Kamala Harris vs Donald Trump : la guerre des donateurs bat son plein
Le renoncement de Joe Biden, le 21 juillet, a donné un coup de boost à la campagne des démocrates. Vendredi dernier, le 2 août, l’équipe de la nouvelle candidate du parti, Kamala Harris, a annoncé avoir récolté pas moins de 310 millions de dollars en juillet, dont 200 millions la semaine qui a suivi le désistement du président américain âgé de 81 ans, provenant de nouveaux donateurs.
Dans le même temps, l’ancien président républicain et candidat Donald Trump, survivant d’une tentative d’assassinat le 13 juillet dernier lors d’un meeting, n’a récolté que 138,7 millions de dollars ce mois-ci. Une collecte de fonds en hausse de 24 % par rapport aux 111,8 millions de dollars récoltés en juin, mais deux fois moins importante que son adversaire démocrate. La presse américaine ne s’est pas privée de commenter cet écart, alors que le financement joue un rôle essentiel dans les campagnes électorales américaines, d’autant plus la présidentielle. La candidate démocrate Kamala Harris a "écrasé l’ancien président Trump dans la course aux dons en juillet", écrit The Los Angeles Times. Même analyse du côté de la chaîne MSNBC, qui évoque le "rouleau compresseur Kamala Harris".
Le rôle essentiel des financements
L’équipe de Kamala Harris, actuelle vice-présidente de Joe Biden, espère une autre secousse dans les levées de fonds cette semaine, alors qu’elle vient d’annoncer le nom de son colistier ce mardi 6 août, Tim Walz gouverneur du Minnesota, et lors de la convention démocrate, qui s’ouvre à Chicago le 19 août. Les candidats ne s’interdisent rien pour récolter des fonds. L’équipe de campagne de Kamala Harris a ainsi profité de cette annonce très attendue pour lever des fonds, promettant à ses partisans qu’ils pourraient être parmi les premiers à connaître l’identité du colistier s’ils faisaient un don d’au moins 20 dollars. Ces donateurs pourraient "rejoindre une diffusion en direct exclusive avec la vice-présidente et son colistier", selon des courriels récents adressés à ses partisans, rapporte le Washington Post. Tandis que Donald Trump, qui en 2015, lors de sa première campagne électorale qui a précédé son élection, en novembre 2016, se targuait d’"utiliser [son] propre argent", et "ne pas utiliser les lobbyistes, ni les donateurs", a changé de méthode. Alors qu’il a récemment été condamné au pénal dans une affaire de corruption, l’équipe de campagne de l’ancien président n’a pas hésité à mobiliser ses électeurs, envoyant des courriels et des SMS pour réclamer des dons.
Des nouvelles technologies coûteuses
"Le financement des campagnes électorales est important", explique Michael Kang, professeur de droit à l’université Northwestern, spécialisé dans le financement des campagnes électorales, auprès de NPR (la radio nationale publique américaine). C’est la façon dont les candidats financent leur communication et leurs messages aux électeurs." Les fonds récoltés sont en partie utilisés pour les publicités télévisées, les embauches du personnel dans les Etats clés, ou encore pour faciliter les déplacements et sécuriser des données cruciales pour atteindre les électeurs cibles. Selon le magazine Forbes, l’équipe de campagne de l’ancien président Donald Trump a dépensé 12 millions de dollars en publicités dans les Etats clés la première semaine d’août. "Il existe de nouvelles méthodes technologiques, en particulier autour d’Internet et des plateformes numériques, sur lesquelles les campagnes veulent pouvoir dépenser beaucoup d’argent pour atteindre les électeurs et cibler les personnes avec leurs messages", observe Shanna Ports, conseillère juridique pour le financement des campagnes au Campaign Legal Center, auprès de la radio nationale publique.
Au fil des élections, les sommes dépensées sont plus astronomiques que les précédentes. Selon l’ONG OpenSecrets, spécialisée dans le financement politique, lors des élections de 2020, les dépenses politiques ont dépassé les 14 milliards de dollars, soit le double de ce qui avait été dépensé lors de l’élection présidentielle de 2016. Pour les élections prévues en novembre 2024, l’ONG estime qu’elle pourrait être la plus coûteuse de l’histoire américaine, dépassant le montant engagé en 2020. Par comparaison, la loi limite à 22,5 millions d’euros les dépenses de campagne de chaque candidat présent au second tour de la présidentielle en France.
Des collectes de fonds (très) ciblées
Ces dernières semaines, la campagne de dons de la candidate Kamala Harris a été renforcée par des collectes de fonds virtuelles organisées autour de partisans de divers horizons. Tout a commencé par un groupe de femmes noires ("Black women for Kamala") lors d’une réunion sur la plateforme en ligne Zoom qui a atteint un objectif de collecte de fonds d’un million de dollars en trois heures environ. Puis, une série de réunions en ligne similaires a suivi, ciblant d’autres groupes de population, tels que les "latinas pour Harris" ("Latinas for Harris") ou encore "les hommes blancs" ("White dudes for Harris"). Au total, ces groupes ont récolté plus de 20 millions de dollars, selon les données délivrées par son équipe de campagne.
De son côté, Donald Trump devrait participer à "un dîner de collecte de fonds à forte valeur ajoutée ce week-end dans le Colorado", indique la chaîne de télévision locale KDVR Fox 31. Les participants peuvent donner ou collecter des fonds pour assister à l’événement : 500 000 dollars par couple pour rejoindre le comité d’accueil, 100 000 dollars par couple pour co-organiser l’événement et 25 000 dollars par couple pour y assister. Plus ciblé encore, le candidat républicain a participé à un événement similaire au mois de juillet dans le Tennessee, en marge de Bitcoin 2024, une conférence annuelle considérée comme le plus grand rassemblement de fans de crypto-monnaie du pays. Il a pourtant été un grand pourfendeur de la cryptomonnaie, la qualifiant de "d’escroquerie", avant d’aller courtiser ses utilisateurs, assurant qu’il serait "le président pro-innovation et pro-bitcoin dont l’Amérique a besoin".
En outre, les deux candidats sont également largement soutenus par des milliardaires de renom. Selon Forbes, le plus gros donateur de Donald Trump est l’héritier milliardaire Timothy Mellon, avec 75 millions de dollars de dons. Le fondateur de Tesla Elon Musk, ou encore Linda McMahon, épouse du magnat du catch Vince McMahon ainsi que le roi du pétrole Timothy Dunn et les donateurs conservateurs bien connus comme Richard et Elizabeth Uihlein. Joe Biden, puis Kamala Harris, ont pour leur part attiré des milliardaires comme Michael Bloomberg, le fondateur de LinkedIn Reid Hoffman, le cofondateur de Netflix Reed Hastings, l’ancienne directrice des opérations de Meta (Facebook) Sheryl Sandberg ainsi que la philanthrope Melinda Gates.