François Bayrou face à une première motion de censure à l’Assemblée
Le gouvernement de François Bayrou verra-t-il le printemps ? Il devra en tout cas faire face ce jeudi 16 janvier à une première épreuve avec l’examen à l’Assemblée nationale d’une motion de censure qui, même si elle ne devrait in fine pas être adoptée, permettra de clarifier la position des socialistes. A peine vieux de trois semaines, le gouvernement n’a pas demandé symboliquement la confiance de l’Assemblée, mardi après le discours de politique générale du Premier ministre. Comme son prédécesseur, il y est privé de majorité. En retour, les élus de La France insoumise, qui ne cessent de réclamer la démission d’Emmanuel Macron, ont déposé une motion de censure, la 150e de la Ve République. Le vote de cette motion de censure spontanée est prévu vers 17h30 et le résultat devrait être connu vers 18h00.
Les infos à retenir
⇒ Le PS a repoussé à ce jeudi sa décision de voter ou non la motion de censure
⇒ Yaël Braun-Pivet "espère que chacun agira en responsabilité"
⇒ "Conclave" sur les retraites : la CFDT salue une "opportunité inédite"
Retraites : la mission de la Cour des comptes pourrait prendre "quelques semaines"
La mission confiée par François Bayrou à la Cour des comptes sur les retraites devrait prendre "quelques semaines" a annoncé ce jeudi le président de la juridiction, Pierre Moscovici, qui doit rencontrer le Premier ministre dans la journée.
Dans sa déclaration de politique générale mardi, le chef du gouvernement a indiqué vouloir remettre "en chantier" la réforme des retraites, et chargé la Cour des comptes d'une mission pour établir rapidement "un constat" fondé sur "des chiffres indiscutables". Il s'agit d'un préalable à trois mois de négociations entre partenaires sociaux pour revoir la réforme des retraites de 2023, sous réserve de ne pas "dégrader l'équilibre financier" du système.
"Nous essaierons d'établir la vérité des chiffres, objective, pour faire en sorte que ce soit aussi un socle" à la discussion avec les partenaires sociaux, a indiqué Pierre Moscovici lors des voeux de la Cour des comptes à la presse.
Il a précisé qu'il rencontrerait les organisations syndicales et patronales "à partir de demain". Concernant la durée de cette mission, "oui, nous savons faire ça en quelques semaines, pas deux semaines!", a-t-il répondu, précisant avoir déjà "constitué une équipe". "Nous ne sommes pas une administration", et "le travail sera indépendant, nous ne sommes pas là pour valider des chiffres", a assuré Pierre Moscovici.
Pour Marine Tondelier, Jean-Luc Mélenchon empêche le PS de prendre une décision "sereinement"
La cheffe des Écologistes Marine Tondelier a reproché à Jean-Luc Mélenchon jeudi d’empêcher les députés socialistes de prendre "sereinement" la décision de censurer ou non le gouvernement de François Bayrou en utilisant un "vocabulaire soit viriliste soit humiliant". "Je vois qu’ils sont divisés […], c’est difficile vis-à-vis de leurs militants, c’est difficile au niveau du parti, c’est difficile au niveau du groupe, mais franchement, quand Jean-Luc Mélenchon dit 'Rentrez tous à la niche, tous à la maison' […], ça n’aide pas les gens à se prononcer sereinement", s’est agacé sur franceinfo la secrétaire nationale d’EELV.
????➡️ "Tout en France devient un débat 'pour ou contre Jean-Luc Mélenchon'. J-L Mélenchon n'est pas le sujet de cette motion de censure", dit Marine Tondelier. pic.twitter.com/2xyF0DZ122
— franceinfo (@franceinfo) January 16, 2025
Selon cette dernière, dont le groupe va voter la censure, "il y a des députés socialistes qui étaient très mal à l’aise à l’idée de ne pas voter la censure […] mais qui sont exaspérés que Jean-Luc Mélenchon se comporte comme s’il les tenait en laisse". "Comme si, s’ils votaient la censure en fait c’est qu’ils se couchaient face à Mélenchon", a-t-elle développé, se plaignant que le Nouveau Front populaire soit "prisonnier de ce truc là tout le temps".
Au PS, malgré de longues discussions, la décision de voter ou non la motion de censure a finalement été repoussée… à ce jeudi. Après moult tergiversations et hésitations, les 66 élus socialistes devront déterminer si les concessions du gouvernement, notamment l’annonce d’une négociation entre partenaires sociaux sur la question des retraites pour réviser la réforme des retraites de 2023, seront suffisantes pour arracher leur non-censure. "Les instances du Parti socialiste et du groupe à l’Assemblée se réuniront d’ici le débat de censure", a indiqué à l’AFP la direction du parti mercredi soir. "Le compte n’y était pas à l’Assemblée nationale, ni hier, ni encore aujourd’hui aux questions au gouvernement", a mis en garde mercredi le chef des sénateurs socialistes Patrick Kanner. François Bayrou venait d’annoncer qu’il soumettrait un nouveau projet de loi sur les retraites au Parlement en cas de "progrès" entre les partenaires sociaux, et même "sans accord général".
"Agissez en responsabilité", exhorte Yaël Braun-Pivet
Il faut toujours prendre "très au sérieux" les motions de censure qui sont aussi "un mode d’action politique de la part des oppositions", a affirmé ce jeudi matin sur TF1 Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale. "Agissez en responsabilité", a-t-elle lancé à l’adresse des députés. Elle a poursuivi : "Nous sommes dans une situation extrêmement compliquée, qui n’est pas la même qu’en décembre, nous n’avons pas de budget, les Français en ont besoin".
Si le gouvernement tombe aujourd’hui cela veut dire : pas de budget, pas de loi d’urgence pour Mayotte, pas de loi agricole pour protéger pour nos agriculteurs. #BonjourLaMatinaleTF1 pic.twitter.com/eYlfr5bJJ2
— Yaël Braun-Pivet (@YaelBRAUNPIVET) January 16, 2025
Le RN et Liot ne voteront pas la censure
Les cadres du Rassemblement national, dont les voix sont indispensables pour renverser le gouvernement, ont déjà indiqué que leurs députés n’entendaient pas voter la motion de censure déposée par LFI. Impossible alors pour cette dernière d’atteindre les 288 voix nécessaires à son adoption.
Stéphane Lenormand, président du groupe indépendant Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer), a par ailleurs indiqué à l’AFP que ses troupes ne la voteraient pas. "On va attendre le projet de loi de finances et celui sur la Sécurité sociale. On n’exclut pas sur ces deux rendez-vous de prendre une position différente", a-t-il prévenu.
"Conclave" sur les retraites : Marylise Léon salue une "opportunité inédite"
La numéro un de la CFDT Marylise Léon estime, dans une interview à Libération ce jeudi, que la réforme des retraites est "en pause" après la décision de François Bayrou de remettre "en chantier" le sujet, une "opportunité inédite" qu’il faut "saisir". "C’est la reconnaissance que cette réforme est injuste socialement", dit la secrétaire générale de la CFDT après l’annonce par le Premier ministre François Bayrou de l’ouverture d’un "conclave" de renégociation de trois mois, "sans aucun tabou", sur la réforme contestée de 2023, entre les partenaires sociaux. "C’est important que ce signal soit envoyé, parce qu’il n’y en a eu aucun de la part de l’exécutif de l’époque, malgré des millions de travailleurs dans la rue. Ce serait les trahir que de ne pas saisir cette opportunité", ajoute-t-elle.
Pour Marylise Léon, "la réforme est bien sur pause puisque le calendrier est restreint et qu’il faut conclure dans un délai qui permet ensuite de renvoyer le sujet à l’Assemblée nationale pour ce qui nécessite une transposition législative." La réforme de 2023, qui avait été adoptée au forceps grâce à l’article controversé 49.3 de la Constitution, a notamment porté de 62 à 64 ans l’âge légal de la retraite. "Il faut un bougé sur les 64 ans. Il faudra aussi une mesure sur la pénibilité, une mesure sur l’égalité hommes-femmes et une mesure sur l’âge", énumère Marylise Léon.
Les syndicats doivent discuter jeudi après-midi en intersyndicale des premiers contours de la négociation.