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Октябрь
2024

Yahya Sinouar : pourquoi la mort du chef du Hamas ne mettra pas fin aux guerres de Netanyahou

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Cette fois-ci, Israël n’a eu recours ni à une infiltration du Mossad digne des meilleurs films d’espions, ni à un plan machiavélique comparable à l’attaque des bipeurs du Hezbollah. Le 16 octobre, après un an de traque, c’est une simple patrouille de routine qui a éliminé Yahya Sinouar, le leader du Hamas et architecte des massacres du 7 octobre, dans le sud de la bande de Gaza.

Dans la foulée de l’entrée dans l’enclave palestinienne, en octobre 2023, l’état-major israélien avait distribué un jeu de cartes aux soldats de Tsahal, avec les portraits des cibles de l’organisation terroriste à éliminer. Sinouar était le joker, la carte la plus puissante du Hamas. La plus imprévisible aussi. Partout et nulle part à la fois, insaisissable pendant plus d’un an : caché dans les kilomètres des tunnels de Gaza, bourreau des otages israéliens, la rumeur l’emmenait parfois en Egypte, en Syrie ou en Iran. Avec à chaque fois plusieurs coups d’avance sur ces Israéliens dont il maîtrisait à la perfection la langue, la culture et l’histoire, grâce à ses vingt-trois années passées dans leurs geôles.

Une opportunité pour Israël de mettre fin à la guerre à Gaza la tête haute

Après un an d’une guerre terrible sur tous les fronts, et face au risque d’un conflit global avec l’Iran, les dirigeants occidentaux ont poussé un ouf de soulagement à la vue du corps sans vie du leader terroriste, entouré de soldats de Tsahal. "L’opportunité existe désormais pour un 'jour d'après' à Gaza, sans le Hamas au pouvoir, avec un accord politique offrant un avenir meilleur aux Israéliens comme aux Palestiniens", s’est empressé de déclarer Joe Biden. Un vœu pieux pour le président américain en fin de règne.

Cette victoire symbolique majeure donne, il est vrai, l’opportunité aux dirigeants israéliens de mettre fin à leur guerre à Gaza, de signer une trêve la tête haute et la vengeance accomplie. Sur le papier, il s’agit sans doute de la meilleure option pour Israël, capable de décapiter les deux organisations terroristes qui la menaçaient directement (le Hamas et le Hezbollah) et d’affaiblir durablement son ennemi principal, l’Iran, sans pousser trop loin son isolement international. "Mais tous les défis étroitement connectés que doit affronter Israël — face à l’Iran, au Hezbollah et dans la bande de Gaza — ne vont pas disparaître avec la seule mort de Sinouar, souligne Jonathan Panikoff, spécialiste du Moyen-Orient à l’Atlantic Council de Washington. Il reste encore de nombreuses pages à écrire et tout dépendra de la manière dont Israël va utiliser ce nouveau succès pour pousser son avantage dans la région." Selon lui, les dirigeants israéliens ne se priveront ni de frappes contre l’Iran, en réponse aux missiles balistiques tirés contre l’Etat hébreu le 1er octobre, ni d’une escalade au Liban pour écraser le Hezbollah.

Dès l’annonce de l’élimination de Sinouar, Benyamin Netanyahou a prévenu que "ce n’était pas la fin de la guerre à Gaza mais le début de sa fin". Malgré la mort de ses leaders, le Hamas conserve des milliers de combattants, qui occupent les kilomètres de tunnels de la bande de Gaza et opèrent en guérilla contre l’armée israélienne. Sinouar restait son maître incontesté, mais d’autres prendront la relève. "Clairement, la guerre ne s’arrêtera pas tant qu’Israël n’aura pas rempli tous ses objectifs, estime Yonatan Freeman, expert en relations internationales à l’Université hébraïque de Jérusalem. Mettre le Hamas hors d’état de nuire est un de ces objectifs, plutôt avancé, mais il ne suffit pas : il y a aussi le sauvetage de tous les otages, celui du retour des dizaines de milliers de déplacés israéliens chez eux, etc."

La possibilité d’un accord sur les otages

La question des otages sera centrale dans les jours à venir. 101 captifs restent aux mains du Hamas, dont seulement la moitié encore en vie d’après des sources israéliennes. Le nouveau commandement de l’organisation terroriste pourrait-il accepter un accord pour un cessez-le-feu maintenant que Sinouar, qui exigeait un retrait total de Tsahal de Gaza, n'est plus aux manettes ? "Sa mort offre la meilleure possibilité depuis des mois d’obtenir un tel accord sur les otages", avance Jonathan Panikoff.

L’euphorie qui règne à Jérusalem pourrait toutefois contribuer à ce qu’Israël poursuive ses guerres de plus belle. Depuis le mois de juillet, les dirigeants israéliens surfent sur les succès de leurs services de renseignement et de leur armée : l’élimination du chef de la branche armée du Hamas, Mohammed Deif ; celle de son chef politique, Ismaïl Haniyeh, en plein cœur de Téhéran ; l’opération des bipeurs qui a mis hors circuit des milliers de membres du Hezbollah ; la mort du leader de la milice libanaise, Hassan Nasrallah, à Beyrouth ; maintenant celle de Yahya Sinouar à Gaza…

Netanyahou, au plus bas dans les sondages après le fiasco du 7 octobre, a regagné en popularité et voit la menace d’un effondrement de sa coalition s’éloigner un peu plus à chaque élimination d’un chef terroriste. Le Premier ministre israélien serait tenté de maintenir cet état de grâce en poussant au maximum ses pions, avec l’objectif désormais affiché de "redessiner la carte du Moyen-Orient". Une obsession qui se fera au détriment des millions de civils de la région, déjà obligés de fuir les bombes du Liban à Gaza.




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