Les femmes estiment être "les grandes perdantes" du projet de réforme des retraites
Ce samedi après-midi, environ 3.000 personnes ont manifesté dans les rues de Moulins (Allier), dont de nombreuses femmes qui estiment être "les grandes perdantes" du projet de réformes des retraites.
Trois générations de femmes marchent côte à côte vers la gare de Moulins pour manifester leur opposition à la réforme des retraites, comme environ 3.000 autres manifestants (d'après la police et les syndicats).
Alissa, 33 ans, est accompagnée de sa mère, 53 ans, et de sa fille de trois ans. Pour elle, la réforme des retraites ne passe pas, déjà pour le report de l'âge légal : "j'ai regardé : pour partir à taux plein, je devrais attendre 67 ans. C'est inconcevable ! ". Elle a fait des études, elle a eu un enfant et, comme beaucoup de femmes, n'a pas eu une carrière linéaire. "C'est un peu la triple peine. J'ai eu une césarienne et j'ai allaité, j'ai dû attendre pour reprendre le travail, et j'ai finalement dû changer de travail. Désormais, je suis à temps partiel pour m'occuper de ma fille. Avec mon conjoint, nous avons fait un calcul financier rapide et c'est plus intéressant pour l'instant comme ça... Mais pour la retraite ? "
Mobilisation toujours forte, à Moulins, contre la réforme des retraites
Elle est aussi là pour sa fille : "quel monde on va leur laisser ? Si on travaille de plus en plus vieux, quand les jeunes vont-ils pouvoir intégrer le monde du travail ? ". Alissa est aussi là par solidarité avec les autres générations. Sa maman, âgée de 53 ans, a commencé à travailler à 18 ans : "je n'ai fait que des métiers pénibles, je suis usée. Je ne me vois pas continuer", indique-t-elle.
Carrière hachée, temps partiels subis...Dans la foule, il y a aussi Maëlle, 40 ans, éleveuse. Elle aussi sait qu'elle ne pourra pas faire ce métier physique jusqu'à 64 ans. Elle est là aussi par solidarité avec "ceux qui galèrent" et elle a remarqué que la réforme est "encore plus injuste pour les femmes que pour les hommes". "Parce qu'on a des carrières hachées, qu'on subit des mi-temps", peste Josiane, 60 ans, qui aurait dû partir à la retraite à 60 ans et qui aimerait laisser sa place à un jeune.
Une thématique reprise par la CGT, lors des prises de paroles à la fin de la manifestation. Le syndicat a repris les propos de Franck Riester, ministre des Relations avec le Parlement : " Les femmes, pour atteindre leur durée de cotisation, utilisent notamment des trimestres validés par enfant (huit par enfants) [...] Évidemment, si vous reportez l'âge légal (à 64 ans), elles sont un peu pénalisées. On n'en disconvient absolument pas. Sur ce point-là, elles sont un peu plus impactées que les hommes (...) ", a admis Franck Riester.
La CGT s'est également appuyée sur l'étude d'impact de la réforme des retraites, réalisée par les services de l'État, publiée lundi 23 janvier : "les femmes nées en 1966 partiront 7 mois plus tard à la retraite (contre 5 mois pour les hommes de cette même génération). Celles nées en 72, 9 mois plus tard (contre 5 pour les hommes)". Pour le syndicat, la réforme "aggrave les inégalités qui existent déjà, notamment sur les salaires".
Des inégalités qui révoltent Anna, lycéenne :
Les femmes sont toujours plus pénalisées que les hommes. Elles ont un salaire moindre, n'atteignent pas certains postes à cause du plafond de verre. Elles ont des carrières cassées par le fait d'avoir des enfants. Et on sera encore perdantes à la retraite. Ça me rend folle !
Texte : Marie CollinetPhotos : Corentin Garault