"Au bon endroit, au bon moment" : au sein du village olympique, des aumôniers au service des athlètes
Parcourant les corps, l’adrénaline. Dans les tribunes, l’effervescence. À l’intérieur du centre multiconfessionnel du village olympique, la promesse d’une certaine sérénité. C’est cette dernière que les athlètes qui le souhaitent peuvent venir chercher au sein de ce site de 400 m2 à l’emplacement discret, dont la création relève des impératifs listés par le Comité international olympique dans son cahier des charges.
Cinq religions (chrétienne, juive, musulmane, hindouiste et bouddhiste) y sont représentées. De 7 h à 23 h, il est possible d’y prier, d’être orienté vers des célébrations ayant lieu à l’extérieur du village, et, surtout, de bénéficier d’un accompagnement spirituel proposé par les équipes d’aumôniers présentes pendant toute la durée des Jeux.
Des mois durant, les aumôniers des différents cultes se sont préparés à l’accueil de celles et ceux qu’il s’agit de considérer "comme des personnes et pas seulement comme des athlètes", explique Emmanuel Gobilliard, évêque de Digne et délégué de la Conférence des évêques de France pour les Jeux olympiques.
"Motivés par un esprit de service"Des formations liées à l’écoute, à la laïcité, à la santé mentale, à la connaissance du milieu sportif, au rapport à la performance leur ont été dispensées. Pour les aumôniers, "motivés par un esprit de service", l’objectif est "d’être au bon endroit, au bon moment", avec "la bonne disposition de cœur", décrit Joël Thibault, pasteur de l’Église protestante évangélique et coach spirituel de sportifs de haut niveau comme le footballeur Olivier Giroud. Et ce, en proposant à tous une oreille attentive, "quelle que soit la croyance."
Pendant les Jeux, ils recevront tous les sportifs qui en manifesteront le désir dans la confidentialité et la disponibilité. "Les athlètes peuvent aussi téléphoner pour confier leur souffrance", ajoute Emmanuel Gobilliard.
Ce sont des appels qui peuvent émaner de personnes non pratiquantes. Sur 14.000 athlètes, il y a beaucoup de demandes.
Charge aux aumôniers de s’adapter aux différences culturelles, expose également Najat Benali, rectrice de la mosquée de Javel et présidente de la coordination des mosquées parisiennes. Elle témoigne de l’ouverture des 11 imams aumôniers (dont certains ont eux-mêmes été athlètes) "à l’ensemble des sensibilités musulmanes et des cultures du monde." Et précise : "Le mot d’ordre, c’est de rester à notre place. Nous ne sommes pas l’entraîneur de l’équipe. Les athlètes ont aussi leurs coachs."
"Le lien entre sport de haut niveau et foi est assez important", décrit Emmanuel Gobilliard. "Les sportifs ont aussi des besoins spirituels. Ils se posent des questions sur leur existence, font face à des phénomènes de vie amplifiés par leur carrière, par la médiatisation du sport, des pressions qui viennent de toutes parts", observe Joël Thibault.
Un lieu de rencontre au-delà du sportÀ l’approche des épreuves, le stress montant, les échanges avec les aumôniers peuvent constituer "des temps d’apaisement", poursuit le pasteur protestant qui évoque également une dimension de "gestion de crise" résultant de "facteurs extérieurs à la vie du sportif, pouvant toucher son entourage." Enfin, il ne faut pas, non plus, oublier que "tous les athlètes n’en sont pas à leur quatrième olympiade ou compétition internationale. Il faut penser à tous ceux pour qui c’est une découverte. Et certains sont outsiders, mais avec de grosses attentes."
Joël Thibault souligne encore l’importance du rôle de cet "espace de rencontre" pour les croyants et non croyants, "très humain", "où les sportifs, entre eux, font preuve de bienveillance et peuvent prier les uns pour les autres. C’est un peu le seul lieu qui permet de vivre cela", ajoute-t-il, un lieu "où des gens de toutes nations et parlant différentes langues se retrouvent pour parler d’autre chose que de sport."
Alice Forges