« J'ai la boule au ventre de ne plus pouvoir travailler » : dans le Nord, l'angoisse face à la pénurie de carburant
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L’annonce de remises à la pompe par TotalEnergies et un mouvement de grève dans plusieurs raffineries françaises provoquent un afflux d’automobilistes dans les stations-essence. Dans les Hauts-de-France, les habitants sont à bout.
Se lever à 5 heures. Chercher une station-service. Prier pour que certaines soient ouvertes. Ou moins prises d’assaut que ces derniers jours. En faire quatre : en vain. Se dire que non, on ne pourra pas voir sa fille ce week-end, parce que sans gasoil, comment faire l’aller-retour jusqu’à Valenciennes (Nord), où vit Zoé avec sa mère ? Donc, se préparer à aller au boulot, la mort dans l’âme, et puis là, derrière le supermarché, une station ouverte, pas trop embouteillée : délivrance. « J’ai fait le plein, s’exclame Nicolas, cuisinier près d’Arras (Pas-de-Calais) et père de famille divorcé. Je vais pouvoir voir Zoé. »
Perte de tempsDepuis quelques jours, Sandy Cappel dit avoir, elle aussi, « la boule au ventre ». « Je ne sais pas si on va encore pouvoir travailler les jours prochains », soupire cette gérante d’une entreprise de transports, près de Maubeuge (Nord). Notre métier, c’est de livrer partout dans les usines en France des pièces de machines. Or, on met énormément de temps à s’approvisionner en gasoil. Par exemple, ce mardi, mon conjoint est parti sur Dijon : il a mis quatre heures pour trouver du carburant avant de partir ! Lundi, on doit livrer à Reims, deux heures de route, il sera presque à sec et je ne sais pas si on pourra assurer d’autres contrats derrière... »
Des infirmiers n'ont pas pu aller travaillerSi, actuellement, une station sur dix « rencontre des difficultés » en France dixit le gouvernement, le chiffre grimpe à 30 % dans les Hauts-de-France où les habitants, coincés dans des files d’attentes de plusieurs centaines de mètres, perdent parfois patience ou renoncent. « On a une dizaine d’infirmiers du Nord-Pas-de-Calais qui n’ont pas pu aller travailler ce jeudi », indique Yannick Carlu, président du Syndicat des infirmiers libéraux du Pas-de-Calais, qui s’inquiète de « rupture dans la chaîne des soins ». Signe de la gravité de la situation dans le Nord-Pas-de-Calais : les autorités ont demandé à plusieurs stations d’instaurer « un accès prioritaire » pour les véhicules de secours, « dans le but d’assurer la continuité des missions de service public ».
Xavier Bertrand, le président LR du conseil régional des Hauts-de-France, a déploré jeudi que le gouvernement n’ait pas libéré des stocks stratégiques de carburant « au niveau national ». La région Hauts-de-France est la plus affectée par ces difficultés. « Chez nous, il y a 32 % des stations » qui ont des problèmes d’approvisionnement, notamment « parce que beaucoup d’étrangers viennent faire leur plein chez nous », a-t-il expliqué.
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Six raffineries sur huit en grèveDepuis l’annonce de remises à la pompe par TotalEnergies, début septembre, et un mouvement de grève dans plusieurs raffineries françaises - six sur les huit que compte l’Hexagone sont à l’arrêt - la menace d’une pénurie d’essence généralisée grandit. « Notre revendication principale, c’est la revalorisation des salaires en 2022 compte tenu de l’inflation et aussi des embauches », indique Éric Sellini, coordinateur CGT pour le groupe TotalEnergies, où la grève a débuté il y a dix jours. À noter que Total Energies a publié sur son site internet une carte interactive de l'ensemble de ses stations. Pour que les automobilistes sachent quel carburant est disponible ou pas.
Bientôt du mieux... normalement - « Les carburants vont arriver », rassurait, jeudi, sur franceinfo, Olivier Gantois, président de l’Ufip Énergies et Mobilités, porte-parole des pétroliers en France, selon qui la situation allait s’arranger, en raison des importations supplémentaires mises en place. Sauf qu' « il y a un problème d'acheminement du produit, cela prend du temps, il y aura un effet positif de ces mesures, mais dans quelques jours », assure-t-on ce vendredi à l'Ufip Énergies et Mobilités, pour qui le retour à la normale ne sera réellement entier... que lorsque le mouvement social prendra fin.
Nicolas Faucon