JO-2024/Judo: Huh Mi-mi, née au Japon, en quête d'or pour la Corée de sa grand-mère
Possédant la double nationalité, coréenne de son père, japonaise de sa mère, Huh a renoncé à la seconde en décembre dernier, juste après avoir atteint l'âge de 21 ans. Deux ans plus tôt, cette Tokyoïte de naissance avait décidé de s'installer en Corée du Sud pour s'y entraîner.
A l'époque, elle parlait à peine la langue du Pays du matin frais. Celle de son "halmeoni" -sa grand-mère, en coréen- aujourd'hui décédée, dont elle vante la "bienveillance".
Figure de la communauté coréenne au Japon, celle-ci confia à sa petite-fille son souhait de la voir défendre les couleurs du pays de ses ancêtres, si elle participait un jour aux Jeux olympiques.
"Je concoure pour la Corée du Sud à cause de ce que ma grand-mère m'a dit, cela me fait toujours penser à elle", explique Huh, rencontrée par l'AFP.
La jeune femme connaissait peu de choses de l'histoire du pays de ses grands-parents quand elle y a emménagé. Aussi, quelle ne fut pas sa surprise de découvrir qu'elle était une descendante de Heo Seok, un militant indépendantiste mort en luttant contre l'occupation japonaise de la péninsule coréenne au début du siècle dernier.
"Capacités exceptionnelles"
"Cela m'a donné envie de travailler encore plus dur", assure celle qui partage désormais son temps entre l'université Waseda de Tokyo, où elle étudie les sciences du sport, et le Centre national d'entraînement de Jincheon, au sud de Séoul.
Pendant la période coloniale (1910-1945), des millions de Coréens se sont installés au Japon, volontairement ou contre leur gré. A son terme, des centaines de milliers y sont restés, et nombre d'entre eux et de leurs descendants ont souffert de discrimination, entre autres difficultés.
Huh est une star montante en Corée du Sud, où le judo est populaire malgré une longue disette de titre olympique, le dernier datant de 1996 à Atlanta.
Elle ravive l'espoir de renouer avec l'or sur les tatami depuis qu'elle a réussi l'exploit de détrôner la N.1 mondiale Canadienne Christa Deguchi, aux Mondiaux d'Abou Dhabi, en mai.
"Avant cette finale, j'avais perdu une fois (contre elle), donc je ne me sentais pas très sûre de moi", rembobine-t-elle, ajoutant que cette victoire "fait que j'ai vraiment gagné en confiance, je sens que je peux faire quelque chose de bien si je (l')affronte à nouveau".
Selon Kim Mi-jung, médaillé d'or aux JO-1992, devenu l'entraîneur de l'équipe féminine, les principaux atouts de Huh résident dans son équilibre et son contrôle.
"Elle n'est pas techniquement la plus forte. Mais ce sport implique beaucoup d'empoignades et, à ce jeu-là, ses capacités sont exceptionnelles. Il est très rare qu'elle soit projetée et perde."
Obstacles culturels
Un autre judoka inspire la jeune femme: An Chang-rim, lui aussi né et élevé au Japon, qui a décidé de concourir pour la Corée du Sud, remportant le bronze à Tokyo en 2021.
Ce dernier a depuis témoigné de la discrimination dont il a souffert en tant que binational, aussi bien pendant son enfance au Japon que pendant ses entraînements en Corée du Sud, où il a déménagé vers l'âge de 20 ans.
A présent entraîneur, An a salué la force mentale de Huh Mi-mi, connue pour sa personnalité pétillante et son attitude positive et qui est parvenue à surmonter les obstacles culturels au-delà de la langue.
"Elle fait ce qu'elle a à faire, peu importe qui la regarde. Elle se concentre sur ses propres tâches sans se soucier des autres."
S'il souligne les exploits de celle dont le parcours reflète en quelque sorte le sien, An espère "qu'elle n'aura pas trop de pression liée aux attentes de la communauté coréenne au Japon".
L'intéressée ne voit que bonheur dans son aventure la menant à Paris. Aller aux JO "est mon rêve depuis que je suis toute petite, alors je suis simplement très heureuse", clame-t-elle.