Des sorcières aux suffragettes, de Louise Michel aux Black blocs, quelle est donc cette nouvelle exposition ?
Des dizaines, peut-être des centaines de références sont cachées dans l’exposition Croix de bois, croix de fer de Cynthia Montier.
Au premier étage de l’usine du May, les objets sont soigneusement mis en scène, des écritures patiemment marquées sur les murs, rien n’est laissé au hasard. Même les couleurs et les odeurs ont été réfléchies. Derrière l’art, c’est l’Histoire et l’anthropologie qui sont au rendez-vous.
Cynthia Montier, artiste strasbourgeoise, signe à Thiers sa première exposition monographique, c’est-à-dire que le centre d’art du Creux de l’Enfer est le premier à consacrer une exposition entière à cette artiste. Celle-ci a distillé, dans trois salles thématiques, de multiples installations artistiques, fruits d’un travail de résidence de recherche dans l’espace de diffusion des arts plastiques Les limbes-Céphalopode, à Saint-Étienne. Un travail qui s’est poursuivi à Thiers. "Beaucoup de choses sont nées là-bas et ont vu le jour ici", explique-t-elle. "C’est là aussi que le centre d’art, en tant que lieu de production, prend tout son sens", ajoute la directrice, Sophie Auger Grappin.
Rassemblements humainsAu cœur du travail de Cynthia Montier : les symboliques et les pratiques issues des rassemblements humains, qu’ils soient militants, festifs ou rituels. Des chasses aux sorcières du Moyen Âge aux soulèvements sociaux d’aujourd’hui, en passant par les révoltes paysannes et les luttes ouvrières, elle met en lumière ces chapitres de l’Histoire à travers les pratiques qui leur sont liées. "Chacun des objets fait écho à un geste qui a déjà pu être effectué dans l’histoire des luttes et qui pourrait être réutilisé", souligne-t-elle, avant de donner un exemple.
Un tas de pierres en référence aux suffragettesAu sol de la grande pièce, se trouve un tas de pierres sur lesquelles des images sont collées. Parmi elles : une photo des mères de la place de Mai en Argentine, d’autres de manifestations féministes ou de soutien à la Palestine. "Ces pierres à messages viennent du mouvement des suffragettes, pour le droit de vote des femmes en Angleterre, commence-t-elle. Elles collaient avec soin des messages sur les pierres, dans un geste très féminin. Et ces pierres étaient destinées à être jetées contre les fenêtres, les vitrines."
La symbolique des sabotsChaque installation est ainsi truffée de références culturelles. Comme ces drapeaux noirs, qui rappellent autant ceux de Louise Michel durant la Commune de Paris que les Black Blocs. Ou ces sabots qui servent de pots à des orchidées, mais recueillent bien plus de symboles. Car ces plantes, de la variété "Sabots de Vénus", ne sont pas sans rappeler un épisode mythologique. Et les sabots renvoient aux ouvriers du XIXe qui lançaient leurs chaussures sur les machines, les "sabotant" pour ne pas perdre leur emploi. Ils rappellent aussi les "sabbats", ces réunions nocturnes de sorcières…
Autant de détails qui seront expliqués lors des visites commentées des expositions, les 6 juillet, 3 août et 7 septembre.
Cette exposition est à voir à l’usine du May, avenue Joseph-Claussat à Thiers, jusqu’au 22 septembre, du mercredi au dimanche, de 14 à 18 heures. Entrée libre et gratuite. Visites commentées les premiers samedis du mois à 15 heures, 2 €, gratuites pour les -18 ans et les adhérents.
Alice Chevrier