"La Cocina" fait bouillir le rêve américain à l'écran
Des thèmes au coeur de la campagne électorale sous tension qui s'achève la semaine prochaine aux Etats-Unis, quand sortira le film, qui n'a pas de date de sortie en France.
Rooney Mara, prix d'interprétation à Cannes en 2015 pour "Carol" et deux fois nommée aux Oscar, y joue une serveuse d'un restaurant attrape-touristes sur Times Square, parmi des employés pour la plupart immigrés, dont Pedro, joué par le Mexicain Raul Briones.
"C'est un film sur les contrastes - entre l'arrière-cuisine et la salle, entre les +gringos+ (les Américains) et les Mexicains, entre les différentes hiérarchies dans une cuisine", affirme le réalisateur et scénariste mexicain Alonso Ruizpalacios.
"Les cuisines sont un bon moyen de comprendre les dynamiques que nous vivons dans les rues", ajoute-t-il lors d'un entretien avec l'AFP.
Pour Alonso Ruizpalacios, les restaurants permettent un "brassage des cultures", les transformant en lieu idéal pour "souligner les frictions" entre ces dernières.
"Ce sont aussi des lieux où la pression est très très forte (...) des choses douloureuses en sortent parfois et occasionnellement, on y voit aussi des lueurs d'espoir", ajoute-t-il.
Le film est inspiré de la pièce éponyme d'Arnold Wesker, parue en 1957, qui se concentre sur le vécu des immigrés et sur comment le rêve d'une ascension grâce au dur labeur se transforme en illusion.
Mais le réalisateur de 46 ans a puisé dans sa propre expérience de plongeur dans un restaurant similaire à Londres, pendant ses années étudiantes.
"Intemporel"
Dans le film, Pedro, immigré sans papiers mexicain, tombe amoureux de Julia, la serveuse jouée par Rooney Mara, qui ne partage qu'à moitié ses sentiments.
Tandis qu'ils rêvent d'un avenir commun idyllique, Julia est elle préoccupée par un dilemme: avorter ou non. Au milieu de la frénésie d'un restaurant très fréquenté où les clients n'ont que faire des employés.
"Je voulais montrer les gens derrière les portes closes des cuisines", raconte Alonso Ruizpalacios, évoquant "des gens qui ont des familles, des rêves et qui travaillent très dur pour gagner très peu".
Il dit aussi ne pas avoir voulu cacher les défauts, voire la part plus sombre de ses personnages: "Souvent dans ce type de film, pour que les Américains puissent réfléchir sur leur propre racisme et leurs préjugés, on simplifie l'autre en le transformant en saint - ça ne m'intéresse pas".
Les personnages "sont des personnes complexes, avec leurs contradictions".
Même s'il résonne particulièrement avec la campagne électorale -- les deux candidats tentent de s'arracher le vote des Latinos --, le cinéaste a tourné en noir et blanc pour éviter d'ancrer le film dans une période particulière.
"Il y a quelque chose d'intemporel dans cette histoire. Elle est toujours pertinente 70 ans après."