Affaire Péchier : l'ex-anesthésiste renvoyé aux assises pour 30 empoisonnements
Le parquet a requis jeudi 23 mai le renvoi devant les assises du Doubs de l'ancien anesthésiste Frédéric Péchier, pour les empoisonnements de 30 patients, dont 12 mortels, dans des cliniques de Besançon, sur la base d'un important faisceau de preuves, malgré les dénégations du praticien.
"Les faits pour lesquels il est mis en examen n'ont rien à voir avec des faits d'euthanasie. Ce qui lui est reproché, c'est d'avoir empoisonné des patients en bonne santé, pour nuire à des collègues avec lesquels il était en conflit", a expliqué le procureur de la République de Besançon, Etienne Manteaux, lors d'une conférence de presse. Pour le magistrat, estimant qu'il s'agissait d'une "procédure réellement sans équivalent dans les annales judiciaires françaises".
L'ancien anesthésiste, 52 ans, est soupçonné d'avoir pollué, entre 2008 et 2017, les poches de perfusion de patients dans deux cliniques privées de Besançon pour provoquer des arrêts cardiaques puis démontrer ses talents de réanimateur, mais aussi pour discréditer des collègues avec lesquels il était en conflit. Le procureur a insisté sur "l'aspect atypique et hors du commun des charges qui pèsent sur le mis en examen".
Empoisonneur "charismatique""Sept ans et quatre mois (depuis le début de l'affaire), cela peut paraître bien évidemment particulièrement long, mais cette durée s'explique par l'extraordinaire, je pèse mes mots, l'extraordinaire complexité des faits portés à la connaissance du parquet", a ajouté Etienne Manteaux, rappelant avoir été saisi à l'origine pour 77 événements indésirables graves (EIG).
"Frédéric Péchier était le primo-intervenant quand survenait un arrêt cardiaque", a poursuivi le magistrat. Selon ses collègues, "il avait toujours la solution", "se prenait pour le meilleur", la star des anesthésistes de Besançon. "Il s'était créé un vrai personnage charismatique de sauveur". "Dans les empoisonnements où les patients sont décédés, il était en conflit plus marqué avec les collègues auxquels ça arrivait", a également noté le procureur.
M. Manteaux a par ailleurs rappelé que l'anesthésiste "avait en 2014 ingéré des produits morphiniques" et qu'il avait déclaré à un psychologue qu'il consultait alors "qu'il s'ennuyait dans son travail, qu'il s'ennuyait plus généralement dans sa vie". Après avoir gardé le silence durant plusieurs interrogatoires, Frédéric Péchier avait incriminé lors d'une de ses auditions ses anciens collègues, assurant que la majorité des EIG résultaient "d'erreurs médicales" de leur part.
Avec AFP