Ecolos et communistes tentés de s’allier pour contrer Mélenchon et les socialistes
La question a progressivement pris de l’importance depuis lundi. Outre l’enjeu d’un éventuel Premier ministre de gauche, dans quelles configurations devront siéger les élus du Nouveau Front populaire au sein de l’hémicycle ? Les 577 députés qui composent l’Assemblée nationale ont jusqu’à jeudi prochain, 18 juillet, pour annoncer leur rattachement à un groupe parlementaire. Alors que les tractations se poursuivent et que le Parti socialiste cherche à éloigner les mauvais souvenirs de la précédente mandature, espérant balayer l’hégémonie insoumise, voici que le reste de la gauche tente à son tour de jouer sa partition.
"On ne veut pas enfermer la gauche dans un débat Hollande-Mélenchon"
Mardi après-midi, les dissidents insoumis réélus - et auto-renommés "les insurgés" - ont allumé la mèche. "Comme vous le savez, la rupture entre nous et La France insoumise est consommée. Nous ne siègerons pas dans le groupe insoumis", écrivent dans un message commun Alexis Corbière, Clémentine Autain, Danielle Simonnet, Hendrik Davi et François Ruffin. "Profondément attachés à la dynamique unitaire et au NFP riche de sa diversité, nous aspirons à siéger dans un groupe nouveau, associant des écologistes, des communistes, des membres de Génération. s et nous." La missive est adressée directement au chef de file des communistes André Chassaigne, et à la patronne des parlementaires écolos Cyrielle Châtelain. "Nous souhaitions la création d’un grand groupe du Nouveau Front populaire : l’idée n’a pas été reprise. On a donc mis cette proposition sur la table", explique Hendrik Davi, l’Insoumis sortant, non-réinvesti par La France insoumise, réélu dans les Bouches-du-Rhône. Les cinq élus, anciens proches de Jean-Luc Mélenchon, devraient rencontrer les deux présidents de groupe dans les prochains jours. "Ça se décantera d’ici à jeudi soir", espère l’un des partisans de cette union.
Acter le dépassement au sein du pôle écologiste parlementaire ? Chez les troupes de Marine Tondelier et de Génération. s, l’idée remonte à l’entre-deux-tours. Certains ont vu dans l’élection des Insoumis dissidents l’opportunité de fleurir leur groupe de nouvelles étiquettes, bien qu’hétéroclites. Lundi, lors de leur première réunion de groupe, les écolos ont à nouveau sérieusement discuté de cette option. Parmi eux, les élus du micro-parti de Benoît Hamon se montrent unanimement favorables à l’ouverture. "Je pense qu’il faut une force entre LFI et le PS, résolument écologiste de gauche, unitaire et démocratique dans son fonctionnement, affirme Benjamin Lucas, député des Yvelines. "Beaucoup de gens ne veulent pas limiter le débat à gauche à une dualité Hollande-Mélenchon. Ce groupe peut être un trait d’union", veut-il croire. Trait d’union, ou inhibiteur d’hégémonie, alors que le PS et les Insoumis luttent pour être les plus nombreux à gauche ? "Nous avons une carte à jouer pour renforcer ce que nous sommes", assume le parlementaire. Obtenir, en somme, une grosse quarantaine de députés.
"Ça n’était pas vraiment ce qui était prévu"
"La vraie raison, c’est que Cyrielle Chatelain avait peur que Génération. s parte avec Ruffin et les autres Insoumis en créant un autre groupe de leur côté. Si elle est favorable à cette idée, c’est avant tout pour les retenir", argue une mauvaise langue. "Il n’y a jamais eu aucune difficulté à travailler avec les écologistes", rétorque-t-on dans la petite formation.
Au Parti communiste français, qui possède un groupe depuis le milieu du XXe siècle, l’idée de fondre leurs troupes dans un ensemble unitaire suscite surtout la circonspection. "Ça n’était pas vraiment ce qui était prévu", déplore un stratège de la maison rouge. D’autant que la question de leur survie en tant que structure parlementaire semble posée, alors que certains ultramarins - habitués du groupe Gauche démocrate et républicaine - menacent de s’éparpiller dans diverses moutures à bâbord. André Chassaigne, le patron des députés communistes qui ne s’est pas encore exprimé, tentera de remettre les choses à plat lors de la réunion de groupe, mercredi 10 juillet. S’il s’agit toutefois d’une union de circonstances, une même bannière réunissant écologistes et communistes peut étonner, tant les deux partis présentent des divergences de fond, mis en lumière lors des dernières élections européennes. "En 1997, le groupe écologiste comprenait des radicaux de gauche et des chevenementistes, relativise Benjamin Lucas. On est capables de faire le Nouveau Front populaire, on doit être capables de faire cohabiter des gens avec des positions différentes."