6 propositions pour améliorer le financement climat européen
En 2009, les pays développés s'étaient engagés à fournir au moins 100 millions $ pour le financement climat d'ici à 2020 afin d'aider les pays en développement à réduire leurs émissions de CO2 et à s'adapter aux impacts du changement climatique. S'il s'agit à première vue d'un objectif ambitieux, ce montant ne représente que 0,2% du PIB des pays de l'OCDE.
Par ailleurs, selon le Programme des Nations Unies pour l'Environnement, le niveau de financement requis pour répondre aux seuls besoins d'adaptation au changement climatique dans le monde s'élève à plus de 150 milliards € par an d'ici à 2030.
Jusqu'à présent, l'UE et certains de ses états membres ont prouvé qu'ils voulaient être sérieux quant au financement climat. Ensemble, ils ont fourni 14,5 milliards € de financement en 2014, une augmentation par rapport à l'année précédente. La Commission Européenne a récemment annoncé qu'elle comptait doubler ses dons pour le climat en provenance du budget européen d'ici à 2020, atteignant les 2 milliards d'euros par an. Cette décision fait écho à la décision prise l'année dernière de consacrer 20% de son aide extérieure à des actions en faveur du climat pour la période 2014-2020. L'Allemagne a également annoncé qu'elle doublerait son financement climat d'ici à 2020 par rapport à 2014, tandis que la France compte augmenter sa contribution de 3 à 5 milliards d'ici à 2020.
Tout n'est pas rose cependant. Loin de là.
Si l'augmentation des contributions financières pour la période pré-2020 est bienvenue, ces engagements sont encore loin de rencontrer les besoins des populations bénéficiaires. Selon Tim Gore, responsable des politiques, du plaidoyer et de la recherche chez Oxfam International, ces contributions sont insuffisantes, surtout au niveau de l'adaptation. "Si vous venez d'une des communautés les plus pauvres au monde, cet argent ne va pas améliorer vos conditions de vie. Ces communautés ne vont rien voir de tout cet argent mis sur la table. "
Dans un commentaire sur les récentes conclusions du conseil des ministres des finances européens, Wendel Trio, directeur de "Climate Action International Europe" a déclaré "L'UE a échoué à mettre sur la table un "paquet financier" crédible pour l'accord de Paris ". Alors qu'il s'agissait d'un moment clé pour coordonner le financement climat des pays européens en amont de la COP21, les ministres ne sont pas parvenus à fournir une feuille de route claire sur la manière dont ils comptent concrétiser leurs engagements tels que la réforme des subsides néfastes pour l'environnement ou l'augmentation des contributions avant et après 2020.
Selon Isabel Kreisler, experte en politiques climatiques pour Oxfam International "si les ministres des finances veulent s'assurer qu'il y ait quelque chose dans l'accord de Paris pour ceux qui sont en première ligne face au changement climatique, ils doivent significativement augmenter les financements publics pour l'adaptation avant 2020 et s'assurer qu'un nouvel objectif de financement, séparé, pour après 2020, soit déterminé à Paris".
Une série d'autres éléments doit encore être améliorée pour que le financement européen puisse réellement s'avérer efficace et soutenir les populations vulnérables au changement climatique.
Financement pour l'atténuation et l'adaptation sur un pied d'égalité
Un rapport de l'OCDE publié en octobre dernier a révélé que seulement 16% du financement climat global est consacré à des actions d'adaptation dans les pays en développement. Si l'UE veut être considérée comme un partenaire crédible, elle doit augmenter le niveau de financement en faveur de l'adaptation afin que celui-ci atteigne un équilibre de 50% pour l'atténuation et 50% pour l'adaptation.
Financement nouveau et additionnel
Dans de nombreux états membres, l'argent qui a été engagé provient du budget de la coopération au développement. En Belgique, la plupart des 50 millions € promis lors du sommet des chefs d'Etat de la COP provient du budget de l'aide au développement déjà considérablement réduit ces dernières années. Cela signifie que certains projets prévus pour améliorer l'éducation ou la santé ne verront tout simplement pas le jour. C'est pourquoi la société civile fait pression pour que tous les engagements financiers soient nouveaux et additionnels.
Prédictibilité des flux financiers
Un problème majeur des engagements financiers actuels en Europe est l'absence de feuille de route claire sur quand et comment l'argent va être délivré. Par exemple, en novembre dernier, l'UE était incapable de fournir des indications sur sa contribution pour 2015. Il s'agit d'une question essentielle pour les bénéficiaires du financement car ces incertitudes limitent fortement leur capacité à planifier adéquatement leur action en matière de climat.
Financement post-2020
En lien avec la prédictibilité, il est crucial que l'UE pousse en faveur d'un paquet "financement climat" ambitieux qui inscrive le principe des cycles quinquennaux pour les objectifs financiers. Ces objectifs devraient être collectifs et viser à la fois l'adaptation et l'atténuation de manière séparée. Par ailleurs, un tel "paquet" devrait appeler les Parties à soumettre tous les trois ans leurs contributions prévues à ces objectifs.
Financement innovant
Diverses options peu couteuses pourraient être appliquées par l'UE en vue de mobiliser davantage de financement. La première est la mise en place d'une taxe sur les transactions financières qui aiderait à financer les énergies renouvelables et les projets d'adaptation dans les pays vulnérables. La seconde serait de réserver certains revenus provenant du système européen d'échange de quotas d'émissions (ETS). Selon WWF, si seulement 10% des 8 milliards € générés annuellement par l'ETS étaient mis de côté pour le financement climatique, cela permettrait de soulever jusqu'à 3 milliards € de fonds annuels supplémentaires à partir de 2020.
Subsides aux énergies fossiles
Finalement, l'UE doit s'attaquer de tout urgence aux subsides en faveur des énergies fossiles. Chaque année, près de 35 milliards € sont dépensés par les états membres pour ces subsides néfastes, soit 2,5 fois plus que la contribution européenne au financement climat. Même si l'UE a accepté d'éliminer ces subsides, peu d'actions concrètes ont jusqu'à présent été réalisées pour avancer dans cette direction.
Au-delà des chiffres, le succès du financement climatique dépend évidemment de la manière dont cet argent est délivré. C'est seulement en contribuant à sa part équitable du financement que l'Europe pourra véritablement instaurer la confiance et s'engager dans un partenariat constructif avec les pays en développement. Travailler ensemble sur une base honnête et équitable est le seul moyen par lequel nous parviendrons à effectivement faire face au changement climatique.
_______________________________________________________________________________
Traduction des citations par l'auteur
Lire aussi :
• Les lieux les plus pollués sur Terre
• Les projets écolos que pourraient financer les milliards de subventions aux énergies fossiles
• COP21: Le texte de l'accord est passé de 939 crochets à 367 crochets [et c'est bon signe]
• Tous les matins, recevez gratuitement la newsletter du HuffPost
• Retrouvez-nous sur notre page Facebook