Mise en garde sur les dangers d'un anti-épileptique chez la femme enceinte
L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a alerté mercredi sur les risques liés à la prise par les femmes enceintes d'un médicament antiépileptique, le valproate, commercialisé à l'origine sous le nom de Dépakine, cause probable de malformations chez "plusieurs centaines" d'enfants en Europe.
Ce médicament, qui a démontré son efficacité dans le traitement de l'épilepsie et des troubles bipolaires, est toujours en vente car il est jugé indispensable pour les malades. 80.000 personnes sont en moyenne traitées chaque année dans l'Hexagone avec cette molécule.
"On n'a pas de statistiques précises à ce stade. Les informations qui circulent au niveau européen, ce sont plusieurs centaines" de cas de malformations chez des enfants, a déclaré Dominique Martin, directeur général de l'ANSM lors d'une conférence de presse, précisant que l'assurance maladie allait contribuer à recenser les cas en France.
"L'autorisation de mise sur le marché de ce médicament (du laboratoire Sanofi) date de 1967. C'est un vieux médicament. Les informations sur les malformations datent des années 80. Les informations ont été en revanche plus tardives sur les retards neuro-développementaux --entre les années 2006/2007-- et elles ont été consolidées depuis 2009/2010", a-t-il ajouté.
Il a fait valoir que les retards neuro-développementaux étaient détectables bien après la naissance, au moment de la marche ou de la scolarisation.
"On est conscient du caractère complexe car ce médicament est essentiel, c'est un médicament majeur qu'on ne peut pas contre-indiquer", a-t-il dit tout en soulignant que le priorité était désormais de réduire les risques.
Dès le mois de juin, le député socialiste spécialiste des questions de santé, Gérard Bapt, avait estimé que la prise de cet antiépileptique par des femmes enceintes était à l'origine d'au moins 370 malformations à la naissance rien qu'en France.
En juillet, la ministre de la Santé Marisol Touraine avait "saisi" l'Inspection générale des affaires sociales pour ouvrir une enquête sur le médicament.
Face aux risques avérés (risque élevé -d'environ 10% en moyenne- de malformations congénitales, risque accru d'autisme et retard d'acquisition du langage et/ou de la marche dans jusqu'à 30 à 40% des cas), l'ANSM avait décidé en mai de durcir les conditions de prescription pour cette famille de médicaments. Ils "ne doivent pas être prescrits chez les filles, les adolescentes, les femmes en âge de procréer et les femmes enceintes, sauf en cas d'inefficacité ou d'intolérance aux alternatives médicamenteuses."
Mercredi, l'agence a rappelé qu'à partir du 1er janvier, aucune délivrance ne pourra être faite sans présentation de la prescription initiale annuelle par un spécialiste et d'un formulaire signé par les malades.
De son côté, "la Haute autorité de santé doit publier des recommandations d'ici la fin de l'année relatives aux alternatives thérapeutiques chez ces personnes épileptiques ou bi-polaires", qui ont un projet de grossesse, a indiqué Philippe Vella, responsable des médicaments en neurologie à l'ANSM.
Enfin, l'ANSM a demandé que les laboratoires qui produisent actuellement ces médicaments fassent figurer sur l'emballage des informations visibles immédiatement et faciles à comprendre. Très concrètement, il s'agit de mentions telles que "Dépakine + grossesse = risque".