Cinéastes du grand au petit écran, la loi des séries

Retour sur quelques réalisateurs transfuges des salles de cinéma aux petits écrans:

. "Chance d'avoir trop de matière"

"J'ai eu la chance d'avoir trop de matière", savoure Thomas Vinterberg dans "Cinéastes en séries", documentaire de Stéphane Bergouhnioux, prévu lundi sur Canal+. C'est ce jour que s'achève la diffusion de "Families Like Ours", première série du Danois (qui restera disponible sur la plateforme myCanal, tout comme le documentaire).

C'est un projet tout en éco-anxiété avec des Danois obligés de fuir leur pays devant la montée des eaux. Ce rêve de série est né à l'époque de "Festen" (1998). Loin du règlement de compte familial à l'écran, le cinéaste était si heureux en plateau qu'il aurait voulu ne jamais donner le clap final.

. "Extension de la popularité"

Ce prégénérique est resté dans l'Histoire: Alfred Hitchcock s'avance et loge son double menton dans le logo de sa silhouette dessinée en arrière-plan.

Voici "Alfred Hitchcock Presents", soit une collection-série de mini-thrillers à la télé diffusés dès 1955 (qui devient "The Alfred Hitchcock Hour" en 1962) et chapeautés par le maître du suspense.

"Cette série contribue à une extension sans borne de la popularité du cinéaste", dira en 2011 dans une conférence à la Cinémathèque française à Paris Jean-François Rauger, directeur de la programmation de cette institution. "L'importance" de cette présence à la télé fera même de l'ombre au cinéaste Hitchcock chez les critiques aux Etats-Unis, comme l'analysera un jour François Truffaut.

. "Un film de 18 heures"

"Sombre", "mystifiante", "énigmatique", "surréaliste": "Twin Peaks" établit dès ses première et deuxième saisons, en 1990 et 1991, une nouvelle grammaire télévisuelle saluée par la presse internationale.

David Lynch, consacré au cinéma avec "Elephant Man" (1980), abolit toute différence entre formats et écrans. Le cinéaste, décédé jeudi à l'âge de 78 ans, présente en 2017 les 18 épisodes de la 3e saison comme "un film de 18 heures".

Les Cahiers du Cinéma, magazine-bible du 7e art en France, loue la capacité du réalisateur à "transformer notre salon en salle". Gommant toute frontière, l'Américain signera d'ailleurs au cinéma "Twin Peaks: Fire Walk With Me" en 1992.

. "L'échec était prévisible"

Michael Mann est lui aussi un habitué de la passerelle entre cinéma et série. Son premier long métrage digne de ce nom, "Le Solitaire" avec James Caan, date de 1981. Mais c'est la série télé "Deux flics à Miami", avec Don Johnson et Philip Michael Thomas, produite à partir de 1984, qui lui vaut le succès et définit en grande partie l'image clinquante des années 1980.

Évidemment, il n'a pas résisté à la tentation de ressusciter cette paire de flics au cinéma en 2006 avec Colin Farrell et Jamie Foxx. "L'échec était prévisible, les fans de la série allaient être déçus (par la modernité) et l'autre moitié du public voulait de la nouveauté et nous reprochait la référence à la série", avoue-t-il dans "Cinéastes en séries".

. "Notre temps est arrivé"

Première femme à remporter la Palme d'Or du Festival de Cannes en 1993 avec "La Leçon de Piano", la Néo-Zélandaise Jane Campion a bousculé l'univers masculin des séries avec "Top of the Lake", nimbée de mystère, en 2013. On y retrouve Elisabeth Moss, vue dans "Mad Men" et qui portera ensuite sur ses épaules la série "La Servante Ecarlate".

L'Italienne Francesca Comencini a, elle aussi, débuté sa carrière au cinéma, dans les pas de son père réalisateur. Avant de se faire une place dans les séries comme "Gomorra" en 2014, où elle a imposé des "personnages féminins puissants".

"Notre temps est arrivé, c'est le message à nos jeunes collègues femmes", appuie-t-elle dans "Cinéastes en séries".