3 océans en solitaire, des systèmes météo en pagaille et des fronts à toutes les sauces attendent les 40 marins qui s’élanceront des Sables d’Olonne ce dimanche 10 novembre. Sur un Vendée Globe, il y a le marin, le bateau et la météo bien sûr !
Sortir du golfe de Gascogne
Si cette année, la zone vaste anticyclonique en place sur le proche Atlantique va protéger les skippers des méchantes perturbations automnales sur le départ, statistiquement cette situation reste rarement la norme. Face au vent fort de secteur ouest à sud-ouest, et la mer cassante du golfe de Gascogne, les bateaux souffrent et les marins font le dos rond dans l'attente de la bascule de noroit. Il n'est donc pas étonnant que les avaries soient fréquentes lors des 48 premières heures de course...
Au Cap Finisterre, déjà anticiper le passage du Pot au noir
Une fois, le redoutable Golfe de Gascogne dans le sillage, un premier choix se pose à la hauteur du cap Finisterre en fonction du positionnement de l’anticyclone des Açores : la route du large ou celle qui longe la côte africaine ? Une première option déjà déterminante préalable au passage du piégeux Pot au noir, réfléchi dès les îles du Cap-Vert par le travers. Cet écueil s’approche toujours prudemment pour se garder le loisir de choisir au dernier moment un trou de souris pour débarquer en hémisphère sud.
Bien négocier l'anticyclone de St-Hélène
Avec les hautes pressions de St Hélène dans le sud-est, un nouveau choix se profile à l’horizon. Les coureurs peuvent opter pour le grand tour par le Brésil cap au sud, se faufiler sous l’anticyclone pour couper le fromage en direction de l’Afrique du Sud ou bien et c’est le coup de bol : attraper une perturbation qui circule assez nord pour se lancer sur les rails du grand sud. Peu importe la situation météo rencontrée, la transition se veut toujours très rapide par 40° S. On dit souvent que le premier arrivé sous ces latitudes est le premier servi car il a tout le loisir de tracer sa route avec le système météo perturbée du moment.
[caption id="attachment_190165" align="aligncenter" width="500"] La réception et l'analyse des fichiers GRIB occupent une place centrale dans le planning des skippers. Crédit : Team Oliver Heer.[/caption]
Ne pas casser dans l'Indien
Dans l’Océan Indien, le leitmotiv sera d’aller vite sans casser dans une mer souvent difficile à négocier. Jean Yves Bernot parle d'ailleurs de pilotage dans ce couloir étroit compris entre la limite des glaces et les zones de hautes pressions plus au nord. Il faut tenir le rythme devant les fronts ce qui demande un surplus d’énergie pour tenir la pression entre empannages et gestion de la toile du temps.
Australie et le Pacifique dans la foulée
Pas de pause pour nos champions des mers, l’arrivée vers l’Australie est souvent compliquée car le flux d’ouest peut être perturbé par l’île continent avec son lot de zone sans vent et de petites dépressions stationnaires. Si le Pacifique se veut plus facile à gérer que l’Indien en termes de trajectoire, les perturbations sont souvent plus dures et le chemin très long avant d’apercevoir le Cap Horn. Généralement la fatigue commence à se faire sentir dans ce coin-là. Il n’est pas rare en plus que de petites bulles anticycloniques se déplacent entre les dépressions rendant la situation des coureurs très inconfortable.
Le redoutable cap Horn prélude à la remontée de l'Atlantique Sud
Quant au goulet du Horn, encadré de régions montagneuses, il peut lever une mer dangereuse, et les coups de tabac dans cette région du globe sont terribles ! Enfin la remontée de l’Atlantique Sud souvent décisive pour le classement peut virer au supplice. D’un côté l’anticyclone de St Hélène barre la route directe, de l’autre des cellules orageuses instables se baladent le long de l’Argentine et du Brésil.
Psychologiquement c’est le moment le plus dur car l’arrivée n’est plus très loin, le bateau et le marin sont usée et les petits camardes de derrière reviennent vite. Heureusement, le pot au noir est moins actif en hiver donc pas trop dur à franchir et l’on se retrouve vite en atlantique nord, terrain connu mais pas moins semé d’embuches.
Bien gérer l'anticyclone des Açores
Dernier coup de dé, la gestion des Açores, une stratégie à long terme, étudiée sept huit jours avant qui s’affinent au jour le jour. Au choix : prendre de l’ouest pour s’engouffrer plus vite sur la trajectoire des coups de vent de l’hiver ou choisir la route directe en passant à l’est de l’archipel portugais. Un nouveau compromis entre fatigue, positionnement et performance que les défaillances d’un voilier poussé à bout rendent habituellement aléatoire. A quelques jours de l’arrivée tant attendue, la tactique et le marquage reprennent leurs droits sur la stratégie pure.
On a tous encore en mémoire le duel final entre Thomson et Le Cléac’h lors de la dernière édition… Le but du leader est dorénavant de rester entre l’adversaire et le phénomène météo positif à venir. Encore une fois, cela demande beaucoup de jugement dans la prise de décision puisqu’il faut être capable de sacrifier du court terme pour du long terme. Un dernier effort avant de jouir du privilège d’être le premier à remonter le chenal du port vendéen !
