On a passé une journée avec Stéphane Canarias, le directeur de Brive Festival : embarquez dans les coulisses
Le rendez-vous avait été fixé à 10 heures vendredi, au bureau de production de l’équipe installé en backstage. « On va commencer par un café, hein », pose d’emblée le directeur du festival arrivé sur le site à 9 heures après une courte nuit de cinq heures.
Une douce nuit après un moment mythique vécu avec Sting?? Évidemment, même si Stéphane Canarias n’a pu se poser que le temps d’un morceau, Roxane, le dernier de la légende britannique sur scène.
À 10 heures pétantes, « c’est exceptionnel, je propose qu’on s’applaudisse tous d’être pile à l’heure », place donc à la réunion débriefing de la veille et aux projections de la soirée du vendredi. « Avant de débuter, on raconte toujours une blague. Qui veut se lancer?? » Faute de volontaire, c’est Stéphane Canarias dans son style disons… inimitable qui y va.
Pôle par pôle, l’équipe du Brive Festival déroule ses problématiques. Sans atermoiement. On évoque ici un souci de Wifi sur différents endroits du site, une organisation à mieux caler sur certains postes pour gagner en efficacité, des problèmes pour réchauffer la nourriture des saisonniers ou bien encore des…
« Attendez, coupe rapidement le directeur du festival. Pour les repas, avant de trouver un autre système pour l’année prochaine, on va aller acheter trois micro-ondes ce matin. On va gagner du temps », poursuit-il en tendant alors sa carte bleue à un membre de son équipe, tout en notant sur son ordinateur les remarques des différents référents des pôles.
973 messages non lus en trois joursLes discussions sont soudainement interrompues pour saluer un invité un peu spécial. Un certain Tahar Rahim, proche de Grand Corps Malade qui coproduit un biopic sur Charles Aznavour incarné par l’acteur. Retour aux affaires courantes avec un message reçu par Stéphane Canarias de la préfecture pour organiser une réunion sécurité dans l’après-midi. L’un des rares sms consultés par le directeur du festival dont le téléphone affiche… 973 messages non lus en trois jours.
10?h?42. La réunion avec l’équipe de Festival Production est terminée. Le directeur en profite pour dévoiler un précieux cadeau offert la veille par un pote luthier de Limoges. Une guitare faite sur-mesure aux couleurs de Brive Festival signée de la main de Sting. Classe. Très classe.
Il est 11 heures, les équipes s’affairent. Les claviers tapent en même temps que le batteur de Grand Corps Malade sur sa machine, en pleine répétition. Les téléphones sonnent. Celui de Stéphane Canarias évidemment. Un nouveau problème à régler.
« Allo, oui tata […] Bon, là, c’était ma tante. Elle gère des peintres qui doivent passer à la maison. Il faut arriver à tout concilier », sourit le Briviste qui profite d’un petit moment de répit, entre deux stories Instagram, « c’est important dans notre milieu », pour aller faire un check à son fils Noah du côté des loges artistes. Avant d’aller justement accueillir l’équipe du chanteur Soolking.
« Vous êtes en forme les gars?? » « Mieux qu’à Montauban. Tu te rappelles, on avait tous été un peu malade. D’ailleurs, notre DJ n’a pas trop la pêche, là », pose le manager de l’artiste. « On peut avoir un docteur dans le quart d’heure. Si tu as besoin, tu me dis », pose du tac au tac Stéphane Canarias, toujours aux petits soins pour accueillir ses artistes avec qui il a, parfois, des relations plus personnelles.
« Avec Fabien (Grand Corps Malade), on est au-delà d’une relation de boulot. On peut se poser pendant une heure et discuter de nos vies. Simplement », confie le directeur du festival tout en montant sur la scène pour aller saluer l’ensemble des techniciens.
À 11?h?50, Grand Corps Malade sort de son tourbus. Les deux hommes se tombent dans les bras, l’illustration d’une sincère complicité. La même scène se produit quelques minutes plus tard avec le DJ et producteur Mosimann. L’expérience, la simplicité et l’humilité du directeur du festival participent au rayonnement du Lovely.
Il est midi. C’est l’heure d’un des rendez-vous incontournables de chaque mi-journée. Un passage dans l’Algeco des responsables techniques pour faire un point avec le directeur, José Moraté, sur le festival depuis 2016. Un point sur l’organisation générale du site toujours conclu par un apéritif jaune qui fait chanter les cigales. C’est la tradition. Et pas question d’y couper.
Avant de poursuivre son tour, Stéphane Canarias jette un œil sur les six… applications météo de son téléphone. Les cigales ne chanteront peut-être pas ce vendredi mais elles ne seront pas non plus noyées sous la pluie.
« La soirée de jeudi a été très animée en coulisses, avec les différents bulletins météo à gérer. On a organisé plusieurs points avec la sous-préfecture et la sécurité pour anticiper tout problème, mais tout s’est finalement bien passé », détaille Stéphane Canarias en finissant d’avaler son déjeuner avec son fils et sa compagne.
Entre deux bouchées, l’organisateur échange un mot avec un technicien, un souvenir avec un danseur. Certains se rappellent aussi de Noah gamin, au début du festival. « On est en famille, ici », aime à répéter son père, interrompu en pleine histoire d’aventures vécues au Maroc par un sms un peu particulier. Celui d’Imany, passée la veille sur la scène.
Un long et touchant message de remerciement qui donnera un coup de boost, s’il le fallait encore, au directeur du festival qui termine d’avaler son café avant d’enchaîner un moment sans doute moins fun mais essentiel : la réunion quotidienne avec le sous-préfet et tous les représentants des instances de sécurité.
Une réunion quotidienne avec le sous-préfetIci, le ton est plus ferme. Direct. Un problème est posé sur la table, il faut une réponse immédiate. L’organisation de la longue file d’attente de jeudi soir, avec une jauge à 15.000 personnes, devra être revue pour dimanche, pour des raisons de sécurité. Des issues de secours ont été bouchées par des voitures. Stéphane Canarias demande à un membre de son équipe de récupérer des panneaux interdit de stationner.
Trois heures plus tard, après quelques coups de fil et des moments plus calmes, les festivaliers entrent dans l’arène. Le directeur est, lui, posté à proximité, après avoir assisté à des balances sur la scène.
« J’aime bien ce moment. C’est toujours spécial de voir l’attente des spectateurs et leur enthousiasme », glisse le principal intéressé qui est attendu devant la loge de Grand Corps Malade. Entre deux rendez-vous médias, l’artiste et Stéphane Canarias se sont calés quelques minutes. Ce dernier en profite pour offrir un bombers aux couleurs du Lovely.
« Tu peux être sûr que je le porterai même quand je ne serai pas à Brive », sourit Fabien. Un autre artiste a aussi prévu d’enfiler le fameux blouson : Patrick Bruel, programmé samedi soir sur le festival. Mais les choses ne vont pas vraiment se passer comme prévu.
Gérer l'arrivée plus tôt que prévu de Patrick Bruel« Bon, on vient d’être appelé. Patrick arrive dans deux heures sur site. Il avait envie de passer la soirée avec nous et de profiter de la ville samedi. » Il est 19 heures. L’organisation se met en place. Le calme et la sérénité règnent. Pas d’affolement, tout semble déjà sous contrôle autour de Stéphane Canarias et ses équipes de Festival Production.
Un runner, qui transporte les artistes, ira récupérer Patrick Bruel à l’aéroport à 21 heures pour l’amener sur le site. Une heure plus tard, le chanteur traverse les backstages et l’espace partenaires à la hâte, direction la loge de l’organisation.
« On est vraiment très bien reçu ici. Qui peut assister à un concert dans de telles conditions?? Stéphane, je vais peut-être jouer depuis la loge », lâche, dans un grand sourire, le monument de la chanson française avant de rejoindre, le temps d’un morceau, Mosimann sur la scène, peu avant 1 heure du matin.
Pendant ce temps, Stéphane Canarias peut, lui, souffler. Et profiter, quelques instants. Cette deuxième soirée des 20 ans de Brive Festival s’est déroulée sans encombre, mais pas sans un effort collectif. Il est deux heures du matin. L’heure d’un cocktail. Peut-être même deux avant une nouvelle courte nuit. Et une nouvelle journée à orchestrer.
Reportage Benjamin Pommier Photos Stéphanie Para