«Extrême»: un abus de langage?
Sophie de Menthon s’interroge avec malice sur ce drôle de paradoxe français où le RN est qualifié d’«extrême», alors que la gauche radicale, malgré ses excès, échappe curieusement à cette étiquette. Elle s’amuse aussi de cette Assemblée nationale devenue un véritable théâtre où les élus, plus occupés à s’entre-déchirer qu’à gouverner, semblent oublier que ce sont les électeurs, pas leurs égos, qui les ont mis là.
L’extrême droite ? Je suis bien consciente que poser la question de l’extrémisme du Rassemblement national, c’est déjà se faire accuser de le soutenir ! La potentielle inéligibilité de Marine Le Pen contraint à repenser aujourd’hui la réalité autrement.
Les Français majoritairement d’accord avec le RN sur l’immigration, mais pas le droit de le dire !
Il faut un bouc émissaire à la société française et au monde politique depuis toujours : on l’a de toute évidence trouvé et il fait plus que jamais l’affaire. C’est le « Rassemblement national », dit aussi « l’extrême droite », succédant au Front national, objet de tous les rejets (non sans raison d’ailleurs car les convictions de Jean-Marie Le Pen furent parfois insoutenables, entre autres pour son antisémitisme). Mais le père n’avait que très peu ou pas de points communs avec sa fille, Marine Le Pen, qui lui a aujourd’hui succédé avec le lourd héritage de ce patronyme. L’un, Jean-Marie Le Pen, était plutôt à droite et capitaliste, Marine Le Pen plutôt à gauche et protectionniste. Quant à l’antisémitisme, on peut franchement tout lui reprocher sauf cela, le combat du RN est essentiellement de limiter l’entrée des immigrés venant d’Afrique car tous nos malheurs, y compris économiques, viendraient de là.
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Justement, dans l’état de fragmentation où est la France, il serait bon de se poser la question du qualificatif d’« extrême » pour ce parti : extrême en quoi ? Une presque majorité des Français partage des convictions défendues par le RN même si économiquement elles sont loin d’être souhaitables et terrifient les chefs d’entreprise. De plus, on cherche en vain ce qu’il peut y avoir « de droite » dans ce programme de l’extrême droite, sinon toujours cet unanimisme autour de l’immigration, plus que jamais au goût du jour avec l’Algérie. La droite, la vraie, dont personne ne sait plus ce qu’elle représente, n’a pas de valeurs particulières à nous faire miroiter : la République ? la nation ? des valeurs, lesquelles ? mais tout cela est préempté de partout et galvaudé. Le danger vient d’ailleurs, et il est de ce fait incompréhensible que le Conseil d’Etat ait décidé que le qualificatif d’« extrême gauche » ne devait pas être utilisé pour la gauche : LFI et le PCF (qui n’en demandait pas tant). L’extrême gauche, donc, n’existe pas, même quand elle déshonore l’autre gauche et choque nos âmes de citoyens et de républicains. Que dire de l’ignoble caricature d’Hanouna ? Si elle émanait du RN, on verrait ses auteurs immédiatement devant les tribunaux et à juste titre, car elle fait preuve d’un racisme affiché qu’on ne tolèrerait jamais venant de ladite extrême droite. La pensée à tendance unique doit-elle aussi faire siennes les idées à la mode sur la drogue, l’élargissement antidrague et le verdissement des trottoirs, le tout sous couvert d’un État dépensier, clientéliste, bienveillant : un must politique ?
TPMM
La libérale que je suis se retrouve à aimer la gauche, la bonne gauche d’autrefois, d’avant les coupables rageurs de LFI et de leur chef auquel on passe absolument tout… touche pas à mon Mélenchon ! La gauche digne, celle d’Emmanuel Valls, Bernard Cazeneuve, Hubert Védrine, et Emmanuel Macron qui incarnait une pseudo-gauche libérale… Nous n’évoquerons pas François Hollande qui oscille entre des positions qu’il ne connaît pas lui-même.
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Donc, devant ce nouveau clivage français hypocrite et assassin, que faire ? Le camp du bien est terrifiant et sectaire. Il est inadmissible qu’un mouvement patronal, par exemple, soit cloué au pilori s’il accepte d’être auditionné par le RN et de lui proposer ses travaux pour l’éduquer économiquement, alors que lorsqu’il reçoit François Ruffin, c’est un bon point malgré ses positions envers les « salauds de patrons ». Il est plus que temps que le monde politique des élus reprenne ses esprits. Ce fameux « front républicain » par exemple, instigué par ceux qui voudraient être réélus peu importe par qui, et sans vergogne par l’extrême gauche, pacte diabolique a donné naissance à un monstre tentaculaire qu’on appelle l’Assemblée nationale ; nos parlementaires y combattent avec un acharnement sans faille ceux grâce auxquels ils siègent : électeurs d’hier, ennemis mortels d’aujourd’hui. Aucun raisonnement nuancé, aucun sens de l’Etat sinon pour une surenchère administrative, aucune prospective sérieuse, aucune ambition désintéressée n’apparait. Il y a un moment où chaque Français doit se poser objectivement la question de son vote. La France serait majoritairement à droite, mais les médias, les ambitieux et les bobos la convaincront-ils à nouveau que nous ne sommes capables de voter que si l’on pense à notre place, et qu’on nous indique les barrages et exclusions obligatoires ? Qui aura le courage d’une union raisonnable des forces de droite, y compris de l’extrême centre (qui ferait mieux de choisir le camp de l’action et de l’esprit de décision) ?
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