En Auvergne, les stations thermales se réinventent
Alors que la saison estivale touche à sa fin, Dominique Ferrandon, président du GIE Auvergne Thermale évoque, sans langue de bois, les défis à venir pour un secteur appelé à se réinventer.
Quel bilan faites-vous de l’été ?
« Globalement, on était tous confiant sur le début de la saison, on était en avance sur nos prévisions, mais on a déchanté en juin. Aujourd’hui, ceux qui s’en sortent le mieux vont finir à l’identique par rapport à la saison précédente, les autres accusent un retard de 2 % en moyenne. »
Comment expliquez-vous cette baisse de régime ?
« Par plusieurs facteurs. Le Covid a changé les habitudes y compris chez nos curistes. Il faut savoir que le complément tarifaire d’une cure qui était autrefois de 40 € est passé à 100 €. L’investissement est donc supérieur pour notre cœur de population qui se compose majoritairement de retraités. Dans un contexte où le pouvoir d’achat global de la population baisse, cela pèse dans la balance. Venir en cure en 2024 coûte plus cher qu’il y a 10 ans. Pour preuve, on a de plus en plus de locaux dans nos cures. Et puis, l’environnement des retraités a changé, ils sont nombreux à nous dire qu’ils gardent leurs petits enfants. Ils sont bien plus sollicités. »
La météo a-t-elle aussi découragé les curistes ?
« Sur Royatonic et le bien-être oui, sur les cures c’est moins évident; »
Si les cures longues stagnent, quelles peuvent être les pistes d’avenir pour le thermalisme ?
« La question de fond est : est-ce que nous avons toujours le bon modèle économique pour les cures ? Est-ce que nous ciblons la bonne clientèle ? N’est-on pas à un tournant de notre métier ? Pendant des années nous avons surfé sur le baby-boom, mais aujourd’hui l’âge moyen de nos curistes a augmenté de 4 ans. »
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L’avenir est peut-être à trouver du côté des actifs pour compenser le recul des cures traditionnelles ?
« Oui, en partie. Les 30-50 ans veulent bien manger, prendre soin d’eux. Et en plus une eau qui soigne. L’avenir c’est cette fameuse station de pleine santé où l’on va évaluer les besoins, adapter un parcours de soin thermal, sportif, alimentaire… Pour cela il faut moderniser certains établissements. Ce qui n’est pas simple car le contexte économique nous préoccupe. On a perdu 20 % de notre chiffre d’affaires depuis 2019. Cette perte nous mobilise au quotidien. Mais c’est vrai que le succès des cures nocturnes et des mini-cures auprès des plus jeunes nous démontrent qu’ils sont demandeurs. Il faut adapter le modèle à leurs souhaits. Si je prends l’exemple de nos cures autour de la phlébologie qui touche beaucoup les actifs : comment voulez-vous qu’une coiffeuse ou une infirmière se libère deux jours et demi pendant trois semaines sur un établissement ouvert que les matins ? »
Pourquoi ne pas imaginer des cures en relation avec les entreprises ?
« Devenir acteur de la prévention santé au travail est une piste. Les Mutuelles pourraient s’inscrire dans la prise en charge des mini-cures de six jours. »
Quel est votre principal motif de satisfaction ?
« La motivation des équipes. Beaucoup de jeunes arrivent à la tête des stations avec énormément d’idées. Et puis, la Région a nommé une vice-présidente au thermalisme, c’est un excellent signe. »
Carole Eon