Vers la scission de l'empire Vivendi: l'heure du vote des actionnaires
La réunion clé se tient à partir de 15H00 (14h00 GMT) à Paris, au théâtre des Folies Bergère, où trois résolutions seront mises au vote. Elles concernent respectivement les sociétés Canal+, Havas et Louis Hachette Group, qui ont vocation à devenir indépendantes de Vivendi.
Canal+ vient d'envoyer des signaux au marché. Le groupe a annoncé jeudi le retrait, à partir de juin 2025, de ses quatre chaînes payantes de la TNT (Canal+, Canal+ Cinéma, Canal+ Sport, Planète), manière d'alléger ses coûts. Vendredi, il a ajouté la suppression de 250 postes, dont 150 en lien avec l'arrêt de sa chaîne C8 sur la TNT le 28 février, d'après l'intersyndicale.
L'AG n'est pas une simple formalité: les deux premières résolutions doivent recueillir les deux tiers des voix, la troisième une majorité simple.
L'étape suivante est, à partir du 16 décembre, la cotation de Canal+ à la Bourse de Londres, celle d'Havas (communication) à Amsterdam et celle de Louis Hachette Group à Paris sur le marché Euronext Growth, régulé mais non réglementé.
Avec une participation de 66,5% dans Lagardère SA et 100% de Prisma Media, Louis Hachette Group couvre édition (Hachette Livre, numéro un français), distribution (Relay) et certains médias (Europe 1, JDD, Voici, Géo...).
Le très conservateur Vincent Bolloré a pris la tête de Vivendi à partir de 2014. La holding restera en Bourse à Paris, elle continuera de développer l'éditeur de jeux vidéos Gameloft qu'elle détient à 100% et de gérer diverses participations minoritaires (Universal Music Group, Banijay, TIM, Prisa...).
Concrètement, "si vous avez une action Vivendi, vous recevrez une action Canal+, une action Havas et une action Louis Hachette Group, et vous garderez votre action Vivendi", est-il expliqué aux actionnaires.
"Le cours de Vivendi s'ajusterait", précise le groupe, valorisé près de 8,9 milliards d'euros et qui comptait fin 2023 quelque 73.000 employés.
"Libérer le potentiel"
Sa direction se montre confiante quant au verdict de l'AG: "les deux principales agences en conseil de vote, ISS et Glass Lewis, très majoritairement suivies par les actionnaires, leur ont recommandé d'approuver ce projet".
But de l'opération? "Libérer pleinement le potentiel de développement de l'ensemble de ses activités", comme l'affirmait Vivendi en décembre 2023 lors de son annonce.
Car, depuis qu'il s'est scindé d'Universal Music Group en 2021, Vivendi dit subir une "décote de conglomérat très élevée", de près de 45%. Autrement dit, le tout vaut moins que la somme des parties du mastodonte français.
Le groupe Bolloré, détenant actuellement 29,9% de Vivendi, restera "un actionnaire de référence dans les quatre sociétés", qui "permettra de passer d'un modus operandi de +fratrie+ aujourd'hui, à une forme de +cousinade+ entre entités demain", comme l'a déclaré fin octobre aux Echos le président du directoire de Vivendi, Arnaud de Puyfontaine.
Mais le projet fait bondir certains petits actionnaires. Le fonds activiste CIAM, qui détient 0,025% du capital, a lancé des actions tous azimuts pour bloquer cette scission.
Saisi en référé, le tribunal de commerce de Paris a refusé sa demande de report de l'assemblée générale et doit se prononcer au fond sur la validité du projet. En outre, CIAM conteste devant la cour d'appel de Paris un avis de l'Autorité des marchés financiers.
Selon le fonds, les "places étrangères ou moins réglementées" permettront à Vincent Bolloré d'augmenter à l'avenir ses participations et donc de renforcer son "contrôle sur Canal+, Havas et Louis Hachette Group, sans avoir à lancer d'offre publique" d'achat, tout en vidant "Vivendi de ses actifs essentiels".
Sous le seuil réglementaire de 30%, Vincent Bolloré n'a jamais été contraint de lancer une offre obligatoire sur Vivendi.
Autres trouble-fête; la campagne "Désarmer Bolloré". Des organisations et personnalités vont se mobiliser lundi à midi près de l'AG pour "dénoncer publiquement l'omnipotence financière et médiatique du groupe Bolloré et son rôle dans l'extrême droitisation de la société française".
Vincent Bolloré récuse promouvoir une telle "idéologie".