Dans la Creuse, ce pigeonnier a tapé dans l'œil de la Mission Bern
Est-ce sa rareté sur notre département qui a fait pencher la balance en sa faveur parmi les quatre projets creusois présentés cette année au jury de la Mission patrimoine portée par Stéphane Bern?? Peut-être. Mais effectivement, un pigeonnier-porche « est relativement rare dans la Creuse, reconnaît Philippe Cholley, délégué départemental de la Fondation du patrimoine. On en voit plutôt en Auvergne mais Arfeuille-Châtain est proche du Puy-de-Dôme... Ce qui est intéressant, c’est qu’il date du XVIIe siècle. C’était le portail du château et comme il n’a pas été restauré, hormis la porte qui a été remplacée, il a été plutôt préservé ». Préservé dans son caractère patrimonial mais pas des ravages du temps.
Dépendance du château qui, depuis 2008, est une résidence d’accueil pour personnes en situation de handicap et propriété de l’Apajh, le pigeonnier-porche est « suivi par les Bâtiments de France depuis une quinzaine d’années, souligne Philippe Cholley. Il n’est plus en voie d’écroulement puisqu’il a été étayé et toute la zone est protégée puisqu’il y a des résidents dans ce foyer. Mais il fallait absolument faire quelque chose et tout le monde était d’accord pour trouver une solution. » Problème : le coût des travaux que l’Apajh ne pouvait supporter.
"Dans le cadre du Loto du patrimoine, les propriétaires, qu’ils soient publics, privés, associatifs, peuvent bénéficier d’aides conséquentes, poursuit le délégué départemental de la Fondation. Je les ai informés et les ai même incités à déposer un dossier : ils n’avaient rien à perdre."
Rien à perdre et même tout à gagner. Que les bâtiments en question soient inscrits ou classés aux Monuments historiques ou pas, ils peuvent en effet prétendre à ce soutien financier. « Il faut qu’ils aient un intérêt patrimonial bien sûr mais ce peut être aussi des espaces naturels, poursuit le délégué départemental. La seule condition, c’est que le propriétaire soit d’accord. Et si on a l’historique du bâtiment, des photos, le coût estimé des travaux, c’est déjà un grand avantage dans le dépôt du dossier. »
Un volet social qui a « sans doute plu à la Mission Bern »Pas besoin de convaincre les propriétaires du pigeonnier-porche du château de Châtain. « Ce projet de rénovation, on en parlait depuis plusieurs années mais on ne pouvait pas le financer, reconnaît Yvan Le Strat, directeur du pôle habitat vie sociale à l’Apajh. Aujourd’hui, on a ainsi l’opportunité de le faire avancer. On est très heureux d’être les lauréats de ce projet qu’on a travaillé avec la Fondation du patrimoine. »
Un peu d’histoire
Au Moyen Âge, le château était propriété de la famille de Montvert avant de devenir, au début du XVe, celle de la famille de Bonneval. Laquelle le conserve jusqu’en 1768, date de la vente à la famille de Loubens de Verdalle. Le château est acheté en 1852 par Antoine de La Roche-Aymon et devient ensuite – par le mariage de sa fille Stéphanie avec le prince Augustin Galitzine – la propriété d’une branche de la famille Galitzine. Au XXe siècle, le château est devenu une maison de repos puis, en 2008, un lieu d’accueil pour adultes en situation de handicap.
Une rénovation pensée d’ailleurs en lien étroit avec l’activité même du site, à savoir l’inclusion des personnes en situation de handicap. « On va sensibiliser nos résidents à l’histoire du site et les associer aux différentes démarches comme les visites que l’on fera ici. » Un volet social qui a « sans doute plu à la Mission Bern, pense Philippe Cholley. Et pourquoi pas relancer l’activité d’élevage de pigeons ? ».
Des travaux estimés à 140.000 eurosMais pour cela, il faudra attendre la fin des travaux. Ce chantier, estimé à 142.000 €, devrait débuter au premier semestre 2025 et se terminer fin 2025, début 2026. D’ici la fin de cette année, on connaîtra la somme attribuée par la Mission Bern.
Philippe Cholley, lui, va reprendre son bâton de pèlerin car tous les propriétaires ne se laissent pas aussi facilement convaincre de candidater. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ils ne se bousculent pas au portillon.
« Cette année, on en a eu quatre. C’est pour ça que je pense déjà au loto de l’an prochain. Je n’en ai pas des dizaines en tête, juste quelques-uns. Et puis, les propriétaires sont aussi parfaitement libres de postuler (*) sans passer par moi. Globalement, quand même, le patrimoine est beaucoup mieux considéré actuellement. Peut-être qu’à une époque, les gens voyaient surtout les contraintes qu’on leur imposerait dans la restauration. Aujourd’hui, il y a des aides et il y a un intérêt du public. »
Séverine Perrier
(*) Sur le site de la Mission patrimoine (www.missionbern.fr) mais aussi sur celui de la Fondation du patrimoine (www.fondation-patrimoine.org)