Ce château de Haute-Loire en passe d'être classé Monument historique
Les hydrangea virent doucement au rose en cette fin d’été, tandis que les verts se déclinent à l’infini. De Figon, on ne verra pas l’intérieur, qui n’est pas ouvert au public. Son architecture, unique en Haute-Loire, participe au charme des lieux. D’inspiration italienne, c’est un aïeul de Guy Henry de Fraix de Figon, l’un des propriétaires, qui l’a construit, à l’issue de son Grand tour en 1832. « Il a réalisé son rêve, à la fois sur le château et sur le parc », observe Guy Henry de Fraix de Figon. Du premier château par contre, situé à quelques mètres, il ne reste plus grand-chose. On vient ici pour les extérieurs : sur 8 hectares, le parc et les jardins, clos d’un mur continu en pierres sèches, occupent un relief varié, un mélange de larges dégagements, de vallons, d’amas de gros rochers granitiques et de rares ouvertures sur l’extérieur. Le point d’orgue est la « Salle d’arbres » d’un hectare, créée au temps de la Ligue : une promenade à la quiétude surannée, plantée de sycomores, chênes et hêtres. À tel point « qu’on a l’impression de passer une porte spatio-temporelle, qui vous transporte dans un autre temps », confie le maître des lieux. Les arbres sont équidistants de 7,20 mètres, plantés pour les premiers, à la fin du XVIe siècle. « C’est l’élément emblématique du château observe le propriétaire. On remplace les arbres régulièrement, en plus de les élaguer. » Le jardin à la française avec son bassin aménagé au XVIIIe siècle, participe de l’ambiance ancestrale des lieux. « Au XIXe siècle, plusieurs générations successives de sylviculteurs éclairés vont s’attacher à embellir ce qui va devenir le parc de Figon, dessiné dans le goût anglais, combinant de très vieux arbres autochtones (tilleuls, hêtres, chênes, châtaigniers, etc.) avec les premières acclimatations d’épicéas, douglas, mélèzes et wellingtonias (séquoias) en Haute-Loire », souligne le propriétaire.La Salle d’arbres, temps fort de la visite des extérieurs du château. Il abrite des arbres extraordinaires : tulipiers de Virginie, cyprès chauves de Louisiane, araucarias, catalpa de Nouvelle Orléans ou azalées orange du Canada. Le plus grand séquoia mesure 50 mètres de hauteur et plus de 8 mètres de circonférence. Le parc de Figon a d’ailleurs reçu le label Ensemble arboré remarquable. À proximité du parc, le Gros Roule, un chêne de 5 mètres de tour et planté en 1613, a reçu le label « Arbre Remarquable de France » en 2021. Un dossier est désormais en cours d’instruction pour faire classer le château au titre de Monument historique. « Il le mérite?! Ce classement est aussi un moyen de maintenir le patrimoine », souligne Guy Henry de Fraix de Figon. « Je suis né à Figon », lance-t-il pour témoigner de son attachement à la propriété familiale. L’ancien ingénieur, qui a effectué une grande partie de sa carrière à l’étranger, est passionné par l’Histoire et les archives. « Chaque génération de ma famille a été extrêmement attachée à l’endroit et a apporté quelque chose. On est les héritiers mais surtout les successeurs. On continue une mission avec pour objectif la transmission. Un classement du site peut nous y aider », conclut-il. Jardin à la française, il agrémentait le premier château
Pratique. Le château est ouvert à la visite aux groupes (minimum d’une dizaine de personnes) sur rendez-vous en réservant au 04.71.59.92.55 ou à chateaudefigon@gmail.com. Gratuit.
Carlo Figoni, l’illustre ancêtre
Guy Henry de Fraix de Figon a été l’élève d’Emmanuel Le Roy Ladurie, auteur d’un livre sur son aïeul. Retour sur les grands noms du château. La première mention de Flachon est faite par Vidal Faure de Marnas quand, en 1546, il lègue cette terre, qui abrite aujourd’hui le château, à son fils Étienne, baron de Montregard. Celui-ci transmet Flachon à son gendre, Charles de Figon, lors de son mariage en 1559 avec Florye Faure de Marnas. Charles est en fait un Florentin du nom de Carlo Figoni qui, à la suite de la reine Catherine de Médicis, rejoignit la cour des Valois où il devint secrétaire du Garde des Sceaux, le cardinal Bertrand, puis Maître des Comptes en la chambre de Montpellier et proche collaborateur du Secrétaire d’État Simon Fizes. Il fut enfin secrétaire particulier de la reine de Navarre (la Reine Margot) et conseiller de ses frères les rois François II, Charles IX et Henri III, les trois derniers souverains de la Maison de Valois. Il est surtout l’auteur, en 1579, d’une description complète et très structurée des rouages de l’État royal, en ces temps qui conjuguèrent les troubles des Guerres de Religions et l’apparition en France d’un État moderne et organisé. Ce livre, Le Discours des États, a connu auprès des légistes un grand succès au XVIe et XVIIe siècles. Il est toujours aujourd’hui l’objet d’études approfondies et, notamment, celles d’Emmanuel Le Roy Ladurie, professeur au Collège de France, qui fait de « l’Arbre de Justice », aussi nommé « l’Arbre de Figon », la pierre angulaire de son dernier ouvrage, Brève histoire de l’Ancien Régime (2017).Bassin du XVIIIe siècle. « Mon grand-père a été contacté par l’historien qui lui a fait comprendre que mon aïeul était un homme hors du commun. Je l’ai rencontré sur le conseil de mon grand-père et j’ai travaillé durant deux ans avec lui », se souvient Guy Henry de Fraix de Figon.
Nathalie Courtial