Adieu Monsieur Haffmann, la pièce aux quatre Molières, à voir en même temps, au théâtre et au cinéma de Moulins
L’actualité culturelle, bousculée par la crise sanitaire, offre aux Bourbonnais la possibilité de comparer une œuvre et son adaptation, en temps réel.Adieu Monsieur Haffmann est une pièce de théâtre de Jean-Philippe Daguerre qui a obtenu quatre Molière en 2018.Elle devait être jouée le 29 mars 2020 au théâtre de Moulins, elle le sera enfin, si tout se passe bien, samedi 5 février.Suite à son succès, une adaptation cinématographique a été réalisée par Fred Cavayé, avec Daniel Auteuil et Gilles Lellouche, sortie en salles mercredi dernier.
L’histoireAdieu Monsieur Haffmann, c’est la petite histoire dans la grande. Durant l’Occupation, un bijoutier juif, Joseph Haffmann, se cache dans le sous-sol de sa boutique dont il laisse la gérance à son employé, Pierre Vigneau. En retour, ce dernier demande à son patron de faire un enfant à son épouse Isabelle.Le contexte de cette pièce, la persécution des Juifs, en France, en 1942, porte au-delà du fait historique. L’auteur questionne les ressorts de l’ascension sociale et éclaire les arrangements avec la vérité de l’être humain.
Notre analyseJusqu’où on est prêt à aller pour avoir un enfant ? Joseph Haffmann est un homme bien, son employé est honnête, mais…« J’ai essayé de sonder le pire. En tant qu’artiste, on doit questionner, pas donner de leçons », relate à La Montagne, Jean-Philippe Daguerre.Le décor déploie un éventail de tons gris. Il y a trois lieux, les spectateurs passent de l’un à l’autre et assistent aux non-dits.« Ce n’est pas une énième pièce sur 1942. J’ai inventé une histoire d’amour », souligne le metteur en scène et comédien – qui jouera à Moulins le 5 février.Amour, écoute, respect sont entravés par les doutes, la lâcheté et l’ambition. Jean-Philippe Daguerre essaie aussi d’alerter sur le racisme et l’antisémitisme. La scène finale du dîner avec l’ambassadeur allemand relève de l’insoutenable… Personne n’est dupe autour de la table.
La version cinémaLe réalisateur Fred Cavayé s’est librement inspiré de la pièce : « Le propos est le même, mais c’est une autre histoire, c’est hyper intéressant », fait savoir Jean-Philippe Daguerre qui déteste dire qu’une adaptation ciné est « une consécration » pour une pièce.
Le théâtre, le spectacle vivant, est un art unique ; pour moi, le cinéma est une gourmandise différente, un art différent.
Le film diffère sur la forme, tout d’abord, les dialogues ne sont pas les mêmes. Contrairement à des pièces comme Cuisine et Dépendances de Bacri ou Le Prénom de Delaporte et la Patellière, l’écriture de Daguerre n’est pas cinématographique, elle est composée de monologues et de phrases longues, parfois oniriques, avec des rimes, « trop théâtrale », résume l’artiste.Le film est différent sur le fond, surtout : dans la pièce, Haffmann couche avec Isabelle, pas dans le film où l’enfant qu’elle attend est de son mari, mais lui pense que c’est celui d’Haffmann.« Le film est très soigné. Je suis très fier que Fred Cavayé ait gardé mon titre », souligne Jean-Philippe Daguerre.Et vous, au jeu de la comparaison, qu'en penserez-vous ?
Stéphanie Ména
Samedi 5 février, à 20h30, Adieu Monsieur Haffmann de Jean-Philippe Daguerre, au théâtre de Moulins.Tarifs : entre 15 et 40 €Réservations : 04.70.44.44.21.Renseignements : 04.70.48.01.05.