, il ne fera pas partie du groupe des sortants appelés à s'allier au RN. Francis Dubois, qui aura comme en 2022, pour suppléant Pascal Coste, en appelle à une alternative et plaide pour une force basée sur la proposition "d'une société apaisée".
Pour Pascal Coste : "On est dans le cyclone"Ce ralliement avec le RN, Pascal Coste, président (LR) du conseil départemental de la Corrèze, n'en veut pas non plus. "Il faut que LR clarifie la position du parti. Mais le jour où le parti accepte une alliance avec le Rassemblement national, à la minute qui suit, je ne serai plus chez Les Républicains, tranche-t-il clairement. On ne se renie pas comme ça. Je suis déjà en marge... "
Ce proche de Xavier Bertrand, président de la Région Hauts-de-France, estime qu'"il y a de la place pour des forces républicaines dans [notre] pays. Il faut qu'en Corrèze, on puisse avoir des parlementaires qui ne suivent pas aveuglément Monsieur Macron ou les extrêmes."
"Quand on faisait la campagne avec Francis Dubois, en 2022, on disait "il va falloir des barreurs par gros temps". Là, on est dans le cyclone et chacun y va de son sur-accident ! ", confie le président du Département.
Interrogations et suspense au RNLa position des sortants LR intéressait beaucoup le représentant du Rassemblement national en Corrèze, juste après la déclaration d'Eric Ciotti, ce midi. Valery Elophe, qui avait déjà porté les couleurs du RN lors des élections législatives de 2022 (il ne s'était pas qualifié pour le second tour) et qui doit présenter ce mardi soir les candidats de son parti pour la circonscription de Brive, envoyait à 13h55 un SMS à une journaliste de La Montagne, pour s'enquérir de la position des deux sortants...
Joint par téléphone une heure plus tard, il confirme que le Rassemblement national présentera un candidat (lui très probablement, même s'il ne confirme pas) dans la circonscription de Brive. "Ils refusent l'alliance, ils ont fait le choix de ne pas rejoindre l'unité nationale", souligne-t-il à propos des deux députés LR de la Corrèze.
Guillaume Blanc, Pomme Labrousse et Laetitia Soulier