La start-up Bobine s’apprête à retricoter des plastiques à Clermont-Ferrand

C’est un ensemble complexe assemblé dans un local restreint et discret du site Michelin de Cataroux, à Clermont-Ferrand, et c’est une première mondiale.

La start-up Bobine, intégrée au Centre des matériaux durables établi sur le site, a inauguré ce lundi 4 novembre son démonstrateur de recyclage chimique des plastiques polyoléfines. 140 visiteurs, représentant divers secteurs concernés par le projet, ont pu découvrir une installation capable de traiter 100 kilos de déchets en plastique par jour et qui entrera en production la semaine prochaine.

Procédé mis au point à Strasbourg

C’est ce qu’annonce Vincent Simonneau, directeur général de Bobine, qui revient sur la genèse de cette technologie nouvelle : "C’est un procédé unique, découvert et mis au point au sein du laboratoire ICPEES, à l’université de Strasbourg, il y a trois ans. Bobine a été créée en octobre 2023 par deux sociétés privées, Blackleaf et Sicat (filiale de Saint-Gobain) pour industrialiser cette technologie spécifique."

Les polyoléfines pèsent 45 % des plastiques produits dans le monde, rappelle le dirigeant, alors que le PET, sur lequel travaille par exemple Carbios, voisin du Centre des matériaux durables, n’en représente que 13 %. Un gisement considérable déjà traité pour moitié par recyclage mécanique.

"Des coûts de production réduits de 40 %"

"Mais les déchets trop souillés ou trop mélangés, soit l’autre moitié, sont encore enfouis ou incinérés. La technologie de Bobine permet de les recycler avec un meilleur rendement et une consommation énergétique moindre, soit en global des coûts de production réduit de 45 % par rapport au recyclage mécanique."Photo Thierry Nicolas

Le procédé commence par une pyrolyse du plastique, réduit à l’état de vapeur traitée ensuite par induction électromagnétique qui transforme les polymères en monomères, matière première nécessaire aux pétrochimistes pour reconstituer des plastiques.

L’enjeu?? L’adaptation de tout un secteur à la réglementation européenne adoptée récemment pour le packaging alimentaire, lequel devra être constitué à 50 % de plastique recyclé en 2040 et 10 % en 2030.

Convaincre les pétrochimistes

Les futurs clients de Bobine seront donc des géants de la pétrochimie en quête d’une alternative aux procédés de production de plastique actuels à base de pétrole.

Nous n’avons pas vocation à opérer nous-mêmes des usines, souligne Vincent Simonneau. Nos clients achèteront nos licences et construiront leurs propres usines dotées de notre procédé.

Vincent Simonneau, directeur général de Bobine. Photo Thierry NicolasEncore faut-il les convaincre. D’où la nécessité du démonstrateur en place à Clermont, qui a nécessité un million d’euros d’investissement mais n’est qu’une étape. "Le deuxième étage de la fusée, explique le dirigeant, ce sera une mini-usine capable de traiter une tonne par jour et pour laquelle il faudra investir 10 millions d’euros environ. Nous espérons la démarrer en 2026 et l’établir ici ou, au moins, dans la région. Le troisième étage sera le lancement de deux projets d’usines d’une capacité de 30 tonnes par jour, en partenariat avec des pétrochimistes, à horizon 2030."

La nouvelle technologie de Bobine sera alors bel et bien sur orbite. L’entreprise aura commencé à générer du chiffre d’affaires et les dix salariés actuels (une partie de l’effectif est basée à Lyon) seront entre 50 et 60, si tout se passe comme prévu.

L’atout MichelinLe géant du pneu n’est pas actionnaire de Bobine mais, acteur du Centre des matériaux durables, met des moyens au service de la start-up. "Ce partenariat constitue pour nous un énorme accélérateur de développement", souligne le directeur général de Bobine, Vincent Simonneau.

Patrice Campo