Il y a 500 ans, la mort du chevalier Bayard
La vie de Pierre Terrail de Bayard (1475-1524), narrée par l’un de ses compagnons d’armes, Jacques de Mailles, dans La très joyeuse, plaisante et récréative histoire du gentil seigneur de Bayart, est à redécouvrir…
Son nom figure au panthéon des plus grands de notre histoire et claque à nos oreilles autant qu’il émeut notre sensibilité : Pierre Terrail, fils d’Aymon seigneur de Bayard et lui-même connu sous le nom du chevalier Bayard, est mort il y a exactement 500 ans.
Ses exploits chroniqués par un « Loyal Serviteur »
Rares sont les militaires dont la postérité aura permis de les maintenir dans la connaissance publique et populaire aussi longtemps ; rares aussi sont les héros qui peuvent, par la simple évocation de leur nom, convoquer aussi efficacement le souvenir d’autant de vertus. Il était connu de son vivant pour être, par excellence, l’homme de toutes les qualités : pieux dans sa foi, fidèle dans son allégeance, brave dans son métier, le chevalier Bayard sans peur et sans reproche appartient à la véritable élite dont un pays peut s’enorgueillir : celle qui se tient droit dans ses devoirs, ne s’en écarte jamais y compris s’il faut le payer de sa vie. La France, notamment son armée, a longtemps entretenu le souvenir du grand militaire et si tant de générations de soldats et d’officiers ont pu si souvent empêcher que la France ne cède sous la pression des forces hostiles qui s’exerçaient à ses frontières, c’est en grande partie parce que l’ombre de Bayard planait par-dessus nos guerriers et faisait retomber sur eux un peu de l’exemple du grand homme.
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Notre immense chance est qu’il y avait dans l’entourage personnel du chevalier Bayard un homme lettré qui, l’ayant accompagné sur les champs de bataille et dans sa vie quotidienne, a pu en écrire la chronique. Cette chronique, écrite par un contemporain qui le suivait au plus près, constitue la source primaire par excellence sur la vie et les actes de Pierre Terrail. Quelques fois réédité jusqu’au siècle dernier, ce livre fondamental revient aujourd’hui pour le cinquième centenaire de la mort du militaire. Son titre est à lui seul une promesse épique : La très joyeuse, plaisante et récréative histoire du gentil seigneur de Bayart, par Jacques de Mailles qui en son temps s’était signalé par le simple sobriquet de Loyal Serviteur.
Un texte incontournable
Le style du chroniqueur appartient évidemment autant au champ biographique qu’hagiographique comme cela était habituel en ce temps. Les historiens modernes ont depuis relevé quelques exagérations dans le texte du Loyal Serviteur mais celui-ci reste, notamment grâce à sa magnifique plume et au fait que l’auteur a personnellement connu et suivi le personnage dont il fait la chronique, le texte incontournable sur la vie de Bayard, celui dans lequel on se plonge autant pour se renseigner sur la vie du héros que pour s’injecter de l’énergie dans le sang. Les scènes de vie choisies pour tisser la chronique sont très souvent à la faveur du chevalier mais il est acquis aux yeux de l’historiographie que le Loyal Serviteur n’a pas « inventé » un personnage en ce que sens que son récit correspond à ce que nous savons effectivement du tempérament du chevalier, de sa bravoure au combat et d’un ensemble de vertus qui le singularisaient notablement dès son vivant.
La très joyeuse, plaisante et récréative histoire du gentil seigneur de Bayart ne rend pas seulement justice au seigneur en question : elle fait aussi honneur à l’exercice même de la chronique ainsi qu’à la langue littéraire, épique et aventureuse telle que les plus grands auteurs ont su la manier pour sublimer leur sujet. Chaque page transporte le lecteur dans un monde encore largement médiéval et il n’est pas rare qu’au détour d’un paragraphe, après nous être ému pour un haut fait, nous refermions le livre un peu chagrinés à l’idée que ces temps héroïques ne soient plus et qu’il nous faille maintenant composer avec toutes les lâchetés de notre malheureuse et bien décevante époque…
La réédition par La délégation des siècles de La très joyeuse, plaisante et récréative histoire du gentil seigneur de Bayart est presque la seule contribution du monde éditorial français au souvenir pourtant nécessaire d’un grand modèle que très exactement cinq siècles séparent de nous.
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