À Brive, donner une seconde vie aux livres a fait son chemin depuis quelques années
Brive (Corrèze) a la passion du livre. Cela ne se voit pas seulement, à chaque début du mois de novembre, quand tous les auteurs français et internationaux se pressent sous la halle Brassens, et à l’espace des Trois Provinces, comme ce sera encore le cas, cette année, du 8 au 10 novembre. On le constate aussi tout au long de l’année, jusque devant les boîtes à livres, installées à l’initiative des quartiers.
La ville en compte treize. Sophie regarde dans l’une d’elles, près du parc de la Roseraie : « Je suis une grande lectrice, mais cette passion revient vite cher. Dès que je passe devant la Roseraie, je jette un œil pour voir s’il y a de nouveaux livres qui ont été déposés. Des fois, je ne trouve pas mon bonheur, mais je repars régulièrement avec un ou deux ouvrages. Je dépose, aussi, les livres que j’ai lus, je ne les garde pas chez moi. Ça permet à d’autres personnes d’en profiter, et ça évite de les entasser inutilement sur un meuble », confie cette sexagénaire briviste.
Ces boîtes à livres sont alimentées en grande partie par la banque francophone du livre Étienne-Patier. « Celles de la gare et de la collégiale Saint-Martin marchent vraiment très bien. C’est plus compliqué dans les quartiers prioritaires », regrette Laurent Soutenet, le président de l’association. Derrière lui, dans une petite salle de la caserne Brune, une armoire déborde de romans prêts à alimenter les boîtes à livres.
« C’est insupportable de jeter des livres à la poubelle, appuie le responsable. Le livre n’est pas un objet comme les autres. Nous récupérons ici toutes sortes d’ouvrages, issus des bibliothèques, des CDI d’établissements scolaires… Nous avons de tout : des manuels, des romans, des BD. Ensuite, nous utilisons notre réseau. »
Le livre d’occasion, un enjeu économiqueUne seconde vie, qui peut se faire à l’autre bout du monde. En janvier dernier, la banque a envoyé vingt tonnes de livres au Burundi. D’autres projets sont menés avec le Togo. « Avant, ici, on envoyait des soldats en opération extérieure, maintenant on envoie des livres », ironise Danielle Chapapria, une adhérente. Marie-Agnès Lavergne, bénévole à la banque du livre, écoule de son côté des livres bien particuliers. Cette aide-soignante distribue gratuitement des romans écrits en gros caractères aux personnes âgées de son service.
Si la banque Étienne-Patier œuvre de manière caritative, le livre d’occasion représente également une opportunité économique que même les grandes librairies ont su saisir. Depuis un an, dans le Cultura Brive-Centre, un rayon « livres d’occasion » a fait son apparition. Une initiative qui veut répondre aussi au budget resserré des ménages.
Selon une récente étude du ministère de la Culture et de la Sofia, se tourner vers le livre de seconde main répond davantage à un impératif économique qu’à un souci écologique pour les Français. Environ 16 % d’entre eux ont acheté au moins un livre d’occasion en 2022. « La consommation circulaire fonctionne très bien. On vend environ 200 livres d’occasion par mois. En plus du prix plus abordable (entre 2,5 et 8 euros), il y a un peu de nostalgie de voir des éditions plus anciennes. Il y a aussi un côté pratique pour tous les ouvrages scolaires », explique Louise Larue, adjointe du secteur livres chez Cultura. La librairie a aussi mis en place la reprise de livre en échange de bons d’achat.
Ce cercle vertueux, auquel participe association et professionnels, aura sa place à la Foire du livre. Un stand du Rotary club permettra aux lecteurs de venir déposer des livres. « Cela servira à faire des cadeaux de fin d’années. Et s’il en reste malgré cela, nous les récupérerons pour le redistribuer ensuite. »
À Brive, l’histoire des livres n’a pas de fin.
Pierre Vignaud et Guillaume Blanc