Harcelée à l’école, elle livre son récit
Originaire d’Aix-en-Provence, Ilona Campillo, 30 ans, a posé ses valises à Soursac en Corrèze, il y a deux ans et travaille à Mauriac. La jeune Aixoise a vécu l’expérience douloureuse, pour ne pas dire tragique, du harcèlement scolaire. Si d’autres se résignent et commettent l’irréparable, Ilona, aidée par sa mère et sa psy, est parvenue à remonter la pente et profite de la vie aujourd’hui en puisant une force exceptionnelle dans cette épreuve. Elle se raconte dans cet ouvrage intitulé Un souffle d’espoir , en espérant que ces écrits permettront à d’autres victimes de s’en sortir.
Quand et comment a débuté ce harcèlement à l’école ? Cela a commencé en seconde, par un groupe d’élèves qui s’était lié contre moi du jour au lendemain et qui, pourtant, au début, étaient de mes amis, puis ça s’est poursuivi en première, par deux élèves qui m’insultaient tous les jours du début à la fin de la journée. Je ne me défendais pas, je me sentais démunie. Après le harcèlement scolaire, j’ai fait une phobie scolaire trois mois avant le bac. J’ai eu un emploi du temps aménagé où j’allais en cours le matin seulement. Impossible de m’inscrire et de me projeter sur la suite à donner à mes études, donc j’ai consacré mon temps à me soigner. J’ai suivi une thérapie pendant plusieurs années. J’ai ouvert une entreprise de traiteur événementiel avec un ami, puis repris le restaurant le Soursacois (raison pour laquelle j’ai changé de région).
Avez-vous pensé au pire ? Oui ! Les pires pensées vous assaillent. Dans mon livre, il y a un passage où ma mère raconte qu’elle était partie en déplacement à Lyon et qu’une fois arrivée là-bas, je lui avais envoyé un message en lui demandant de dire au revoir à ma tante, mon grand-père et le reste de la famille. L’été 2018, tous les soirs, l’idée d’aller me coucher m’angoissait car je ne voulais surtout pas me réveiller le jour suivant. Plus tard, ma mère m’a raconté qu’à cette période-là, chaque minute passée était une minute gagnée.
Comment vos proches s’en sont-ils rendu compte ? Ma mère a été la première à se rendre compte du harcèlement scolaire car mon comportement avait changé. Je ne parlais plus, j’étais moins heureuse, moins que je l’avais été auparavant. Au début, je ne voulais pas en parler car je savais que ça ne ferait qu’empirer les médisances que je subissais chaque jour. La CPE (conseillère principale d’éducation, ndlr) a été mise au courant par mes parents. Malgré cela et le renvoi de deux élèves, la situation a empiré. Côté alimentaire, j’ai commencé à perdre du poids, à changer la façon de me nourrir, à ne plus accepter de manger ce que les autres préparaient. Mes proches (familles et amis) essayaient d’alerter ma mère mais nous étions dans le déni total. Elle disait que c’était impossible que j’ai des problèmes avec la nourriture parce que j’étais trop gourmande et épicurienne. Moi, je disais juste que je mangeais sainement et que ça gênait les gens.
Comment vous en êtes-vous sortie ? Un travail acharné sur moi-même, un suivi psychologique régulier, et une bonne thérapie ont eu raison de cette terrible situation… Ça a pris des années, mais ça en valait la peine. Pour ce qui est de la nourriture, en allant mieux j’ai appris à lâcher un peu plus prise. J’ai rencontré un cuisinier qui m’a fait de bons petits plats et dans la bienveillance de tous, en 2020 j’ai réappris à manger « normalement » et de tout. Après il m’a fallu encore du temps avant de redécouvrir ma satiété, d’assouvir toutes les envies gustatives desquelles je m’étais coupée pendant des années.
Comment allez-vous aujourd’hui ? Aujourd’hui ça va, je m’en suis sortie. Je suis libre, j’ai appris à me connaître, appris à vivre aussi avec mon vécu et mon passé et à construire mon présent sans qu’il ne puisse en être affecté à nouveau. Ça reste et restera une partie de mon histoire, mais je suis presque fière de la porter et je n’ai pas de regret d’avoir vécu tout ça. Je me suis toujours dit que si ça m’arrivait c’est que j’avais les épaules pour m’en sortir… J’ai écrit ce livre, pour partager mon vécu, mes sentiments, mes souffrances en toute sincérité. Avec le témoignage de ma maman, mon pilier, les accompagnants pourront aussi trouver un point d’ancrage et être rassurés. En espérant insuffler aux lecteurs un peu d’espoir quant à leur guérison.
Ilona, qui est prof de yoga, développe aujourd’hui des projets autour de cette activité dans la région. Excellente joueuse de tennis, elle donne également des cours aux petits du TPS Mauriac.
En savoir plus. Ilona Campillo sera au salon du livre de Chalvignac, cher à Noëlle Basset, qui se tiendra à la Bruyère, dimanche 20 octobre.