25 hectares, 89 millions d’euros de chiffre d'affaires... Que se cache-t-il derrière cette entreprise du Puy-de-Dôme ?

Agents de sécurité privés, sens de circulation, traiteur, photos souvenirs, cadeaux… Samedi, l’entreprise Celta, à Courpière, a sorti le grand jeu pour ses portes ouvertes. L’objectif : montrer l’environnement de travail aux proches des salariés, et par là même, les valoriser. "Les dernières portes ouvertes dataient de 2007. Les familles n’avaient pas vu l’évolution de l’entreprise, dont le chiffre d’affaires a depuis augmenté de 30 %", indique Michaël Jardin, le directeur général de Celta depuis 2022. 800 personnes étaient attendues samedi, soit 35 groupes qui se sont suivis pour la visite. Des chiffres impressionnants, qui ne sont qu’un préambule à tous ceux qui caractérisent cette société. Ni plus ni moins qu’un géant local de fabrication de carton.

Celta emploie 305 personnes en CDI et une trentaine d’intérimaires, à Courpière. Le site de 25 hectares accueille 50.000 m2 de bâtiments. Le chiffre d’affaires s’élevait à 89 millions d’euros en 2023. Michaël Jardin s’amuse à donner le tournis en jonglant avec les chiffres.

Nous produisons plus de 300 kilomètres de cartons par jour et 140 millions de mètres carrés de cartons par an, soit deux fois la superficie de la région Auvergne-Rhône-Alpes?!Michaël Jardin

La chaîne de fabrication débute quelques kilomètres plus loin, à Giroux-Gare, sur la commune d’Olliergues. La papeterie bien connue des automobilistes de la D906, qui crache ses volutes de vapeur au creux de la vallée de la Dore, fabrique du papier, à partir de matière première recyclée.Photo d'archives Thierry Lindauer La papeterie de Giroux est une filiale de Celta. C’est d’ailleurs ici que l’histoire de l’entreprise a commencé, en 1914.

Histoire 1914. Installation de la Papeterie d’Auvergne à Giroux. 1950. Acquisition d’une onduleuse. 1968. La société devient Cartonnerie d’Auvergne.  1976. Création du site de Courpière.  1988. Passage sous contrôle Rossmann, un groupe alsacien qui emploie 3.000 salariés sur près de 25 sites. 1991. Cartonnerie d’Auvergne devient Celta.

Aujourd’hui, une cinquantaine de salariés y travaillent, produisant 35.000 tonnes de papier. Cette production est dédiée à Celta mais ne couvre ses besoins qu’à hauteur de 35 %. La cartonnerie doit s’approvisionner en papier ailleurs : "à 80 % en Europe, notamment en Allemagne, mais aussi au Brésil, en Afrique du Sud. Le papier, c’est un marché mondial", détaille le directeur. Et c’est donc à Courpière que Celta transforme tout ce papier en carton.Dix-huit bulles comme celles-ci stockent le papier.

Comment?? Grâce à une machine nommée "onduleuse". Abritée sous un gigantesque bâtiment, elle s’étale à perte de vue. "L’onduleuse mesure 190 mètres, c’est la plus longue d’Europe", assure Michaël Jardin en élevant la voix pour couvrir les bruits mécaniques. Montant et descendant les étages, se faufilant entre les rouages, les bobines défilent à une cadence infernale.L'onduleuse. À travers les différents édifices, les machines et les salariés se succèdent. En fonction des demandes des clients, le carton est coupé, perforé, plié, coloré, imprimé, agrafé, etc.La partie colorisation.

Nous travaillons pour l’e-commerce, l’automobile, l’agroalimentaire, la cosmétique, la pharmacie, tous les domaines d’activité qui emballent

cite le directeur général. Cet énorme carton brut emportera par exemple dix capots de voitures à l’étranger, tandis que ces petits cartons colorés et brillants contiendront des bonbons. Renault, CSP Cournon, Peugeot, Jacquet ou encore Téfal font partie des gros clients de l’entreprise.

Après la fabrication, vient l’expédition. D’ici, 90 camions par jour sont chargés. En 2023, un hangar de stockage de 4.400 m2 a été construit, permettant d’entreposer trois jours de production.

La société courpiéroise investit chaque année. En 2025, c’est un projet à 10,8 millions d’euros qui va voir le jour, "parce qu’on a eu des bonnes années", glisse le patron. Une nouvelle machine de "découpe à plat" sera installée à l’été 2025, afin de "démarcher surtout l’e-commerce et l’agroalimentaire". Pour accueillir cet équipement, deux bâtiments, l’un de 2.500 m2 et l’autre de 500 m2, seront construits fin 2024. Douze embauches sont envisagées dans la foulée.

Parallèlement aux équipes de production, d’autres collaborateurs interviennent : la maintenance, pour prévenir ou réparer les pannes, le bureau d’études, les services financier et commercial, les ressources humaines, l’informatique… Avec des enjeux de taille : le risque de cyberattaque, l’arrivée de l’intelligence artificielle, l’évolution de l’informatique industrielle… Ou plus simplement, la prévention des incendies. "C’est le risque majeur. Nous avons un départ de feu par semaine", note le dirigeant.

Cet outil économique est aussi monumental que discret. Seul un atelier est visible de la route départementale, le reste des installations est bien en retrait. Même un élu de Courpière en était surpris : "On ne se rend pas compte, c’est une ville dans la ville."Des exemples de produits finis produits par Celta à Courpière.

Bientôt le retour?du fret ? Les échanges entre la papeterie de Giroux et Celta à Courpière se faisaient par la voie ferrée. Mais ils se sont arrêtés fin 2021 par décision préfectorale à cause de l’état vétuste de la voie. "À l’arrêt du fret, on a généré 3.000 camions par an, soit cinq par jour, contre un train quotidien auparavant, souligne Michaël Jardin. Le train arrivait dans l’usine, on avait la journée pour le décharger. Maintenant, le camion arrive toutes les heures et il faut le vider tout de suite." Pour remettre en route le fret, "des travaux sur la voie ont été faits à la fin de l’année dernière, on est prêts à démarrer", annonce Arnaud Provenchère, vice-président du Syndicat mixte ferroviaire du Livradois-Forez. Celui-ci a investi 100.000 € dans ces travaux et l’État 400.000 €. Reste à trouver un accord financier pour redémarrer le fret.

Alice Chevrier