À bout de nerfs
C’est entendu. Les cyclistes trouveront toujours qu’il n’y a pas assez de pistes sanctuarisées dans les métropoles congestionnées. Et les automobilistes, exaspérés par les embouteillages, penseront toujours le contraire. Le débat est épineux. Éminemment clivant. De là à imaginer qu’un quinquagénaire perde à ce point les pédales qu’il écrase de sang-froid, sous les yeux de sa fille de 17 ans, un jeune cycliste ? Dont le seul tort aura été de tapoter sur la carrosserie de son SUV pour lui signifier sa conduite indélicate… On se pincerait presque pour y croire tant ce fait divers tragique dépasse les bornes de l’entendement. Plus qu’une question de conflit d’usage, il s’agit là davantage du énième symptôme d’un pays à bout de nerfs. Où faute de savoir encore se parler, on est prêt à en découdre à la première occasion. Au moindre prétexte. Jusqu’à commettre l’irréparable. Rien que de rembobiner la scène fait froid dans le dos. Loin de se cantonner à la guerre des gangs sur fond de trafic de drogue, la violence ordinaire inonde désormais notre quotidien. Comme si personne n’était à l’abri d’un coup de folie. Le signe d’un baromètre sociétal dont l’aiguille ne cesse de s’enfoncer vers le bas.
l’éditorial
Dominique Diogon