La galère d'une Puydômoise privée de son permis de conduire à la suite d'une erreur
Après plus de quarante ans de conduite sans fausse route, Nathalie Fleig ne s’attendait pas à subir, aussi brusquement que mystérieusement, le même sort que les délinquants routiers. Voilà près de seize mois que cette habitante de Saint-Genès-Champespe ne peut plus prendre le volant. Excès de vitesse ? Alcoolémie ? Rien de tout cela. Son permis de conduire a été supprimé… par erreur !
Elle décide de refaire son permisCette mésaventure kafkaïenne débute le 11 juin 2020. La sexagénaire et son mari, Claude, décident de refaire leurs permis de conduire. « Le mien était dans un état lamentable, à chaque fois les gendarmes m’invitaient à le changer », se souvient Nathalie.
Depuis plusieurs années, les démarches s’effectuent en ligne, sur le site de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS). Quinze jours après avoir adressé leurs demandes et tous les documents nécessaires, le couple reçoit les petites cartes plastifiées qui remplacent désormais les cartons roses.
« Le permis de mon mari est revenu nickel. Sur le mien, en revanche, je remarque une erreur concernant mon permis moto, que j’aurais obtenu en 1972, à l’âge de 12 ans ! Et surtout, mon permis voiture n’y figure plus ! »
Plus qu’une coquille, l’ANTS indique à Nathalie que son permis a été purement et simplement écrasé. On l’invite à faire une demande de correction. Ce qu’elle fait, le 22 août. Mais les semaines s’écoulent et le permis voiture de la Puydômoise ne refait toujours pas surface.
Elle ne peut plus conduire« À chaque fois, on me disait que le dossier était en cours. » Le problème, c’est qu’avec un permis annulé, Nathalie n’a même pas le droit à une attestation provisoire lui permettant de prendre le volant en attendant. « Les gendarmes m’ont clairement demandé de ne plus conduire.
Et à l’ANTS, on me disait : “surtout, ne roulez pas !” ». Plutôt fâcheux quand on habite un village de 224 habitants, au cœur des montagnes du Sancy, et que l’on cherche un travail pour compléter quelques points pour sa retraite. « Sans voiture, c’est impossible ! »
Les mois passent, Nathalie et son mari multiplient les coups de fil et les lettres recommandées auprès de l’ANTS, de la préfecture, des élus… Et toujours rien. « Je suis dégoûtée, tout le monde s’en fout ! », soupire-t-elle. « Au service de la correspondance citoyenne du ministère de l’Intérieur, on m’a même dit : “c’est impossible, vous fabulez !” ».
Vaine demande de correctionContactée, Anne-Gaëlle Baudouin, directrice de l’ANTS, regrette « une erreur difficilement explicable et rarissime ». « Quand madame Fleig l’a signalée à mes services, ceux-ci ont effectué une demande de correction auprès de la préfecture chargée de vérifier que la requête de l’usager correspond bien à un droit existant. » Cette demande de correction n’a, selon elle, « pas été suivie d’effets ».
Une erreur humaine ?Anne-Gaëlle Baudouin précise que l’ANTS n’intervient pas dans l’instruction sur le fond des demandes. Ce travail relève des préfectures compétentes, lesquelles confient ensuite le dossier à un Centre d’expertise de ressources et des titres (CERT). C’est un CERT implanté à la sous-préfecture du Raincy (92) qui a traité le cas de Nathalie.
« Nous sommes en train de refaire le point sur les étapes de cette procédure pour comprendre ce qui a pu se passer. Cela ne semble pas faire apparaître un bug informatique mais plutôt une erreur humaine dans l’instruction de la demande. »
Serait-ce l’effet de notre intervention ? La situation de Nathalie, qui avait aussi personnellement contacté Anne-Gaëlle Baudouin en août, s’est miraculeusement débloquée en fin de semaine dernière. L’ANTS l’a contactée pour lui dire qu’elle allait recevoir son titre, en cours de production. Le soulagement ? Cette piétonne malgré elle, échaudée par cette impasse de seize mois, attend de voir pour le croire…
Olivier Choruszko