Pourquoi les voitures connectées chinoises sont dans le viseur des Etats-Unis
![Pourquoi les voitures connectées chinoises sont dans le viseur des Etats-Unis](https://www.lexpress.fr/resizer/BxfgoYE7eTDhaDIiqXb3OuC_-bY=/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/lexpress/BQJ4MMOQNNC6PIO2HFPO5QHUJM.jpg)
Après les semi-conducteurs, les technologies de pointe et les données personnelles, c’est désormais au tour des véhicules connectés et des logiciels embarqués d’être au cœur de l’attention de Washington. Le gouvernement américain a annoncé, jeudi 29 février, lancer une enquête sur les risques que peuvent représenter les véhicules connectés ainsi que les composants liés provenant de la Chine.
Le département du Commerce a lancé une enquête publique ouverte à tous afin de "déterminer dans quelle mesure la technologie embarquée dans ces véhicules permet de capter de nombreuses données et agir à distance sur ces véhicules" et quelles mesures correctrices sont nécessaires.
"Nos inquiétudes grandissent"
Dans un communiqué, le président américain Joe Biden a justifié cette décision par le fait que "les véhicules connectés en provenance de Chine peuvent collecter des données sensibles sur nos citoyens et nos infrastructures et les envoyer directement en Chine". "La Chine impose des restrictions aux voitures américaines et d’autres pays roulant en Chine. Pourquoi des véhicules connectés provenant de Chine devraient être autorisés à rouler dans notre pays sans garde-fou ?" s’est interrogé Joe Biden.
Dans ces conditions, il est important pour les Etats-Unis d’avoir "une idée précise des risques potentiels pour la sécurité nationale associés aux véhicules connectés", a insisté de son côté, lors d’une conférence de presse, la secrétaire au Commerce, Gina Raimondo. "Plus nous travaillons sur les véhicules électriques chinois plus nos inquiétudes grandissent." L’annonce de Joe Biden survient tout juste 24 heures après que le président américain a signé un décret visant à "empêcher le transfert à grande échelle des données personnelles des Américains vers des pays sensibles", au premier rang desquels la Chine.
"Une approche discriminatoire"
Pour Thibault Denamiel, du Centre des études internationales et stratégiques (CSIS), cette annonce "est un nouveau constat par l’administration Biden que les technologies critiques émergentes concernent tant l’économie que la sécurité nationale".
La fédération de l’industrie américaine, par la voix de son président Scott Paul, s’est félicitée de l’ouverture permise par cette annonce, espérant qu’elle "conduira rapidement à des actions concrètes". Interrogé par l’AFP, le porte-parole de l’ambassade de Chine à Washington, Liu Pengyu a en revanche jugé que cette enquête "est clairement une approche discriminatoire". "La Chine s’oppose fermement à la généralisation faite par les Etats-Unis du concept de sécurité nationale et l’instrumentalisation des questions économiques et commerciales", a-t-il ajouté.
Un "niveau incroyable d’informations" transmises à l’étranger
L’objectif de l’enquête publique lancée par le département du Commerce est de mieux évaluer, au-delà des véhicules connectés provenant de constructeurs chinois ou fabriqués en Chine, l’importance des logiciels et composants en provenance de ce pays dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement des véhicules connectés. Et elle ne visera pas uniquement les véhicules chinois mais bien ceux d’autres marques également qui pourraient intégrer ces composants ou logiciels.
"Nous ne connaissons pas bien les risques et leur importance. Nous avons donc besoin d’informations pour déterminer quelles actions mettre en place", a déclaré Gina Raimondo. "Cela concerne un niveau incroyable d’informations que vous pensez être privées mais qui peuvent être transmises à l’étranger. Les données de votre téléphone qui se synchronisent à votre voiture, vos messages, vos mails, votre localisation, vos finances, votre santé, tout est vulnérable", a rappelé la secrétaire au Commerce. "Mais ce n’est pas la seule inquiétude", a ajouté Gina Raimondo, "imaginez des milliers ou des centaines de milliers de voitures connectées chinoises sur les routes américaines qui pourraient être désactivées en un instant et simultanément par quelqu’un à Pékin".
Selon un responsable américain interrogé par l’AFP, il convient d’agir vite car "le marché automobile chinois progresse rapidement à l’export et s’implante fortement dans d’autres pays, y compris en Europe", où la croissance est "vraiment exponentielle". Joe Biden voit l’enquête ouverte comme un moyen de contrer le développement de constructeurs automobiles chinois "en utilisant notamment des pratiques déloyales". "La Chine pourrait submerger notre marché avec ses véhicules, ce qui représentera un risque pour notre sécurité nationale. Je ne laisserai pas cela se produire", a martelé le président américain.