Bayrou tire les conclusions sur les retraites, le RN redevient l'arbitre
Le Premier ministre tiendra une conférence de presse jeudi à 17h00 à Matignon pour donner le résultat de ses échanges avec les organisations syndicales et patronales.
"Je vais continuer à travailler avec eux jusque demain après-midi. Et demain après-midi, je dirai aux Français ce que nous pouvons trouver comme accord. Et s'il demeure des points de désaccord, le gouvernement les tranchera", a affirmé devant le Sénat François Bayrou.
Il n'y aura pas pour autant de nouvelle rencontre avant la conférence de presse, selon Matignon.
François Bayrou, qui considère que les partenaires sociaux étaient "à quelques centimètres de la réussite du conclave", a promis que si un accord éventuel entraînait des dispositions législatives, "elles seraient soumises au Parlement".
"Et le gouvernement prendra ses responsabilités", "ce travail ne sera pas oublié, il ne sera pas annulé", a insisté ce grand défenseur du dialogue social.
Sceptique
Le chef du gouvernement devrait notamment exposer les points de blocage et de consensus des partenaires sociaux qui devaient les lui faire remonter.
Syndicats et organisations patronales s'opposent notamment sur la prise en compte de la pénibilité et le financement des mesures qui seraient adoptées pour aménager la réforme de 2023.
Le Premier ministre "veut obtenir des accords (...) sur les points de la retraite des femmes ou l'âge de départ à plein droit à la retraite (à 66,5 ans au lieu de 67)", a précisé la porte-parole du gouvernement Sophie Primas mercredi matin sur franceinfo.
Mais un éventuel accord sur ces points ne suffirait pas aux socialistes qui veulent pouvoir discuter de "tout" au Parlement, et en particulier revenir sur l'âge de départ à 64 ans, ce que refuse le Premier ministre.
Cette poursuite des discussions ne convainc pas tout le monde non plus au sein du camp présidentiel. Sceptique, le patron d'Horizons et prétendant à l'Elysée, Edouard Philippe, a jugé sur RTL "qu'on ne règlera pas cette question par des éléments techniques, on la règlera par un vrai débat politique au moment de la présidentielle".
François Bayrou avait lancé ces concertations en février en échange de la neutralité des socialistes à son égard, ce qui lui avait permis d'échapper à la censure sur le budget.
Mais sans attendre l'issue de ces discussions de la dernière chance, les socialistes ont annoncé mardi qu'ils allaient déposer une motion de censure contre le gouvernement.
"Pas de gain"
François Bayrou se retrouve donc à la merci du Rassemblement national, premier groupe numériquement de l'Assemblée nationale, comme son prédécesseur Michel Barnier, censuré au bout de trois mois à Matignon.
Mais il peut encore respirer: le parti à la flamme ne le censurera pas la semaine prochaine, quand sera débattue la motion de censure du PS. Il lui donne "rendez-vous" sur le budget à l'automne.
La motion de censure ne peut être adoptée sans les voix de l'extrême droite en l'état des forces à l'Assemblée nationale.
"Si nous censurons dans les jours qui viennent François Bayrou, la réforme des retraites demeure, c'est un coup pour rien (...). Quel est le gain politique que nous avons ? A part mettre le bazar avant l'été, il n'y a pas de gain", a justifié sur France Inter le vice-président du RN Sébastien Chenu.
"Le RN, assurance vie de la macronie", a aussitôt réagi le coordinateur de la France insoumise Manuel Bompard.
De fait, François Bayrou, qui avait à son arrivée en décembre fait le pari de miser sur les socialistes pour faire adopter le budget et ne pas être dans la main du RN comme son prédécesseur, va se retrouver six mois après dans la même situation si la gauche reste unie pour le censurer à l'automne.
Alors qu'il doit présenter mi-juillet les grandes lignes de son budget, et notamment les 40 milliards d'euros d'économies promises, le RN l'a bien compris.
"Les premières pistes évoquées par M. Bayrou pour son prochain budget me font dire qu'il emprunte le même chemin que son prédécesseur: demander des efforts toujours aux mêmes, ceux qui travaillent (...) tout en refusant de s'attaquer à nos dépenses liées à notre modèle migratoire ou à nos dépenses publiques", a averti Marine Le Pen dans Valeurs Actuelles mercredi.