Meurtre et suicide dans un village de Haute-Loire : l’un était "gentil et serviable", l’autre solitaire
«On est abasourdis ». En mairie comme dans le bourg de Saint-Geneys-près-Saint-Paulien, personne ne s’explique le drame survenu. Mercredi, peu après 14 heures, deux habitants du hameau de Champvert ont perdu la vie au cours de ce qui semble être « un coup de folie ». Les deux voisins entretenaient de bonnes relations et il n’y avait aucune raison pour que l’homme originaire de Nîmes (Gard) et installé dans la commune depuis un peu plus de 15 ans, saisisse une arme de poing et sorte devant sa maison pour tuer Jean-Claude Fillère, 72 ans, d’une balle dans la tête. Un important dispositif avait été mis en place mercredi en fin d’après-midi dans le hameau. Photo Lionel Ciochetto Ce dernier était en train de préparer du bois pour l’hiver. Il avait déposé des troncs d’arbre sur une petite plateforme en herbe située entre les propriétés des deux hommes dans la matinée et tronçonnait depuis le début d’après-midi. Le premier coup de feu a retenti à 14?h?20. Un second tir a été entendu dans les minutes qui ont suivi. L’auteur présumé de l’homicide a eu le temps de rentrer chez lui avant de retourner l’arme contre lui, assis dans son fauteuil.
Au lendemain des faits, ni la famille de la victime, ni les habitants du village, ni les élus de la commune qui compte 320 administrés ne pouvaient expliquer un tel drame. Les habitants de Champvert ont été auditionnés hier.?Photo d’archives Lionel Ciochetto Jean-Claude Fillère, âgé de 72 ans, était conseiller municipal depuis les dernières élections. « Il s’est porté candidat pour représenter son village au sein de la commune », explique le maire Jean-François Gisclon. L’élu évoque un homme « gentil et très serviable, quelqu’un qui avait de la carrure et qui était très docile. Il était présent à tous les conseils municipaux. » Originaire de Saint-Privat-d’Allier, il a été président de l’association de chasse du Vernet pendant une trentaine d’années. Il s’était installé à Champvert avec sa femme, originaire de ce hameau composé de 12 maisons. Le couple « très sociable » fréquentait régulièrement le club du 3e âge de Saint-Geneys-près-Saint-Paulien.Le maire Jean-François Gisclon dresse le portrait de Jean-Claude Fillère, conseiller municipal « gentil et serviable ».?Photo C. D.
« Son seul contact c’était Jean-Claude »Jean-Claude Fillère était un homme « qui rendait service », en particulier à son voisin, Yvon Gisbert, âgé de 78 ans, auteur des coups de feu. Ils entretenaient de bonnes relations. « Ils mangeaient ensemble il y a quelques jours encore », témoigne un habitant du hameau. Le profil de l’homme originaire du département du Gard est décrit par beaucoup « comme assez solitaire et discret ».
« En 15 ans, j’ai dû le voir trois fois seulement. Il avait une voiture mais ne conduisait pas. Il sortait très peu de chez lui et passait inaperçu. Son seul contact, c’était Jean-Claude. »
La femme de l’auteur des coups de feu se trouvait dans la maison au moment des faits. D’après des témoignages concordants, elle ne passait que quelques séjours par an dans la bâtisse de pierre de Champvert. Terriblement choquée après la découverte du drame, elle a été prise en charge par les pompiers puis conduite à l’hôpital psychiatrique de Sainte-Marie, au Puy avant de ressortir jeudi matin pour être entendue par les enquêteurs. Mercredi, une douzaine de gendarmes sont intervenus sur la scène de crime. Ils ont bouclé la route communale qui se prolonge en chemin de terre juste après la maison de la victime pour procéder à différents relevés. Des techniciens en identification criminelle sont venus appuyer les militaires de la gendarmerie de Saint-Paulien en charge de l’enquête. Une perquisition a aussi été conduite au domicile du tireur. Le dispositif est resté en place jusqu’à minuit et demi. Les épouses des deux hommes décédés ont été auditionnées jeudi matin, de même que plusieurs habitants du hameau.Douze gendarmes ont procédé à une perquisition.?Photo L. C. Les autopsies des corps ont eu lieu hier ; les résultats des analyses toxicologiques ne devraient être connus que la semaine prochaine. Beaucoup de questions restent en suspens, notamment le motif du meurtre. Personne n’a été témoin du coup de feu tiré sur la voie publique. Il est impossible de dire s’il y a eu une querelle entre les deux hommes, ou si le bruit généré par l’utilisation de la tronçonneuse a agacé le voisin au point de commettre ce geste fatal. L’origine du revolver utilisé pose également question. Les deux voisins « n’avaient aucun antécédent judiciaire », indique la procureure de la République du Puy-en-Velay, Cathy Pajon, qui tiendra une conférence de presse ce matin. Malgré ce terrible fait divers, le comité des fêtes a décidé de maintenir la fête votive prévue ce week-end. « On s’est posé la question et on est arrivé à la conclusion que ce sera bien d’avoir un moment pour réunir la population de la commune après un tel drame », explique le maire de Saint-Geneys-près-Saint-Paulien.
Céline Demars