"C’est un autre monde" : des boxeurs jouent les comédiens dans une pièce de théâtre à voir à Montluçon
Depuis l’automne 2023, le Théâtre des Ilets de Montluçon et l’Académie pugilistique de la Biache, à Désertines (Allier), travaillent à la création du spectacle "No Bless", avec dix boxeurs amateurs et un comédien professionnel.
Pour Michel Albanese, ça a été une révélation. L’homme de 58 ans participe depuis l’automne dernier à No Bless, une collaboration entre le Théâtre des Ilets de Montluçon et l’APB (Académie pugilistique de la Biache), à Désertines.
Le fruit de ce travail sera présenté samedi 22 et dimanche 23 juin, dans la grande salle du CDN (centre dramatique national) où les dix boxeurs amateurs du club ont commencé à répéter en situation, mardi 18 juin. Le décor : un ring, des bancs, une table et des chaises. La lumière fait le reste.
Horaires. Samedi 22 juin, à 18 heures, et dimanche 23 juin, à 16 heures, au Théâtre des Ilets?; samedi 29 juin, à 18 heures, à la salle Germinal de Désertines, et le lendemain, à 16 heures, au gymnase des Guineberts, à Montluçon. Durée : une heure?; à partir de 12 ans. Gratuit. Réservation sur le site Internet theatredesilets.fr ou par téléphone au 04.70.03.86.18.Michel Albanese
Une révélation pour Michel, un retour pour ThibaultMichel Albanese reprend sa partie, qui consiste en une gestuelle épousant le texte qu’il a enregistré. "Pour l’instant, je ne suis pas stressé", commente le Montluçonnais qui n’était "jamais entré dans une salle de théâtre avant" :
Ici, j’ai vu quatre pièces. C’est presque un regret de n’avoir connu ça que maintenant. C’est un autre monde.
Thibault Loussert, avec Pascal Antonini. Le quinquagénaire veut continuer à faire du théâtre, c’est une certitude. Thibault Loussert, 19 ans, en a fait durant une année, quand il avait 11 ans :
Quand on est petit, on est moins gêné, plus extraverti… J’ai arrêté le théâtre pour faire autre chose…
Guidé par les indications de Pascal Antonini, le metteur en scène, celui-ci joue son rôle sans retenue, sous les yeux du groupe. Il est 18 heures, et seuls Aurélie Lucenay, José Martins, Yacine Ben Chrif et Esteban Aït Raïs sont là à la répétition. Les autres, Lisa Chaussard, Diego De Sao Jao, Jawad Lamrissi et Ninon Vasseur sont attendus plus tard. Frédéric Merger, leur entraîneur, n’est pas sur scène, mais il est partie prenante dans le projet.Direction d'acteur
Deux milieux qui ont appris à se connaîtreSa genèse remonte à dix-huit mois environ. "Fred est venu à nous avant qu’il ne se déclenche de manière officielle", reprend Pascal Antonini :
Il y a eu des rencontres mensuelles depuis septembre. Il s’agissait d’apprendre à se connaître, noter les gestes, les codes du milieu. On a aussi assisté à un gala du club.
Il fallait d’abord que chaque milieu se familiarise avec l’autre. Puis chacun a raconté son parcours. Ce matériau fait entièrement parti du spectacle. Il se construit autour de "douze rounds nominatifs. Chacun a sa parole, raconte son bout de vie, sa manière de vivre la boxe en parallèle de sa vie personnelle", détaille Pascal Antonini.
Des moments “chorale” ponctuent la représentation. On pourra observer les boxeurs s’entraîner. "Au centre de tout ça, il y a "Un steak", la nouvelle de Jack London. C’est un boxeur en fin de carrière qui dispute son dernier combat pour manger."Nicolas Zaaboub-Charrier (deuxième à droite au premier rang) est le seul comédien professionnel. Ici avec José Martins, Thibault Loussert et Michel Albanese à l'avant, et Esteban Aït Raïs et Yacine Ben Chrif au second rang.
Des travaux de London, Hemingway, CravanPour lui donner corps, Pascal Antonini a fait appel au comédien Nicolas Zaaboub-Charrier, qu’on avait déjà vu aux Ilets dans "Les cendres de Marbella", entre autres. Le texte, écrit en partie par l’auteur Mohamed Rouabhi, s’inspire aussi des travaux d’Arhur Cravan, Jack London donc, et Ernest Hemingway.
Olympiade culturelle. Le projet s’inscrit dans le cadre de l’Olympiade culturelle, en lien avec les Jeux de Paris. Le programme artistique se déploie dans toute la France, avant, pendant et après la compétition. Le spectacle a ainsi bénéficié du soutien de la Drac (Direction régionale des affaires culturelles) et de la Drajes Aura (Délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports).
A gauche, Aurélie Lucenay est une boxeuse amateure de l'APB de Désertines. Elle fait également partie du projet.
L’écrivain américain vivait autant pour la boxe que pour la littérature. La discpline distille son œuvre. C’est un thème inépuisable dans l’art en général, qui a fait de grands livres, de grands films, et même des spectacles de danse. Boxe Boxe, de la compagnie Mourad Merzouki, est une référence dans le genre. Pourquoi le sport fascine autant?? Thibaut Loussert répond :
Il y a les combats, et tout ce qu’il y a à côté et qu’on ne voit pas. La préparation physique et mentale. Ça attire des profils atypiques.
"On n’a pas eu bac + 5 quoi?!", sourit Michel Albanese. "Mais ça ne veut pas dire qu’on est bêtes." C’est, il faut bien l’avouer, une image qui colle à la peau des boxeurs. Ils seraient juste assez bons pour se taper dessus. C’est un peu plus compliqué que cela. « Le respect, la maîtrise de soi, la solidarité, le dépassement de soi et le courage » sont quelques-unes des valeurs défendues par la Fédération française de boxe.
Seher Turkmen