L'abbatiale de la Chaise-Dieu : "il faut entretenir l'écrin pour admirer le joyau"
Les collectivités, Département, Agglomération du Puy et mairie de La Chaise-Dieu par l’intermédiaire de leur bras armé, le Syndicat mixte, entendent poursuivre la mise en valeur de l’ensemble abbatial mais aussi éviter que ce joyau ne se dégrade. Des interventions urgentes sont apparues qui viennent bouleverser la programmation. Ce titanesque projet a été engagé il y aura bientôt 15 ans. L’ensemble des bâtiments (soit 18.000 m²), faut-il le rappeler, est propriété de la commune à l’exception de l’auditorium appartenant à l’agglomération. Le Syndicat mixte est à la barre d’un bateau qui continue de subir des avaries, d’où l’enveloppe de l’ordre de 25 millions de travaux consommée jusqu’à présent. Il a aussi en charge depuis 2019, l’exploitation touristique avec un parcours de visite, sans oublier la saison culturelle (en dehors du fonctionnement). Jean-Claude Bonnebouche, vice-président du Syndicat mixte insiste sur un suivi constant de la structure. « Depuis des années, il ne s’était pas fait grand-chose. Il a donc fallu engager une masse de travaux considérable », dit-il. Le directeur du Syndicat, Jean-Paul Grimaud renchérit : « Il nous faut maintenir à flot le vaisseau de manière à éviter de devoir faire face à des travaux que nous ne pourrions pas financer ».Volonté. Gérard Roche (entre Jean-Claude Bonnebouche et Jean-Paul Grimaud) a impulsé le « projet Chaise-Dieu ». Ce « projet Chaise-Dieu » défendu par l’exécutif départemental et ses présidents successifs, Gérard Roche, Jean-Pierre Marcon, Marie-Agnès Petit se poursuit. Il est prévu un programme de réhabilitation de l’aile de l’Echo 2 (la première partie ayant été faite). Il s’agit du bâtiment qui se trouve dans la continuité de l’exposition temporaire Robert Doisneau et qui se poursuit jusqu’à la départementale traversant La Chaise-Dieu. Cette aile englobe l’ancienne mairie et la communauté de communes. Sur sa partie basse, on trouve la scénographie de la Danse macabre et la salle de l’Echo. À l’étage supérieur, l’ancienne maison de retraite est vide.
Des travaux de toiture imprévusAvant d’engager la rénovation de l’intérieur, il conviendra de reprendre la toiture. « L’hiver dernier, on a constaté que le toit s’était affaissé, il a fallu réaliser avant Noël un confortement d’urgence. Le poids de la neige a sûrement eu un effet », explique Jean-Claude Bonnebouche. Coût de l’opération qui n’était pas prévue : au bas mot, 500.000 euros. Plus tard, l’intérieur pourrait être utilisé par le festival avec, entre autres, la création de loges, qui font défaut aujourd’hui. Des loges à la place des anciennes cellules de moine par la suite transformées en chambres pour la maison de retraite. « Le reste de l’année, ces espaces seraient dévolus à des ateliers pédagogiques, de classes de découvertes », indique Jean-Paul Grimaud. Reste à réaliser l’accessibilité de ce bâtiment au moyen d’un ascenseur. Pour le moment, la partie réservée à l’exposition temporaire n’est toujours pas accessible aux personnes à mobilité réduites, contrairement au reste du parcours muséal. Ces travaux sont inscrits dans le contrat de plan État/Région 2022-2027. La toiture vient a priori en surcoût mais pourrait néanmoins être réalisée en utilisant les crédits qui avaient été affectés à une nouvelle chaufferie. Or, le Syndicat mixte réfléchit à s’inscrire dans le programme communal de réseau de chaleur, évitant ainsi un coûteux investissement. Les premières évaluations de la réhabilitation sont de 3 millions d’euros (1,2 million du Département, 1 million de l’État, 800.000 euros de la Région). La réfection de l’ancienne communauté de communes devrait faire l’objet d’une autre tranche de travaux.Mobilier. Une réhabilitation de l’orgue est prévue à partir de cet automne. Le Syndicat mixte est confronté depuis des mois à un autre problème : l’humidité dans l’abbatiale. Les drainages existants à l’origine ont été mis en mal du fait des évolutions de l’urbanisme. Des déshumidificateurs permanents ont dû être installés dans la salle des tapisseries. La solution consisterait à reprendre la place Lafayette pentue à partir de laquelle l’eau s’infiltre dans l’abbatiale. Jean-Claude Bonnebouche parle d’un « grand drainage de la place avec plusieurs récupérations d’eau ». Ce projet vient de faire l’objet d’une présentation de la maîtrise d’œuvre auprès de la DRAC. Des travaux pourraient être entrepris dans un an, autrement dit à la rentrée 2025. Récemment et dans l’attente de trouver une solution durable, des joints dégradés ont été repris rue de l’Aumône. Le Syndicat mixte insiste sur « l’urgence » de travaux à réaliser avant la réelle poursuite du « projet Chaise-Dieu ». Jean-Claude Bonnebouche résume : « Pour l’heure, la structure de l’abbatiale n’est pas affaiblie mais pourrait le devenir si l’on ne fait rien contre l’humidité ». On parle ici surtout du réseau souterrain. Les adductions d’eau potable de La Chaise-Dieu seraient à revoir. La commune, tant en investissement qu’en fonctionnement ne peut pas faire grand-chose. Dès cet automne des travaux seront entrepris par ailleurs au niveau du mobilier avec relevage de l’orgue (jusqu’en juin 2025) qui figure parmi les plus remarquables en France. La DRAC devrait intervenir à hauteur de 45 %. Le festival de La Chaise-Dieu n’est-il pas né du reste de la volonté de György Cziffra d’organiser des concerts déjà à l’époque en vue de la réfection de l’orgue?? Les travaux porteront sur la soufflerie en mauvais état et la tuyauterie. La dernière restauration notable remonte à 1995. Le choix du ou des entreprises doit se faire dans les prochains jours. Après l’orgue, viendra le tour du maître-autel…
Le tourisme pour conforter le patrimoineAile de l’Echo 2, travaux de la place Lafayette pour répondre aux infiltrations font donc partie des travaux nécessaires et a priori financés dans la continuité du « projet Chaise-Dieu ». Suivra, à plus long terme la reprise de la façade ouest de l’abbatiale (la façade principale) mais aucune échéance n’est pour l’heure avancée. Les budgets tant côté du Département que de l’Agglomération du Puy sont de plus en plus contraints. Les acquis obtenus (de haute lutte) par l’ancien président du département Gérard Roche appartiennent à une époque sans doute révolue. Le site abbatial est confronté à un dilemme : un patrimoine et un festival exceptionnels, mais une saison touristique qui s’achève en novembre, un budget de fonctionnement de l’ordre d’un million d’euros, avec si peu de marge de manœuvre. Les frais courants continuent de tomber, comme le remplacement d’une cinquantaine d’extincteurs incendie, des frais d’assurance de plus en plus conséquents… Le site peut s’appuyer sur de bons chiffres de fréquentation touristique avec 3.500 entrées supplémentaires par rapport à l’an dernier sur le parcours de visite. Cette année est particulièrement favorable du côté des groupes au printemps. L’objectif des 30.000 visiteurs en 2024 semble atteignable. Au-delà de l’aura du festival, La Chaise-dieu reste une offre touristique parmi d’autres. Jean-Claude Bonnebouche défend le pays casadéen et se veut confiant : « On n’est plus le bout de monde aux yeux de l’Agglomération du Puy. Les nouvelles populations ont davantage tendance à basculer sur la ville préfecture ». Projet Chaise-Dieu
Philippe Suc