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A Kawéni, le plus grand bidonville de France, priorité à la reconstruction

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Jusque dans les hauts de ce dédale de cases à flanc de collines pour beaucoup détruites, on ne parle pas des disparus, alors que les autorités ont évoqué la probabilité d'un grand nombre de victimes.

Selon un bilan provisoire cependant, 35 morts et quelque 2.400 blessés étaient officiellement recensés vendredi.

Si toutes les routes en dur ont été dégagées, certaines zones de l’île restent difficiles d’accès et personne ne sait combien exactement d’habitants – souvent des Comoriens sans papiers – vivaient dans les nombreux bidonvilles qui parsèment ce territoire français de l’océan Indien.

A Kawéni, le plus grand d’entre eux, qui compte quelque 20.000 habitants, les images du quartier pulvérisé ont laissé craindre le pire et les rumeurs de charnier se sont emballées, parfois propagées par des politiciens locaux.

Mais le doyen de la mosquée du Vendredi Bilal Ousseni assure à l'AFP avoir enquêté: "Des milliers de morts, je ne crois pas", répète-t-il, alors que la mosquée s’apprête à rouvrir pour son premier office depuis le cyclone. Lui a comptabilisé six morts dans le quartier, "quatre ici, et deux à l’hôpital".

La mosquée est un bel édifice jaune pâle sur trois étages dans la partie basse de Kawéni, où les rues sont encore larges et asphaltées. D’imposantes enceintes ont été hissées jusqu’au minaret et les fidèles commencent à arriver mais l’imam, Hafidh Houmadi, ne croit pas qu’ils seront nombreux. "Ils sont trop occupés à rebâtir leur maison", dit-il avec aménité.

Selon les autorités, beaucoup de morts ont pu être rapidement enterrés par leurs proches dans les 24 heures pour respecter la tradition musulmane. Pas à Kawéni, assure l’imam. "On fait le nécessaire pour enterrer rapidement mais tout cela dépend des autorités" qui délivrent l’autorisation, explique-t-il.

Même pour les sans-papiers, qui peuvent demander à un proche en règle de se rapprocher de la mairie pour obtenir l’autorisation d’inhumer.

Anli Daoud, responsable de la chambre funéraire de Kawéni, raconte que "le samedi, quand le cyclone s’est calmé, on a amené deux décédés".

"La police est venue, ils ont pris les photos et nous ont dit qu’on pouvait enterrer, puis aller le lendemain à la mairie."

"S’il y avait plusieurs centaines de morts, je serais au courant", assure l’homme. Dans le cimetière du quartier, rectangle vert laissé intact par Chido, seul un peu de terre retournée témoigne des nouvelles tombes creusées depuis le cyclone.
Chiffres discordants
Combien Chido a-t-il tué d’habitants à Kawéni ? Quatre, croit savoir "Polé-Polé", une figure locale, plus préoccupé par l’absence d’eau dans le quartier.

"Treize", pense un de ses amis croisé plus haut, venu réparer la baraque de sa mère et qui se plaint de la pénurie de "pointes" (clous) à Mayotte.

"Je crois qu’il y en a eu deux dans ce quartier, et trois là-bas", hésite un autre, outils de chantier en main, inquiet de l’explosion du prix de la tôle.

Coincé entre une route nationale sur-fréquentée et des collines désormais recouvertes de terre ocre, Kawéni bruisse d’activité. Des camions hissent des poteaux de bois jusqu’aux dernières portions asphaltées.

Sur un terrain plat, des gamins boxent avec du matériel flambant neuf, sous le regard de coachs à peine plus vieux.

Polé-Polé monte voir le "banga" (habitat précaire) de sa fille tout en haut du bidonville, soufflé par les vents. Elle a survécu, comme Ibrahim Smett, un agent d’entretien qui a crû y passer. "J’étais sous le lit avec ma fille de quatre ans. L’eau coulait, on était trempé et toutes les tôles autour de nous tombaient", se souvient-il. Les blessés, selon lui, sont ceux qui ont fui en plein cyclone.

D’en haut, Mamoudzou et Petite-Terre semblent à portée de main.

Au loin, l’eau plus claire et la houle signalent la barrière de corail qui entoure l'archipel. Il n’y a pas l’odeur de mort décrite par des comptes sur les réseaux sociaux, mais un entêtement à tenir bon sur ces terrains où le prochain cyclone pourrait tout rebalayer.

Des centaines d’hommes et de femmes s’activent sous un soleil de plomb. "Qu’on nous autorise au moins à reconstruire en béton", réclame Ibrahim Smett, avant de repartir, deux énormes poteaux sous les bras.




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