À Moulins, 6,4 millions d'euros seront investis pour rénover le Sacré-Cœur, première église du genre en France

Avec ses deux flèches qui s’élèvent à 74 mètres de hauteur et répondent à celles de la cathédrale de Moulins, elle fait partie de la carte postale de la ville. L’église du Sacré-Cœur, édifiée au XIXe, n’avait jamais connu de campagne de restauration. Mais depuis des années, les pierres de façade, en grès de Coulandon, s’effritent, au point qu’il a fallu poser des filets au-dessus de l’entrée principale, il y a quinze ans déjà. Les pierres des parties basses sont souvent les plus endommagées, mais pas seulement. 6,426 millions d’euros de travaux sont nécessaires.

Église du Sacré-Cœur : la Ville de Moulins toujours en quête de financements

Plus de 80% d'aides espérées

Les chapelles souffrent davantage que la nef.  Photo Corentin Garault La Ville s’est décidée à lancer des travaux conséquents, qui s’étendront sur plusieurs années : « Ce bâtiment, qui concourt à l’identité patrimoniale de la ville, a besoin de travaux », resitue le maire Pierre-André Périssol. « Il est indispensable de réunir les moyens nécessaires, auprès de nos partenaires que sont l’État, la Région, entre autres. On espère obtenir plus de 80 % d’aides ».

Toutes les façades vont être reprises. Il y a urgence. Photo Corentin Garault  La collectivité escompte donc payer moins que les 20 % de travaux qu’elle doit financer en tant que propriétaire, sur ce monument historique, inscrit depuis 1991. Les aides cumulées (État et collectivités) ne doivent, normalement, pas dépasser 80 % du coût des travaux. Mais une dérogation préfectorale peut être donnée pour permettre à une commune de dépasser ce seuil de 80 %. « Une phase de diagnostic, de 43.200 € TTC, subventionnée à hauteur de 14.400 € par la Drac, a permis d’établir un programme de travaux », précise l’adjointe Dominique Legrand. La Ville a budgété 190.000 € supplémentaires cette année pour des études plus techniques, travailler sur la maîtrise d’œuvre.

Quand les moulins étaient dans le vent... A Moulins

Cinq phases de travaux

Certaines pierres ont mieux résisté que d'autres à l'usure du temps, au vent.... Photo Corentin Garault La Ville a fait appel à l’architecte du patrimoine, Timothée Godron (La Fabrique d’architecture). Cinq phases de travaux ont été définies : « Le projet, c’est d’échafauder une façade, de la rénover, avant de passer à la suivante », résume Igor Milavaud, directeur des bâtiments de Moulins. « D’abord, la façade est, qui correspond à l’entrée principale, pendant neuf mois, pour 1,3 millions d’euros. Ensuite, la façade nord, rue du Pont-Ginguet, pour 1,35 millions. Ensuite, la façade ouest-nord ouest pour 1,2 millions. Quatrième phase, la façade est - sud est pour 1,2 millions, et enfin, la façade sud pour 1,4 millions. Il s’agit de reprendre, de remplacer les pierres quand c’est nécessaire. Les pierres du bas de l’entrée sont très érodées, car elles ont souffert de l’humidité et des courants d’air, très forts ».Détail d'un vitrail de l'église du Sacré-Coeur. Photo Corentin Garault Il s’agit aussi d’entreprendre des travaux d’étanchéité sur les toitures des chapelles car « il pleut à l’intérieur ». La toiture en ardoises de la nef est, elle, « en bon état, mais des reprises de charpente seront nécessaires ». Il faut enfin changer les plombs de la totalité des 129 vitraux. « L’état de cette église est normal car il n’y avait eu aucune rénovation », commente Timothée Godron. « Le grès n’est pas une pierre très dure et des veines de moins bonne qualité ont sans doute été employées à certains endroits, d’où leur dégradation plus avancée. Le style néogothique en fait une église très lumineuse, car elle compte beaucoup de vitraux ».

Les problèmes d'étanchéité sont nombreux. Photo Corentin Garault

Le père Claude Herbach souligne :

La particularité de cette église, c’est qu’elle n’a jamais été modifiée dans sa structure, contrairement à beaucoup d’églises. Elle est telle qu’elle était au XIXe, ce qui lui donne une vraie cohérence

60.000 visiteurs par anLe maire Pierre-André Périssol, son adjointe Dominique Legrand, l'architecte du patrimoine Timothée Godron et sa collaboratrice ont présenté les travaux à venir. Photo Corentin Garault

Le curé estime la fréquentation de l’église à 60.000 personnes par an. Car elle accueille messes, et de nombreuses célébrations, baptêmes, mariages, enterrements, mais aussi des concerts grâce à sa capacité de 600 places et à sa bonne acoustique. « De Pâques à la Toussaint, deux messes et quatre à cinq célébrations par semaine », calcule le curé. Une fois cette phase d’étude technique achevée et celle de la consultation et du choix des entreprises, qui nécessiteront un peu plus d’un an, les travaux pourraient démarrer début 2026.

Ariane Bouhours

La "cathédrale d’en bas", vestige du quartier des mariniers. Dressé à l’entrée du quartier des mariniers, le Sacré-Cœur fut achevé en 1881. L’église est la première en France à être consacrée au Sacré-Cœur (avec celle de Commentry, mais le projet y a été démarré un peu plus tard). Outre sa vocation religieuse, cet édifice témoigne de la présence d’une importante confrérie de mariniers dans ce quartier. « C’était l’église du quartier pauvre, elle a été financée par les paroissiens », souligne le père Herbach. « Aujourd’hui, beaucoup de gens la confondent d’ailleurs avec la cathédrale, car elle fait la même taille. D’autres l’appellent la cathédrale d’en bas, en opposition avec la cathédrale d’en haut, près de la Malcoiffée ».  Le bateau suspendu derrière le porche d'entrée, vestige de la confrérie des mariniers.  Photo Corentin Garault  Le curé rappelle qu’« elle a été construite en même temps que la cathédrale était agrandie. Les deux curés ont dû rivaliser pour réaliser l’édifice le plus grand, le plus beau… » L’extérieur, en grès de Coulandon, est un parfait exemple du style gothique du XIIIe, note le Pays d’art et d’histoire de Moulins Communauté. Sa façade est percée de trois larges portails en arc brisé, surmontés d’une rangée d’arcatures, au-dessus de laquelle s’épanouit une grande rose polylobée, dominée par une statue monumentale du Sacré-Cœur et encadrée de deux hauts clochers carrés. L’intérieur suit un plan en forme de croix latine avec une nef de quatre travées séparée du chœur par un large transept éclairé d’une rose. L’élévation comporte trois niveaux : grandes arcades, triforium, fenêtres hautes. Parmi les curiosités, un ex-voto représentant un bateau, symbole des mariniers, au-dessus du portail central. À ce bateau est suspendue la couronne du roi des mariniers, qui était élu chaque année et présidait la procession.